En attendant les propositions de la CGEM sur l'objet de l'ordre du jour du round attendu du dialogue social, les différents départements ministériels finalisent leurs copies finales. Sur le volet de la fonction publique, plusieurs propositions se sont dégagées lors des préparatifs et renvoient en gros aux dossiers encore en suspens, plus de deux ans après les accords du 30 avril 2011. Le contexte de crise, conjugué aux demandes syndicales qui n'ont pas insisté sur une hausse des salaires ont été suffisants pour que le gouvernement structure son offre autour des demandes non quantitatives. «La réduction des délais de promotion de 10 à 5 années au grade d'ingénieur d'Etat, ainsi que de nouveaux régimes de couverture sociale pour plusieurs catégories d'ingénieurs», sont parmi les propositions qui ont été retenues par l'Exécutif. Des avantages seront concédés aux salariés et cadres de l'Etat, notamment «la poursuite de la règlementation de l'exercice des fonctions, le déblocage de la promotion interne pour plusieurs ministères, avec un plan pour l'instauration de la formation continue», suggère le document d'orientation des propositions du gouvernement lors du prochain round. La généralisation du concours pour toutes les fonctions publiques et la priorité qui sera accordée à la convention collective sont deux autres chantiers que le gouvernement s'engage de mener en 2013. Les demandes syndicales croisées avec le blocage des signatures des conventions au sein des entreprises posent en effet plusieurs questions sur les mesures qui vont être prises en 2013. Le bilan insignifiant réalisé jusqu'à présent pousse également le gouvernement à proposer d'élargir les attributions du Conseil supérieur de la convention collective, qui reste un organe dépourvu de réels pouvoirs sur les partenaires sociaux. «La nouvelle stratégie de généralisation des conventions collectives aura certainement un impact sur l'élaboration de la charte sociale. Au-delà des questions relatives à la valorisation des conditions de travail au sein des entreprises du secteur privé, la nouvelle charte devrait servir de cadre d'action pour les conventions qui seraient signées, ainsi qu'offrir des garanties aux partenaires sociaux pour faire prévaloir leurs droits dans les moments de crise», suggèrent plusieurs ministères, sans oublier l'activation des recommandations et des protocoles d'accords qui sont restés lettre morte depuis 2010. Le gouvernement s'engage également à activer les mesures destinées à la création du service social du travail au sein des entreprises, un nouveau service qui coïncide avec les mesures prises par la CGEM, destinées à mettre en place un nouveau système de responsabilité sociale. La bouffée d'oxygène des commissions Pour donner d'autres preuves de bonne foi, plusieurs nouvelles commissions seront mise en place. Le chef de gouvernement a proposé de mettre en place une structure permanente du dialogue social, qui aura pour tâche de garder le contact avec les syndicats, avec des réunions périodiques. Un comité spécial pour la révision des commissions paritaires et un autre exclusivement dédié à l'application des accords de 2011 seront aussi mis en place après ce round de septembre. «Une entité chargée de la révision de la composition des commissions paritaires, qui ont un rôle essentiellement consultatif concernant la titularisation des fonctionnaires stagiaires, les promotions et les démissions», sera aussi proposée. Le renouvellement des commissions paritaires sera également vital pour le volet des mesures disciplinaires qui sont prises à l'égard des fonctionnaires qui s'absentent pour une longue durée sans motif légitime. Le Conseil supérieur de la Fonction publique, dont les membres sont choisis parmi les membres de ces commissions, est aussi concerné. Un autre comité restreint cette fois, a été mis en place pour veiller à la transparence des concours. Pour les dossiers litigieux comme celui de la grève des collectivités territoriales, le gouvernement suggère d'activer le «comité de suivi qui a été mis en place pour lister les revendications urgentes des communes, à satisfaire». Le dossier revendicatif des centrales est articulé pour sa part autour de la mise en place d'une fondation des œuvres sociales, des retards de versement des salaires pour les fonctionnaires des communes des zones rurales, ainsi que de l'amélioration des conditions d'accueil au sein des collectivités. La paix sociale Le grand enjeu du prochain round sera certainement le maintien d'une paix sociale durable. La procédure amiable et les nouveaux dispositifs de la médecine du travail font partie des propositions prioritaires du gouvernement, qui étaient toujours inscrites parmi les demandes urgentes des syndicats. La simplification des procédures pour les victimes des accidents et de leurs ayants droit et le paiement de leurs allocations dans des délais raisonnables, tout comme la limitation des déclarations abusives évitera le recours aux procédures judiciaires. «En outre, un contrôle plus tatillon sur les unités de production industrielle et commerciale qui sont encore récalcitrantes, ou se sentant peu concernées par les exigences sanitaires et hygiéniques et préventives qui leur incombent, est nécessaire». L'Etat compte aussi mettre les gros moyens en 2013, afin de «diminuer les risques professionnels et de davantage développer les services de la médecine du travail au sein des entreprises». L'objet des visites d'inspection consistera en un contrôle des conditions d'aménagement des lieux d'exercice des médecins et des équipements et appareils médicaux devant être assurés par les employeurs. Un bilan annuel sera également exigé, à côté de la mise en place de nouveaux modèles types de formulaires pour une plus grande visibilité des données relatives aux maladies et risques professionnels. Sans oublier l'obligation pour les PME de souscrire à l'assurance accidents du travail et maladies professionnelles. Le changement de cap dans les revendications des centrales syndicales les plus représentatives, lors des réunions préparatoires a poussé le gouvernement à se focaliser sur la problématique de la représentativité au niveau des secteurs publics et privés. Le regain d'intérêt des libertés syndicales bute cependant sur l'absence d'accord de principe sur les nouvelles lois organiques de la grève et des attributions des syndicats, dont les moutures préparées par le gouvernement sortant ont été retirées pour des besoins d'adaptation. En contrepartie de ce statu quo, le gouvernement propose «la pleine activation de la réforme des régimes indemnitaires, la hausse des quotas de la promotion interne pour les fonctionnaires, les élections des commissions paritaires et enfin l'activation de l'indemnisation pour perte d'emploi». Les 4 points ont été discutés lors de la réunion préparatoire tenue avec le gouvernement, sans que les parties se mettent d'accord sur les moyens et leur mise en œuvre, avant la fin de cette année 2012. Un nouveau mode de gestion des RH Le projet du département de la modernisation de l'Administration veut résoudre à la fois la problématique des fonctionnaires fantômes, ainsi que celle de l'évolution des carrières et devrait être achevé en juin 2012. Même si les communes risquent d'être encore une fois le talon d'Achille de la nouvelle stratégie, le nouveau mode d'intervention et de gestion des ressources humaines est un passage obligé avant l'entame des discussions autour de l'élaboration d'une charte des services publics, à laquelle le CES sera consulté. «De nouvelles règles de bonne gouvernance relatives au fonctionnement des administrations publiques, des régions et des autres collectivités territoriales et des organismes publics seront mises en place», précise le document de base de la nouvelle stratégie. La Cour des comptes devra être pour sa part le pivot du contrôle de l'Etat sur ses services, avec des rapports plus dissuasifs et s'intéresseront tout particulièrement aux services publics qui gèrent les deniers publics. La nouvelle logistique qui est en train d'être finalisée pour être prête lors la seconde moitié de l'année 2012, vise un nouveau système décisionnel qui permettra au gouvernement l'évaluation et le pilotage des politiques interministérielles «tout en allégeant la charge de renseignement des enquêtes auprès du ministère». Au souci de la réduction des coûts, s'ajoute la mise en place d'un infocentre RH qui génèrera également des statistiques et des tableaux de bord sur l'ensemble des fonctionnaires de l'Etat. Troisième axe de la stratégie, l'amélioration de la qualité des services rendus, ainsi que la mise en place des outils pour assurer le suivi des réclamations émanant des usagers, essentiellement lors des grèves avec l'exigence du service minimum qui doit être respecté. À ce niveau les communes seront les plus concernées avec le retard accusé en matière d'information à disposition des citoyens. Ce chantier est surtout primordial pour la lutte contre la corruption et calque le modèle qui a été généralisé pour l'ensemble des administrations centrales et des services extérieurs des ministères, et ceci donne des résultats intéressants au niveau de la fluidité du traitement des demandes des usagers. Dixit Nous avons pu découvrir durant notre réunion avec le gouvernement que la phase de l'institutionnalisation du dialogue est prête à être entamée. Le gouvernement veut aussi que ce round ne se solde pas par un échec et cela a été perceptible durant notre rencontre avec le président du gouvernement, malgré le poids de plusieurs contraintes. Plusieurs propositions ont émané de l'UGTM comme l'activation du dialogue social au niveau régional ainsi que la sauvegarde du pouvoir d'achat des salariés. Hamid Chabat, SG de l'UGTM. La FDT a réitéré ses demandes relatives à l'institutionnalisation d'une méthodologie fructueuse et positive du dialogue social, avec un engagement du gouvernement à garantir les libertés syndicales. Nos attentes se focalisent également sur l'exécution de ce qui reste des accords d'avril 2011, ainsi que la limitation des répercussions de la crise sur la situation des salariés et la sauvegarde de leur pouvoir d'achat. Le gouvernement est également appelé à innover lors de ce round en proposant des mesures cohérentes et applicables et non pas en se contentant de chercher des solutions faciles. Larbi Habchi, dirigeant au sein de la FDT. C'est le début des pourparlers sur le prochain round et nous avons pu constater que le gouvernement affiche une volonté pour dépasser tous les obstacles. Chacune des parties a étalé ses vues sur les mesures à prendre pour satisfaire les demandes légitimes des travailleurs. Ce qui est également crucial, c'est la nouvelle méthode du dialogue qui est actuellement en phase d'étude avec le gouvernement et cela pour ne pas rester dans les débats formels ou occasionnels. Au sein de l'UNTM, nous pensons que plusieurs dossiers revendicatifs doivent être abordés avec sérieux et responsabilité. C'est le cas pour les dossiers de la réforme des retraites, de la Caisse de compensation ainsi que la question des libertés syndicales. Les pourparlers préliminaires avec le président du gouvernement ont permis aussi d'arrêter l'application des accords conclus en 2011 et leur nécessaire mise en œuvre complète, attendue par l'UNTM. Abdelilah Halouti, vice-président de l'UNTM. Ce qui reste des accords de 2011 Face à la crise, les syndicats préfèrent feuilleter les accords conclus en 2011 avec le gouvernement sortant d'Abbas El Fassi, lesquels avaient prévu plusieurs mécanismes d'appui. Les syndicats pourront pour la 1re fois proposer des mesures à insérer au projet de budget 2013, comme c'est le cas pour la CGEM, lesquels insistent sur la mise en application de l'augmentation du quota de promotion de 28% à 33%, qui a été décidée en deux étapes et dont la 2e tranche est programmée à partir de janvier 2013. Le même délai a été prévu pour l'ouverture de la possibilité de la promotion exceptionnelle, en fixant un plafond d'attente de ladite promotion à 4 ans. La préservation du pouvoir d'achat à l'ensemble des citoyens, en augmentant l'enveloppe allouée à la Caisse de garantie d'un montant de 15 MMDH, en plus du montant initial, qui s'élève à 17 MMDH, figure parmi les demandes les plus pressantes des syndicats. L'étude sur la révision du plafond de référence pour le calcul de la pension servie par la CNSS, fixée à 6.000DH, et l'accélération du processus d'adoption du projet du code de la mutualité demeurent parmi les demandes à discuter lors du round attendu.