C'est officiel, enfin presque... Le Maroc a eu l'accord des pays du Golfe pour un financement de 5 milliards de dollars sur cinq ans, en vue de financer les projets d'investissement de l'Etat. Cet accord de financement sera annoncé incessamment. On parle même d'une grosse annonce ce mardi. Ces financements s'inscrivent dans le cadre de l'intégration du Maroc dans le CCG qui lui a ainsi ouvert la porte de plusieurs fonds souverains et fonds d'investissement du Golfe. D'ailleurs, une grande opération de charme de ces fonds souverains est prévue en décembre prochain pour la promotion de leurs actions et de leurs ambitions au Maroc. Pour revenir au financement décroché par le Maroc, il est indiqué que les fonds signataires sont saoudiens, émiratis, qataris et koweitiens, à raison de 1,25 milliard de dollars par pays. Les secteurs visés ne sont pas tous dévoilés, mais on apprend déjà qu'une bonne partie de ces financements iront aux projets d'infrastructures, au social avec notamment la santé ou encore à l'agriculture avec le Plan Maroc Vert. Un représentant d'un fonds souverain arabe a confié que désormais, les fonds souverains placent la rentabilité en tête des motivations d'investissement et qu'au Maroc, la décision d'investir est liée au potentiel de croissance affiché par ces secteurs. Le secteur de l'immobilier est ainsi considéré comme saturé et donc éliminé d'office des plans des fonds souverains. Une mauvaise nouvelle pour les opérateurs qui jusque-là tablaient sur les investisseurs arabes pour relancer le secteur. L'endettement, arme à double tranchant L'annonce de cette manne financière arrive à point nommé pour soulager les finances publiques qui peinent de plus en plus à préserver les équilibres financiers et à financer les investissements publics prévus cette année. C'est la deuxième grosse annonce après celle de la ligne de précaution de liquidité accordée par le FMI, qui vient préparer le terrain à la sortie à l'international qui se confirme de plus en plus et qui devrait, selon des sources ministérielles, intervenir en octobre prochain pour soutenir l'effort d'investissement public. «Le danger est que ces options de financement incitent le gouvernement à l'endettement facile. N'oublions pas que l'endettement interne est actuellement supérieur à 30% du PIB national, le risque de surendettement est là, il nous guette si on n'agit pas en priorité sur les réformes structurelles», souligne un économiste averti. Ce qui nous amène à regarder de près la grosse annonce que le ministère des Finances s'apprête à faire et qui consiste en la création d'un comité mixte dit, de «compétitivité» que le gouvernement compte mettre en place en partenariat avec la CGEM pour soutenir l'entreprise. Néanmoins, cette mesure, bien que pas encore officiellement mise en place, laisse sceptiques nombre d'observateurs et d'hommes d'affaires. «L'entreprise marocaine a besoin d'un soutien effectif par uniquement des mesures théoriques et d'un énième comité qui se réunira dans une salle pour sortir des recommandations qui resteront lettre morte», soutient un patron de PME. Le soutien de la compétitivité de l'entreprise n'est plus un luxe aujourd'hui. Dans un environnement où nos exportateurs subissent de plein fouet la crise et évaluent les dégâts de leur business avec un marché européen désormais sous perfusion, le gouvernement doit proposer des solutions efficaces et effectives au tissu industriel national et à nos PME-PMI sinistrées. Quelques pistes sont déjà mises en avant par les opérateurs économiques et les économistes. Pour eux, il est impératif de changer d'approche par rapport aux marchés clients, à travers la mise en place d'une stratégie commerciale plus agressive avec des objectifs et des moyens, qui sera confiée à des profils de commerciaux et de spécialistes par zone. Stratégie offensive Pour les PME exportatrices, la priorité doit être donnée aux subventions et autres moyens de soutien qui permettront à l'entreprise de vendre à un coût marginal pour être compétitive face à ses concurrents. L'objectif étant de doper l'entrée en devises. De telles mesures devraient permettre la conquête de nouveaux marchés, tels que les pays de l'Est pour pallier la défaillance des marchés classiques tels que l'Europe, pour diversifier le risque mais aussi et surtout booster la croissance. Le tout couplé à une diplomatie économique efficace, basée sur le remplacement de la promotion canapé par une promotion terrain. L'autre axe recommandé par les économistes est l'ouverture dans les pays stratégiques pour le Maroc de représentations permanentes ou de vitrines d'exposition permanentes de l'offre marocaine, à l'image du Centre commercial que l'Egypte a ouvert au Maroc et où les entreprises égyptiennes sont en prospection dans les régions et les secteurs les plus prometteurs. «Ceci a permis à l'Egypte de multiplier par 10 ses exportation vers le Maroc», témoigne un exportateur. Sur le plan de l'assise fiscale, le gouvernement s'apprête à mettre à plat tout le système fiscal avec notamment la révision de la TVA. «Pour l'instant, le système actuel peut se résumer au fait que l'Etat finance les banques et freine l'investissement au niveau de l'entreprise. Si nous adoptons une approche globale, cela libèrera l'entreprise et l'investissement», note le ministre des Finances, Nizar Baraka. Là encore, aucun détail n'a été avancé, mais si l'on se réfère au débat remis chaque année à la veille de la discussion de la loi de Finances, l'idéal est de s'orienter vers un système à deux taux, 10 et 15% pour remplacer la multitude de taux actuels. «Une baisse du taux de TVA de 2% permettra automatiquement de gagner 3% au pouvoir d'achat des citoyens. L'effet est immédiat sur le budget des ménages. Et qui dit amélioration du pouvoir d'achat, dit amélioration de la consommation et donc de la production et par ricochet, de l'investissement et de l'emploi», soutient un économiste. En résumé, la révision de la TVA est la solution idoine pour doper la consommation. L'autre volet sur lequel l'équipe Baraka et avec elle tout le gouvernement Benkirane qui prône le courage politique, est celui des aberrations liées aux exonérations fiscales qui créent des inégalités économiques à l'intérieur du même secteur parfois. Optimiser, optimiser... Le ministre des Finances, Nizar Baraka, a déclaré qu'un grand chantier de redéfinition du rôle de l'Etat est ouvert actuellement. Il porte en priorité sur la révision des participations de l'Etat et la gestion «optimisée» du foncier et autres domaines. On apprend ainsi qu'à l'avenir, les participations de l'Etat devront être décidées ou révisées selon trois critères : l'utilité publique, le service rendu aux citoyens et la rentabilité (dividendes). Ce qui aura le mérite de répondre une bonne fois pour toutes aux questions relatives à la cohérence des prises de participation de l'Etat dans certaines entreprises publiques ou privatisées et sur le manque à gagner en termes de remontée de cash en dividendes attendue. Pour ce qui est du foncier, les transferts et les cessions de domaines ne se feront désormais qu'après assainissement, c'est à dire après émission des titres fonciers ou encore après évacuation des éventuels «squatteurs» qui posent généralement problème et retardent le lancement de projets créateurs de valeur, comme ce qui s'est passé pour le Plan Maroc Vert.