Le département du Commerce extérieur vient d'annoncer l'instauration d'une procédure de surveillance des importations de PVC. Désormais, «les importations de PVC en provenance des USA, relevant de la position tarifaire 390410, seront soumises, à compter du 31 juillet 2012, à Déclaration Préalable à l'Importation (DPI) pour une durée de 9 mois». Une manière de répondre aux doléances de la Société nationale d'électrolyse et de pétrochimie (SNEP), qui tance les exportateurs américains à propos de dumping sur le PVC. Pour Mohamed Regba, administrateur directeur général de la SNEP, «Le dumping exercé par les Etats-Unis émane d'une baisse de la demande internationale dans un contexte de crise du BTP qui, à lui seul, représente 70% des débouchés du PVC à travers le monde». L'enquête ouverte par le département du commerce extérieur pouvant durer jusqu'à une année civile, cette procédure de surveillance vient à point nommé pour la SNEP. En effet, entre 2010 et 2011, les ventes de la SNEP ont régressé de 6,3% quand la consommation nationale augmentait de quelque 6,5%. Le lien de causalité pour la SNEP semble dès lors évident. Hausse des importations provenant des EU Ce n'est en effet pas la première fois que la SNEP recourt au département du Commerce extérieur pour faire valoir ses droits. Cette fois-ci, elle semble avoir été entendue. Depuis 2008, explique Regba, «les groupes pétrochimiques internationaux ont été frappés de plein fouet par le déclin de la demande de produits plastiques», en raison de la crise mondiale, s'entend. Face à cette situation, continue l'intéressé, «les groupes pétrochimiques des pays les plus industrialisés et particulièrement les Etats-Unis ont été amenés à déstocker leurs surplus de production à l'étranger - dont le Maroc - à des prix très bas défiant toute concurrence». Selon lui, «les exportations US de PVC vers le monde ont enregistré une progression vertigineuse de + 415% passant de 650 .000 T en 2005 à 2.700.000 T en 2010». Dans le rapport d'ouverture du département du Commerce, il est noté que «les importations en provenance des USA ont connu une tendance haussière à partir de 2008 en passant de 5.931 T en 2008 à 26.676 T en 2011 enregistrant une augmentation importante de 350%». Ce qui fait aujourd'hui des Etats-Unis le premier fournisseur du Maroc en PVC, avec «une part qui est passée de 20% en 2008 à 67% en 2011». Effet prix Outre l'effet volume, la requête met aussi en évidence un effet prix. Entre 2008 et 2011, indique le rapport, «les prix unitaires des importations de PVC des USA se sont maintenus à des niveaux inférieurs aux prix moyens du PVC importé d'autres pays», une différence qui se serait «maintenue aussi pendant le premier trimestre 2012». Des éléments qui donnent au final une marge de dumping «estimée par le requérant à 34%», note le rapport. Soit la différence entre le prix à l'exportation sortie usine, établit à 916 $/T, et la valeur normale sortie usine, arrêtée à 1293 $/T. Sur les valeurs comptables de la société, la SNEP, pour un indice des ventes de 100 en 2008, estime que ses ventes sont tombées en l'espace de trois exercices, à 90,53 en 2011, soit une baisse de près de 10%. Si nous rajoutions à cela la baisse de la part de marché (– de 100 en 2008), elle n'est plus que de 79,17 en 2011, sans oublier la déconvenue du résultat net qui s'était réduit de moitié en 2009 et 2010, avant d'exploser en 2011 (chute de 83%), «la dégradation de l'activité de la SNEP» ne fait plus de doute. Alors, «Certes, l'enquête peut s'étaler sur une année civile, mais devant la baisse des résultats financiers de SNEP causée par la concurrence déloyale induite par le phénomène de dumping, indique Regba, nous avons émis dans notre requête le souhait au ministère de mettre en œuvre des mesures provisoires, comme cela a été le cas pour le contreplaqué». Aussi, l'intauration par le département du Commerce extérieur d'une procédure de surveillance ne peut que le conforter, en attendant d'imposer des mesures antidumping à l'égard des exportations américaines de PVC. Mohamed Regba, Administrateur Directeur Général SNEP. «La branche du PVC se porte bien au Maroc» Les Echos quotidien : Auparavant, les requêtes de la SNEP pour les mêmes motifs étaient rejetées. Qu'est- ce qui fait que le département du Commerce l'ait reçue favorablement cette fois-ci ? Mohamed Regba : La requête relative à l'avis public 03/09 déposée en 2009, concerne une demande d'application de mesures de sauvegarde (et non de mesures anti-dumping). L'avis public émis le 13.12.2009 a été suivi par une audition publique le 18 janvier 2010. En revanche, c'est la SNEP qui a procédé au retrait de sa requête le 6 août 2010, du fait du retour des importations de PVC à la normale, atteignant le même niveau qu'en 2008. Aujourd'hui, conformément aux dispositions de l'OMC et aux lois marocaines en vigueur, nous avons déposé une requête de mise en œuvre d'une défense commerciale relative aux mesures antidumping, afin de contrecarrer les préjudices causés par les importations de PVC à des prix dumping en provenance des Etats-Unis. Et c'est ce qui a donné lieu à l'avis public n°4/12, relatif à l'ouverture d'une enquête anti-dumping sur les importations de PVC américain. Le fait que le département du Commerce extérieur daigne enfin répondre à votre demande, est-il le signe que la branche des PVC va mal au Maroc ? Non, la branche du PVC se porte bien au Maroc. Si la dégradation de la conjoncture du marché international du PVC résulte d'un développement de circonstances déclenchées par la crise économique internationale, au Maroc, en revanche, la demande connaît une progression grâce au maintien de l'activité économique en relation avec le développement des grands chantiers structurants (projets d'assainissement, adduction d'eau potable, BTP...). Par ailleurs, je tiens à souligner un élément important. Il n'y a pas que le Maroc qui a ouvert une enquête anti-dumping au sujet des importations de PVC issues des Etats-Unis. D'autres pays, et non des moindres, tel que la Turquie, l'Inde, le Brésil, la Chine ou l'Australie... ont obtenu l'application de mesures commerciales anti-dumping pour corriger la discrimination exercée par les exportations du PVC à des prix très bas Entre la hausse du prix des hydrocarbures et le dumping des produits américains, la SNEP est-elle plus sensible qu'auparavant ? Le dumping est un phénomène international qui touche de nombreuses industries dans le monde. Grâce à son savoir-faire technique, à l'expertise de ses ressources humaines et à la solidité de ses indicateurs économiques, la SNEP a pu démontrer une bonne résilience dans un marché entièrement libéralisé, en sauvegardant ses parts de marché face à plusieurs facteurs agrégés, à savoir : la recrudescence des importations de PVC à des prix dumping ; la hausse de la facture d'électricité de 17% en 2008 et la forte volatilité des coûts d'approvisionnement en matières énergétiques et les prix de l'éthylène.