Nizar Baraka , Ministre de l'Economie et des finances. Les Echos quotidien : Comment devraient évoluer les finances publiques et les fondamentaux économiques cette année, dans un contexte des plus difficiles ? Nizar Baraka : Sur la situation des finances publiques et plus généralement sur la situation des équilibres macroéconomiques, il faut arrêter de jouer les Cassandre et saper, ainsi, la confiance des opérateurs économiques. Certes, si le Maroc fait face à plusieurs chocs exogènes et à l'incertitude qui entoure la zone euro, notre principal partenaire, le gouvernement est déterminé à maintenir les déficits à un niveau soutenable et à prendre des mesures de rupture, s'il le faut, pour y parvenir. C'est pourquoi je peux vous affirmer que le déficit budgétaire de 2012 sera contenu autour du niveau prévu dans la loi de finances, à savoir 5% du PIB. Vous êtes donc toujours optimiste ? Les résultats disponibles, à fin mai 2012, font ressortir un comportement globalement favorable des recettes, en comparaison avec aussi bien la même période de l'année 2011 que les prévisions initiales. Cette évolution est attribuable principalement au bon comportement des recettes fiscales qui ont affiché, à fin mai 2012, une hausse de 8,4%. Ce qui dénote la confiance des opérateurs économiques (hausse de l'IS de plus de 6%), et l'amélioration de la consommation des ménages (Hausse de la TVA de plus de 10%). Il est à signaler également la hausse de l'IR de plus de 22,5%, en raison principalement de la mise en application des mesures de dialogue social du 26 avril 2011. D'un autre côté, les dépenses de l'Etat ont été maîtrisées en raison des mesures prises par le gouvernement, qui devraient permettre de réduire le déficit budgétaire de plus de 1,5% du PIB. Ces mesures ont porté, d'une part, sur la répercussion partielle de la hausse des cours internationaux des produits énergétiques sur les prix intérieurs de certains produits subventionnés (essence, gasoil et fuel industriel) et d'autre part, sur la rationalisation des dépenses de fonctionnement, qui se sont stabilisées au même niveau de l'année dernière. Quid des perspectives des finances publiques en 2013 ? S'agissant des perspectives, il est à souligner que le gouvernement est décidé à poursuivre cet effort d'ajustement progressif du déficit budgétaire dans l'objectif de ramener ce dernier au niveau de 3% à l'horizon 2016 et ce, conformément aux engagements du programme gouvernemental, d'une part, et aux dispositions constitutionnelles qui ont consacré le principe des équilibres économiques et financiers. Qu'en est-il du taux de croissance qui sera ramené à 2% ? Comme vous le savez, le taux de croissance ayant servi de base pour la préparation de la loi de finances de 2012 a été de 4,2%. Bien évidement, au vu particulièrement des premiers résultats de la campagne agricole, ce taux a été révisé à la baisse pour revenir à une croissance d'environ 3,4%. En effet, la récolte céréalière a été estimée à 48 Mqx, un niveau en baisse de 43% par rapport à celui de l'année précédente mais largement supérieur à ceux enregistrés lors des précédentes années de sécheresse, soit 24,4 Mqx en 2007 et 19,4 Mqx en 2000. Compte tenu du plan anti sécheresse mis en œuvre par le gouvernement en avril 2012, visant notamment à réduire l'impact de la sécheresse dans les domaines de sauvegarde et de protection du cheptel, et des effets bénéfiques des pluies enregistrées à la fin du mois de mars et pendant le mois d'avril, l'état végétatif des autres cultures a été sensiblement amélioré, ce qui est de nature à compenser en partie, la baisse de la valeur ajoutée agricole qui devrait être contenue à près de 5% durant l'année 2012. Ce résultat est corroboré par le poids de la céréaliculture, qui ne dépasse pas les 18% et qui désormais se situe, en termes de valeur ajoutée agricole, après l'élevage (30%), l'arboriculture fruitière et le maraîchage. Du côté des activités non agricoles, les indicateurs disponibles confirment la prévision de l'ordre de 4,4%. À ce titre, il est à signaler que la croissance du secteur industriel a marqué au cours du premier trimestre 2012 son taux de croissance le plus élevé depuis 2009, soit 3,7%. Ce résultat encourageant s'ajoute à la bonne performance des autres secteurs tels que le BTP, l'énergie et les services. D'ailleurs, il est à signaler que certains organismes internationaux tablent sur un taux de croissance aux alentours de 3% pour le Maroc. L'inflation sera-t-elle maîtrisée ? Sur les quatre premiers mois de l'année 2012, le taux d'inflation réalisé n'a pas dépassé 0,7% contre 1,1% durant la même période de l'année précédente. Tenant compte de l'évolution saisonnière de l'inflation sur les mois restants de l'année et de l'impact, somme toute limité, de la hausse des prix de certains produits énergétiques, le taux d'inflation attendu pour l'ensemble de l'année devrait rester maîtrisé au niveau prévu et pourrait même se limiter aux alentours de 2%.