Cap sur l'Afrique ! Au delà des mots et des intentions conjuguées à quelques excursions de plusieurs entreprises nationales, le Maroc se prépare à franchir une nouvelle étape dans sa stratégie de conquête du marché africain. En atteste la multiplication des sorties ces dernières semaines, du chef de la diplomatie marocaine au niveau de plusieurs pays africains. Rien que ce mois, Saâd-Eddine El Othmani était, respectivement, au Niger puis au Burkina-Faso, deux pays d'Afrique de l'Ouest où le ministre des Affaires étrangères a procédé à la réactivation des mécanismes de coopération, dont la plupart sont en veille depuis des décennies. «Il s'agit d'abord, de la redynamisation des commissions mixtes, à la mise en oeuvre des dispositions des conventions bilatérales, ainsi qu'à la promotion des investissements et des exportations du secteur privé marocain à destination des pays africains», a précisé Othmani. Dans cette visée, le chef de la diplomatie marocaine a souligné la volonté du Maroc de s'ouvrir sur de nouvelles zones, notamment l'Afrique anglophone, et au développement des relations avec les blocs régionaux, comme l'Union monétaire ouest-africaine (Uemoa) et la commission de l'Union économique et monétaire de l'Afrique centrale (Cemac), «tout en jouant un rôle primordial pour la restructuration de la communauté des Etats du Sahel et du Sahara» (CEN-SAD). Au cours de ses visites de travail au Niger et au Burkina, qui ne sont que le prélude à une série qui s'annonce longue, Saâd-Eddine El Othmani a ainsi balisé le terrain aux opérateurs privés marocains qui peuvent, désormais, s'appuyer sur des mécanismes solides, afin de mieux profiter des opportunités qui leurs sont offertes. Au Burkina-Faso par exemple, la réunion de la commission mixte maroco-burkinabè, les deux parties ont souligné «le rôle primordial du secteur privé dans les échanges économiques et commerciaux, avant d'inviter les opérateurs privés des deux pays, «à saisir les opportunités de partenariat qu'offrent les deux marchés respectifs ». Tout comme avec les opérateurs nigériens, il a été décidé de la mise en place des conseils d'affaires entre le Maroc et le Burkina, d'une part, et entre le Maroc et le Niger, d'autre part. Stratégie payante Les perspectives de coopération entre le Maroc et plusieurs pays africains connaîtront donc bientôt un nouvel élan. C'est en tout cas l'objectif visé par la randonnée d'Othmani dans le sud du continent. Une stratégie payante qui rappelle les multiples visites qu'avait effectué, à l'aube du siècle, le souverain dans la même région et qui a balisé le chemin à une véritable OPA de plusieurs grandes entreprises marocaines, qui se sont bien installées en Afrique. Il s'agit cette fois d'aller plus loin à travers des mécanismes de coopération juridiquement définis et qui insuffleront un déclic certain à la dynamique marocaine. Au premier plan de cette stratégie, la diplomatie marocaine qui s'appuie sur les mécanismes politiques de coopération. «L'action diplomatique marocaine s'est assignée pour objectif stratégique de hisser la coopération avec les pays africains au niveau d'un véritable partenariat agissant et solidaire», souligne t-on auprès du ministère des Affaires étrangères. L'empreinte de cette approche se ressent d'ailleurs à plusieurs niveaux. C'est en ce sens qu'en prélude à la prochaine caravane africaine organisée par Maroc-Export - qui reprend ses droits à partir du 2 juin prochain-, les objectifs en termes financiers ont été revus à la hausse. Près de 2 MMDH, telles sont les ambitions qu'affiche l'organisme marocain pour cette édition qui visitera trois pays (Burkina, Gabon et Cameroun). La stratégie de diversification des partenaires commerciaux du Maroc est donc en bonne voie, particulièrement dans le Sud. Reste aux opérateurs privés de savoir saisir l'occasion en s'appuyant sur le relais diplomatique. CEN-SAD, la porte d'entrée Le Maroc accueille, courant juin, la réunion extraordinaire du Conseil exécutif des ministres des Affaires étrangères de la Communauté des Etats sahélo-sahariens (CEN-SAD). Une rencontre à multiples enjeux à laquelle se préparent activement les services du ministère des Affaires étrangères. Il s'agit, d'abord, pour le Maroc de faire son come-back sur la scène continentale à défaut de vouloir réintégrer, à court terme, l'Union africaine. Ensuite, il est question de saisir cette opportunité pour intensifier son offensive commerciale au Sud. Selon les explications données par le chef de la diplomatie marocaine, «la CEN-SAD est une organisation qui avait besoin d'une réorganisation et le Maroc, tout en proposant d'accueillir la réunion extraordinaire du Conseil exécutif des ministres des Affaires étrangères, a suggéré de faire partie du Comité de réorganisation». Il faut dire que l'organisation, créée en 1998 sous la houlette du «guide» libyen Khaddafi, est un joli tremplin pour le Maroc en vue d'accéder au marché africain. La CEN-SAD regroupe, en effet, une trentaine de pays et dont les principales missions visent à l'instauration d'une union économique globale continentale. Entres autres axes de la stratégie, initialement adoptée par l'organisation, «la libre circulation des personnes, des biens et capitaux des pays membres». En prenant le relais de la Libye qui a réussit une véritable percée en Afrique à travers cette organisation et à travers une nouvelle organisation, le royaume consolidera, incontestablement, sa position sur la scène africaine avec des profits certains à la clé.