Mauvaise nouvelle pour les professionnels de la pêche : la mer serait moins généreuse, et le marché mondial, moins demandeur. La baisse du volume de la production halieutique, dont la production des pélagiques, ainsi que l'inflexion des prix sur le marché international, sont autant de boulets qui minent l'activité. C'est du moins ce que relève la dernière note de la direction des Etudes et des prévisions financières (DEPF) au ministère de l'Economie et des finances. Ceci expliquerait alors la chute libre des exportations des produits de la mer avec un volume exporté en baisse de 10% en 2011. Dans le détail, c'est une baisse de pas moins de 40%, en volume, et 9%, en valeur, qui est relevée pour cette seule année. Sous un angle structurel, les exportations en valeur sont essentiellement assurées par le congelé à hauteur de 41%, les conserves et semi-conserves avec 38% et dans une moindre mesure, le frais pour 13%. Croisés avec la tendance générale et les inquiétudes déjà ressenties des industriels de la transformation et de la valorisation des produits de la mer, ces chiffres démontrent le réel malaise que traverse le secteur sur le terrain. «Nous ne parvenons pas à trouver les produits frais ou congelés nécessaires à notre activité, pour assurer une production suffisante en dérivés et produits transformés», déplore un industriel de Mohammedia. La sonnette d'alarme pourrait alors être tirée au regard de l'importance de cette catégorie de produits dans les exportations globales du pays. C'est d'ailleurs ce que démontre la DEPF, qui relève le fait que seuls quatre produits comptent pour 77% des exportations. Et si l'Afrique sauvait la mise ? Il s'agit en l'occurrence des céphalopodes congelés (27%), des conserves de pélagiques composées essentiellement de sardine (37%), du poisson frais (8%) et des crevettes (6%). Dans une approche par destination, les produits marocains partent vers différents pays du monde, avec une extension notable vers les pays d'Afrique subsaharienne, même si le marché principal reste le marché européen, qui absorbe près de 70% des exportations. Le potentiel du continent africain est soulevé à maintes reprises par les professionnels desdifférents secteurs aujourd'hui. Dans cette approche, le secteur halieutique ne fait donc pas exception, enregistrant par là un triplement des exportations des produits de la mer, vers les économies subsahariennes et ce, sur la période 2000-2011. Dans ce sens, le niveau des exportations est passé de 570 MDH à plus de 1.530 MDH, avec un pic de 1.900 MDH en 2010. De plus, ce nouveau marché est loin d'être saturé, puisqu'il présenterait encore d'énormes potentialités pour les exportations marocaines. Dans ce contexte, les professionnels de la pêche pourrait bien gagner à revoir leur stratégie d'exportation, pour tabler sur de nouvelles destinations, tout en misant moins sur celles dites traditionnelles. Par là, il faudrait entendre les marché européen et asiatique, qui connaissent un recul de leur demande. À titre indicatif, durant la dernière décennie, les exportations des produits de la mer destinées à l'Asie, notamment au Japon, sont passées de 2.700 MDH en 2000, à 727 MDH en 2011, soit une baisse de 73%. Face à cette donne, l'Etat semble faire dans l'anticipation en mettant en place un plan dédié au soutien et au développement du secteur, tablant sur l'innovation et la valorisation des produit du Maroc. Les «bons coups» d'Halieutis pourront-il renverser la tendance d'un contexte particulièrement difficile pour les industriels du secteur ? Si le dernier salon Sea Food avait permis de noter un réel problème en termes d'offres conserves, semi conserves ou autres produits dérivés, les industriels sont presque unanimes. Bouée de secours à contre courant «Il n'y a pas de préférence nationale dans l'approvisionnement des poissons pélagiques aux industriels de la conserve et des produits dérivés». Les professionnels semblent effectivement naviguer à vue en attendant les retombées du plan Halieutis. Sur ce point, les divergences sont notables et les différents courants tirent leurs ficelles. Pour Hassan Oukacha, le président de la Fédération de la pêche maritime, il convient de donner le temps à ce nouveau plan de se déployer : «Nous avons un secteur qui naviguait à vue jusque-là et maintenant que nous avons plus de visibilité, il faut savoir s'armer de patience». En réalité, il est à noter, dans ce secteur en particulier, que le conflits d'intérêt contradictoire est quasiment devenu une évidence. Dans ce contexte, le plan Halieutis devra se déployer de manière judicieuse pour mettre à bas tous ces blocages internes. La dernière signature de la convention pour l'exploitation des petits pélagiques surgelés destinés exclusivement à l'approvisionnement des unités de conserves, concrétise certes les mesures décidées avec la profession, mais est-elle suffisante ?