Placée sur le thème «Projet de régionalisation avancée : des principes à la mise en œuvre», la rencontre a enregistré la participation d'un ensemble d'experts institutionnels et de militants associatifs. Au cours de celle-ci à l'Institut national d'aménagement et d'urbanisme (INAU), également partenaire de l'événement, les interventions et les débats se sont articulés autour de la feuille de route royale adressée à la Commission consultative sur la régionalisation. En effet, ont estimé les organisateurs, au vu de l'adhésion totale qui entoure le chantier, il est nécessaire, en attendant les conclusions de la commission, d'anticiper sur les enjeux déterminants de la réforme qui semblent jusque-là ne pas bénéficier d'une réflexion à la hauteur de leur portée. Pour la fondation Bouabid, il s'agissait donc d'anticiper sur les travaux de la Commission et de passer du stade de l'énoncé de principes à la concrétisation des interrogations pertinentes des catégories conceptuelles et opératoires qui composent «le répertoire classique de la régionalisation». C'est ainsi que la Fondation entend participer à ce qu'elle considère comme un travail de «défrichage préalable» et qui structure, au stade actuel du processus, les préoccupations auxquelles la CCR devrait apporter des éléments de réponse, selon les perspectives sous-jacentes à sa feuille de route. Il s'agit à ce niveau, de l'ordonnancement des priorités stratégiques du projet de réforme, mais également des leviers qu'il importe d'actionner en premier ordre pour baliser le terrain et construire un chantier efficient. La Fondation Bouabid part de l'hypothèse qu'au-delà des principes de base et des orientations stratégiques, qui ne font d'ailleurs pas l'objet de divergences fondamentales, l'approche du projet de régionalisation est déterminée en premier lieu par la réponse apportée simultanément aux aspects prioritaires du chantier. Refonte structurelle Le rôle de la mission dévolue à la CCR devrait, selon la Fondation Bouabid, déboucher sur une prise en charge des enjeux à la fois multiples, complexes, interdépendants et potentiellement conflictuels du «modèle maroco-marocain de régionalisation» qui ne saurait s'accommoder «d'un catalogue de vœux adossés à des mesures juridiques». En effet, les différents intervenants à la table-ronde ont de prime abord relevé le socle fort que constitue le référentiel du chantier. Mohamed Boukhaffa, professeur à l'INAU, a, en ce sens, souligné la réelle volonté de l'Etat de conduire une réforme structurelle de fond, mais également globale dans la mesure où elle sera portée à maturité au terme de tout un processus, ce qui ouvre largement des perspectives d'ajustement selon les évaluations qui seront menées au cours de la mise en œuvre du projet. Il s'agira également de parvenir à un découpage territorial efficient permettant la conjugaison d'objectifs de solidarité inter-régionale, d'équilibre de compétences, mais également de déconcentration. Des défis qui ne sauront être relevés qu'à travers la conciliation et la prise en charge effective des enjeux liés à l'équilibre territorial et à la question du développement régional. Les défis de la réforme Si les avis convergent à reconnaître, en raison de la détermination politique impulsée par le Souverain depuis l'acte fondateur de la réforme de novembre 2008, que la régionalisation sera une opportunité pour le renouvellement du modèle social ; c'est à ce niveau que se situent justement les défis du chantier. Certes, comme l'avait souligné Ali Bouabid, la démarche positive adoptée qui consiste à soumettre les enjeux de la réforme au débat à travers une commission consultative laisse une marge importante à la concertation, mais la régionalisation en raison des multiples pesanteurs du système politico-administratif marocain, sera un chantier inévitablement porteur de tensions. D'où la nécessité de «prioriser» les enjeux en vue de concilier les ambitions affichées de part et d'autre. La répartition et les modalités de transfert de compétences entre les différents acteurs qui s'articulent autour de la conciliation entre les principes de libre administration et de subsidiarité, le choix entre tutelle ou contractualisation en fonction de la capacité réelle des collectivités locales, la déconcentration sans chevauchement des prérogatives sont ainsi autant de défis à relever dans l'élaboration et la mise en œuvre de la réforme, en plus du choix efficient de gouvernance participative qui devrait promouvoir le développement territorial. À terme, l'objectif est d'atténuer l'inertie de l'action publique et de libérer, par conséquent, «le génie régional», seul gage de réussite de ce vaste chantier qui ne fait que commencer.