Le rapport de la CCR sur la régionalisation élargie dresse l'état actuel des lieux et établit huit principales propositions explicitant la nouvelle conception générale de la réforme du système régional... Après plus d'un an de travail, de réflexion et de concertation, la Commission consultative sur la régionalisation (CCR) a rendu sa copie. Jeudi 10 mars, Omar Azziman, président de cette Commission, a présenté à SM le Roi Mohammed VI l'intégralité des documents et actes relatifs à l'élaboration de la vision globale de la régionalisation avancée. C'est ainsi que le Souverain a donné le coup d'envoi de la phase suivante du processus de ce chantier structurant et fondateur qui a été entamé le 3 janvier 2010 par la mise en place de la CCR. Un moment fort et historique qui amorce une nouvelle étape dans le processus de démocratisation et de modernisation des structures de l'Etat. Le rapport de la CCR, assez consistant, dresse l'état actuel des lieux, offre une vision globale du projet de réforme du système régional et établit huit principales propositions explicitant la nouvelle conception générale de la régionalisation élargie à laquelle aspire le Maroc de demain. Ceci dit, la première proposition du rapport de la CCR met l'accent sur la mise en place d'une régionalisation d'essence démocratique. Il est question, dans ce sens, de renforcer la représentativité et la légitimité démocratiques des conseils régionaux, à promouvoir l'équité genre en matière d'accès des femmes aux fonctions électives et de gestion en région et à organiser la participation des citoyens, de la société civile et du secteur privé au débat public sur les affaires régionales et à la bonne conduite de ces affaires. La CCR a recommandé en deuxième lieu d'accorder aux conseils régionaux élus des compétences étendues et mieux articulées. Il a été proposé, sous cet axe, une approche ouverte, évolutive et mieux articulée des compétences régionales en matière de développement intégré. Dans ce cadre, un rôle prééminent est reconnu au conseil régional envers les autres conseils élus, dans le respect des compétences de ces derniers, en matière d'élaboration et de suivi des programmes de développement régional, en cohérence avec les orientations de l'Etat et après consultation des différents acteurs publics et privés dans l'espace régional. Le projet de réforme du système régional met l'accent en troisième lieu sur la mise en place d'une régionalisation vouée au développement intégré. Il propose, dans ce sens, d'adopter un plan de mise à niveau social des régions. A cet effet, poursuit le rapport, un fonds de mise à niveau social et un fonds de solidarité régionale seront mis en place. La CCR indique, en outre, que l'Etat devra opérer des transferts plus conséquents de ressources financières pour permettre aux régions de s'acquitter de leurs nouvelles missions en matière d'animation et de développement économique, social, culturel et environnemental. Par ailleurs, et pour obtenir une gouvernance performante de la région, quatrième suggestion, le rapport prévoit la mise à la disposition du conseil régional d'une agence placée sous son contrôle et destinée à l'appuyer sur le plan technique et à mettre en œuvre ses projets d'investissement. Il s'agit de l'Agence régionale d'exécution des projets (AREP) qui devra être créée par voie législative. De même, il est prévu, par le rapport de la CCR, une mise à niveau des administrations des autres collectivités locales en plus des propositions visant à améliorer progressivement et avec l'appui de l'Etat les modes de gestion, les systèmes d'information, l'évaluation et la reddition des comptes. Pour ce qui est de la cinquième recommendation, il est proposé de moduler la nécessaire régulation étatique des activités des conseils régionaux et des autres conseils des collectivités locales, par rapport à la notion traditionnelle de «tutelle», en limitant les contrôles a priori et d'opportunité. En revanche, le rapport recommande de renforcer les contrôles et les évaluations a posteriori et à maintenir les contrôles juridictionnels de légalité. Le sixième point concerne le chantier de la déconcentration. Selon le rapport de réforme du système régional, la déconcentration est à envisager, non pas séparément, mais en lien avec l'évaluation, la mise en cohérence et l'optimisation de l'ensemble des modes et des organes d'intervention de l'Etat : services de l'Administration, établissements décentralisés et agences à vocation sectorielle et/ou territoriale spécialisée, sociétés d'Etat, partenariats public-privé, externalisations des services publics. Dans ce sens, selon le rapport, la mise en place de la régionalisation avancée devra être accompagnée par une vision et une politique d'ensemble à cet égard, notamment à travers la mise en place d'un mécanisme de suivi et d'évaluation périodique du processus de déconcentration. Dans le cadre de la septième recommandation relative aux mesures constitutionnelles et d'accompagnement, le rapport a proposé la mise en place de la régionalisation élargie par une loi ordinaire dans le cadre institutionnel actuel. La CCR a souligné que le fait avéré dans plusieurs Etats ayant adopté la régionalisation fonctionnelle, est que la loi peut assumer dans ce domaine, par rapport à la Constitution, au moins à titre provisoire, une fonction de substitution. A noter que le Souverain a annoncé, dans son discours à la Nation du mercredi 9 mars, «la consécration constitutionnelle de la régionalisation avancée, afin qu'elle soit l'émanation de la volonté populaire». Concernant la dernière proposition se rapportant au nouveau découpage régional, le rapport réduit d'au moins 25% le nombre de régions (voir page 6). Le projet propose ainsi la mise en place de 12 régions. Les nouvelles régions ont la particularité, selon le rapport, d'abriter une masse de population plus forte, couvrir des territoires plus étendus et regrouper des circonscriptions administratives plus nombreuses. Perspectives de mise en œuvre de la régionalisation avancée La CCR a défini dans son rapport sur la régionalisation avancée les perspectives de mise en œuvre du projet. Selon la commission, la conception générale de la régionalisation avancée, comme Sa Majesté le Roi l'a indiqué dans son discours du 20 août 2010, fera l'objet d'un débat national de sensibilisation pour assurer au projet l'adhésion et l'appropriation les plus larges possibles. La mise en œuvre du projet sera marquée par la progressivité et la gradualité et assurée sur la base d'une feuille de route qui lui sera pertinemment tracée et conduite par un pilotage de haut niveau. Selon la CCD, le processus de mise en œuvre sera accompagné d'une évaluation continue qui soit à même de lui imprimer le rythme optimal, tout en apportant au projet les ajustements appropriés à tout moment, au vu de l'expérience pratique. Cette progressivité s'appliquera notamment sur le plan institutionnel. Certaines propositions du projet impliquent des révisions constitutionnelles. Sur le plan des compétences des nouvelles régions et, en particulier, de leurs conseils élus, la régionalisation avancée prévoit aussi le transfert graduel, négocié et contractualisé entre le gouvernement et les conseils régionaux, de compétences de plus en plus étendues et des ressources y afférentes. Le rapport de la CCR souligne que, de façon générale, la régionalisation avancée fait partie intégrante de la démocratisation du pays, aux niveaux national, régional et local. Plusieurs facteurs concourront à en déterminer la crédibilité, le succès et, partant, l'approfondissement continu : une participation de plus en plus large des populations à la vie et aux consultations démocratiques ,des dispositifs et des processus électoraux de plus en plus marqués par la compétition loyale, l'honnêteté et la transparence, l'émergence d'élites régionales et locales hautement qualifiées, dévouées à l'intérêt public.