ça vous intrigue, ce titre tordu, hein ? C'était bien le but escompté. Si ça vous a donné l'envie d'en savoir plus, c'est que j'ai déjà gagné mon pari et je compte sur vous pour aller jusqu'au bout. En vérité, ce n'est pas un jeu du tout. Bien au contraire, je voudrais être sérieux. Ça m'arrive si peu... Comme vous n'êtes pas sans savoir, puisque je sais que vous le savez, je suis depuis 2 ou 3 jours, festivalier. Ce n'est pas un métier, je le sais, même si j'en connais dont c'est la seule activité, mais ne comptez pas sur moi pour tout vous raconter. Bon, maintenant, pour ceux qui, malgré tous mes efforts quotidiens pour les informer des faits et gestes de tous ceux qui bougent ou ne bougent pas, ne savent pas encore où je suis à l'heure qu'il est, je vais éclairer leur lanterne en leur apprenant que je suis à Salé, la ville des corsaires et aussi, dit-on, des tête-en-l'air, pour assister à la 4e édition du Festival international du film de femmes, FIFF pour les intimes. Ceci étant précisé, je vais commencer, sinon je risque d'être encore là ce soir alors que j'ai tellement de films à me faire projeter. Je ne vais pas vous parler de cinéma, mais plutôt d'une grande découverte que j'ai faite à la soirée d'ouverture : les sourds-muets peuvent faire de la musique. C'est vrai que j'en avais déjà entendu parler (pas mal, comme jeu de mots, hein?), mais c'était vraiment la première fois que je voyais ça de mes propres yeux éberlués. Franchement, je n'en ai pas cru mes oreilles. Nous avions en face de nous, sur la scène, des gens «normaux», je veux dire comme vous et moi, à la différence que, eux, étaient jeunes, beaux et surtout très talentueux. Ils avaient des instruments de percussion comme on en voit tellement par ailleurs, mais qu'ils serrent fort entre les genoux, bien plus que tous ceux qu'on a déjà vus, et c'est là où résiderait leur secret. Ne pouvant pas, bien entendu, entendre le son de ce qu'ils jouent, ils le ressentent parfaitement, nous a-t-on rapporté, à travers les vibrations qui traversent leurs corps, et le résultat est tout simplement impressionnant. C'est beau, c'est bon, c'est chaud, c'est réglé comme un chrono, et c'est super synchro. Phénoménal ! Vous allez me dire, comme quelqu'un me l'a dit l'autre soir, qu'il y a eu un sourd célèbre qui a été et est toujours un des plus grands musiciens de l'histoire de l‘humanité : Ludwig Van Beethoven. Oui, mais lui, il est devenu sourd bien avant de réaliser tous ses extraordinaires chef-d'œuvres. En tout cas, restons dans notre pays, et comparons ce qui est comparable. D'ailleurs, à propos de comparaison, il y a chez nous des gens, qui se reconnaîtront, qui devraient tirer des leçons des prouesses artistiques de ces jeunes sourds-muets surdoués. Et au lieu de continuer de nous casser chaque jour les oreilles avec leur baratin habituel, ils feraient mieux de la fermer un peu, ou, mieux, de passer la main à d'autres mieux qu'eux, sinon, je les préviens, moi, je ne vais fermer ni les yeux ni la gueule. Et j'espère que ce n'est pas tombé dans l'oreille d'un sourd. À bon entendeur, Salé !