J'adore ces articles qu'on voit souvent dans une certaine presse toujours pressée de te poser des questions qui devraient normalement être «in-posables». Je les aime beaucoup parce qu'ils sont souvent insidieux, sournois, cyniques, et parfois même, franchement sadiques. D'ailleurs, le titre annonce généralement la couleur. Voici quelques exemples : «Les anciennes gloires du sport : que sont-elles devenues ?», «Hier, stars... Et aujourd'hui ?», «Ils étaient célèbres, riches et respectés : où sont-ils maintenant ? »... Sadiques, vous dis-je ! Bien sûr, nous les voyeurs et les voyeuses, dès que nous voyons ce type de titre si accrocheur avec des questions si aguicheuses, nous nous jetons dessus comme des vampires. Pire : nous ne dévorons pas tout et tout de suite. Nous mettons un malin plaisir à le montrer à nos proches, et à déguster ça, mot par mot, ligne par ligne, jusqu'à la fin. Et là, rassasiés, nous nous pourléchons les babines et nous filons à vitesse grand V, raconter tout ça partout pour en faire profiter tout le monde. Je ne m'y connais pas beaucoup en psycho-socio, mais je crois que nous les hommes et, bien entendu, nos chères consœurs les femmes, aimons bien apprendre, en tout cas quand il s'agit des autres, que dans la vie, rien ne dure, et que plus l'ascension est douce et plus la chute est dure. Sauf pour ceux et celles qui ont préparé leur coup bien à l'avance. On appelle ça chez nous – je vais traduire comme je peux : «Faire sur quoi retourner». J'adore cette expression. Je la trouve à la fois expressive et imagée. Ça m'a fait rappeler un grand copain et néanmoins grand journaliste – 1 m 90, précisait-il – qui était, de son vivant, que Dieu ait son âme, un bon vivant. Et comme tout bon vivant qui se respecte, il était porté sur tous les plaisirs de la vie : la bonne chère, les bons mots d'esprit et les bons spiritueux. Un jour, un ami, croyant bien faire, s'était hasardé, entre deux verres, à lui sortir : «Ali, tu devrais quand même faire sur quoi retourner». Et Ali de lui rétorquer du tac au tac : «Mais qui t'a dit que je veux retourner ? Moi, j'ai pris un aller simple». Génial ! «Ali, la classe», si tu nous regardes de là-haut, sache qu'on aimerait bien que tu retournes nous voir de temps en temps. Je ferme cette parenthèse nostalgique que, je crois, je n'ai même pas ouverte, et je reviens à leurs questions sadiques... La dernière en date, date de ce week-end. Ce n'est pas la première fois qu'on nous la pose, ce qui prouve leur côté sadique chronique : «Y a-t-il une vie après le ministère ?». En gros titre, à la Une et avec photos à l'appui ! Qu'est-ce qu'ils sont vaches ! Franchement, pourquoi les anciens ministres ? Laissons-les tranquilles, les pauvres... Moi, on dit parfois que je suis méchant dans mes écrits, mais, quand je vois ça, je me dis que je devrais me recycler dans le courrier des lecteurs. D'ailleurs, je vois d'ici un prochain titre : «Où est-il, le méchant chroniqueur ?...».