La journée technique organisée il y a quelques semaines à l'Ecole supérieure des affaires d'Alger par Algex (Agence de promotion de l'exportation) et Optimexport (Programme de renforcement des capacités exportatrices des PME algériennes), aura permis de donner le ton des enjeux du marché «halal» et de sa capacité à constituer une niche d'exportation intéressante pour les producteurs algériens. L'industrie agroalimentaire en Algérie connaît une importante croissance : 17 mille entreprises, 120 mille emplois et pas moins de 50% du PIB industriel du pays, sur un marché estimé à 5,4 milliards de dollars. Une importante capacité de production et des perspectives de développement qui se conjuguent avec ses potentialités d'exportation. Une exportation notamment vers l'Europe, un marché très important, demeuré, à de rares exceptions près, fermé aux industriels algériens. Il est donc normal que les principaux acteurs dans ce domaine soient présents à cette journée technique et que les entreprises les plus en vue dans ce secteur participent au Salon de Paris. Les consommateurs musulmans sont estimés à 20 millions en Europe Sur le plan économique, l'enjeu du marché halal est particulièrement intéressant. Les consommateurs musulmans sont estimés à plus de 20 millions en Europe, partagés entre 7 millions en France, 2,5 millions en Allemagne, 1,6 million en Grande-Bretagne et 1 million en Espagne. La déclinaison des produits et des services est aussi étendue que pour le secteur agro-industriel classique. Cela va de l'épicerie de quartier à la distribution automatique de sandwiches, et concerne autant les produits transformés, les plats cuisinés, toutes les formes de restauration, et s'étend également aux cosmétiques. C'est un marché estimé à 500 milliards d'euros dans le monde, à près de 4 milliards d'euros en France, et qui est appelé à croître. Certification indispensable Le salon de Paris, précise l'organisateur de la manifestation, Antoine Bonnel, directeur du Salon Foods and Goods, est «le seul Salon halal en Europe. C'est une opportunité, autant pour les théologiens que pour les acteurs musulmans en Europe, pour débattre des questions importantes, comme celle de la certification». Certification : le mot est dit, et c'est celui qui aura suscité le plus de débats lors de cette journée. L'épineuse question du label renvoie à la question : qui peut dire qu'un produit est halal (licite) et comment le prouver ? Pour Antoine Bonnel, «au Maroc, en Tunisie, ou en Algérie, on décrète que les produits sont halal du fait que la majorité des habitants de ces pays est musulmane ainsi que les différents acteurs de ce marché. En Malaisie, l'Etat a institué une entité de certification unique pour une population majoritairement musulmane. Je ne sais pas quelle est l'approche la plus évidente». Il reste que cette labellisation est indispensable en Europe. «On ne peut statuer sur les consommateurs maghrébins comme on le ferait pour les consommateurs en France. Pour ces derniers, nous avons besoin de statuer et de donner un label à caractère religieux», explique encore Bonnel. Pour Wael Hasnaoui, consultant auprès d'Optimexport, organisateur de cette journée technique, «le problème réside en ce qu'il n'y a pas une seule lecture de la halalité d'un produit à tous les niveaux. Il y a un débat sur la halalité, y compris en Europe». De nombreux pays européens sont confrontés au même problème. Antoine Bonnel indique qu'il serait peut-être utile qu'il «soit tranché au niveau de la Commission européenne». Cela est d'autant plus vrai, renchérit Wael Hasnaoui, que cette question «est trop sensible parce que cela touche à la consommation. Quelqu'un veut consommer halal pour être en conformité avec sa religion. Si, derrière, il y a des gens qui s'amusent à jouer avec les normes, cela ne sera pas toléré par le consommateur». Il reste que le Salon de Paris, et son organisateur ne le cache pas, en plus de promouvoir des produits, est une occasion supplémentaire pour débattre de cette question entre opérateurs économiques maghrébins, personnalités religieuses et représentants de consommateurs.