La question des mineurs marocains non accompagnés en Espagne revient au devant de la scène. Des communautés souffrant de ce problème ont fait part de leurs doléances au gouvernement central afin de trouver une solution. Le gouvernement espagnol a annoncé, récemment, la régularisation de la situation de plus de 3.000 mineurs immigrants qui se trouvent sur son sol. Mais leur nombre se multiplie, au fur et à mesure, rendant tout contrôle de ce problème une mission impossible. Dans ce cadre, le gouvernement de Sebta a annoncé récemment sa volonté de réviser les programmes de protection des mineurs en provenance du Maroc, vu que les moyens financiers ne suivent plus. À ce propos, le gouvernement de l'enclave prévoit le gel de certains projets déjà lancés à cause de la réduction du budget dédié à ce fléau. Cette année, 1,5 million d'euros seront alloués par le gouvernement de Madrid à ce volet alors que la somme était de 3 millions d'euros auparavant. La crise a amené le gouvernement central à entreprendre des économies dans tous les secteurs. Le directeur général des mineurs à Sebta s'est réuni avec les journalistes pour leur faire part de l'intention de son administration de paralyser certains travaux de réforme dans certains établissements d'accueil, à cause de l'absence de moyens financiers. La prise en charge de 135 mineurs hébergés à Sebta coûte 6 millions d'euros, annuellement, au gouvernement. Le responsable a fait savoir que les aides octroyées par Madrid couvrent à peine 30% des besoins des mineurs qui débarquent clandestinement du nord du Maroc. D'une autre part, le député du Parti populaire de Melilla, Antonio Gutierrez, a demandé au gouvernement central une politique plus ferme en matière d'immigration des mineurs marocains. Selon ce responsable, le Maroc refuse de rapatrier quelques 500 mineurs accueillis en Espagne, a-t-il déclaré devant le congrès des Députés. L'élu espagnol a indiqué que le Maroc fait fi d'un document intitulé «le mémorandum d'entente sur le rapatriement assisté des mineurs non accompagnés», où le Royaume s'engage à faire revenir ses enfants au bercail. Mais le Maroc avance que ce document n'est pas encore négocié dans sa totalité. Le député a signalé que plusieurs actions parlementaires ont été entreprises afin que le gouvernement central mette en place une politique globale au sujet des enfants non accompagnés. Selon ce député, Melilla n'est pas la seule ville qui souffre de ces problèmes qui affectent plusieurs communautés espagnoles. Le député populaire estime que le Maroc viole le traité d'amitié qui le lie avec l'Espagne en refusant de rapatrier ses mineurs. Outre, Melilla et les Iles Canaries où séjournent 300 mineurs, l'Andalousie a publié récemment un rapport sur les enfants mineurs non accompagnés. Au total, on décompte 835 mineurs sous la tutelle de la communauté andalouse, répartis entre les 267 centres de protection que compte cette région. La communauté est la 2e après les Iles Canaries à prendre sous sa tutelle les mineurs immigrés délaissés. Selon le journal andalou Europa Press, ces enfants sont en phase finale de rapatriement et n'attendent que le feu vert du gouvernement marocain. Une autorisation qui tarde à venir, écrit le journal. Le président de la communauté andalouse a exprimé, lors de son voyage effectué juste après son investiture en septembre 2009, l'engagement du gouvernement andalou à construire, conjointement avec le gouvernement marocain, des centres d'intégration pour reloger ces enfants. L'objectif est de mettre en place une solution durable à ce problème tout en prenant en considération les intérêts de ces enfants, coupés de leur famille à un âge très critique. L'attente continue ! Selon José Antonio Griñán, le président du gouvernement andalou, le plan de développement transfrontalier 2009-2012 prévoit la construction de 12 centres avec un coût de 2,5 millions d'euros. Ce projet est financé par l'Agence andalouse de coopération international et développement (Aacid). Le gouvernement andalou estime que cette situation de statu quo ne peut durer car trois ans après la signature de l'accord entre l'Espagne et le Maroc, conclu lors de la réunion de la commission mixte Hispano-marocaine à Toledo en 2007, les choses n'avancent toujours pas. L'accord prévoyait un rapatriement des mineurs auprès de leurs familles ou dans des centres d'accueil au Maroc. Mais, il faut dire que cette convention ne se limite pas seulement au dossier des mineurs mais comprend également d'autres volets relatifs à la santé entre les deux pays, à la sécurité ou aux aides aux travailleurs immigrés, entre autres. Déjà lors de cette réunion de haut niveau, il était question de construire deux centres au Maroc, avec un soutien financier espagnol. Le premier sera érigé à Nador et le second à Béni Mellal. Or, jusqu'à aujourd'hui, aucune avancée n'a été réalisée dans ce sens. Selon un directeur d'un centre de protection de mineurs, les enfants qui débarquent en Espagne attestent de la complicité des agents da la police marocaine au moment de la traversée. Ces derniers ferment l'œil ou fournissent même des renseignements aux enfants désireux de se lancer dans ce périple hasardeux. Ce qui préoccupe le plus, c'est l'âge de plus en plus jeune des enfants qui se livrent à cette aventure. Certes, ils bénéficient d'une attention de la part des autorités une fois sur le sol espagnol, mais leur vie change à jamais. En attendant que les deux parties tombent d'accord sur les modalités de rapatriement, les mineurs continuent d'affluer en masse. La semaine dernière, 15 mineurs ont débarqué illégalement à Melilla en l'espace d'une semaine, c'est la plus importante entrée durant les derniers mois, a assuré la responsable du bien-être social du gouvernement local de Melilla. Six des 15 enfants interceptés ont décidé, de leur plein gré, de rebrousser chemin. Les autres seront pris en charge dans le centre dont dispose la ville. Leur âge varie entre 14 et 17ans. Les enfants damnés Jusqu'à quand le voisin ibérique peut-il continuer à élever nos enfants ? Jusqu'à quand le Royaume peut-il tourner le dos à ses enfants ? Qu'on veuille l'admettre ou pas, les mineurs clandestins en Espagne sont une véritable honte pour le gouvernement du Maroc. Dans une série de reportages dédiés à cette frange de la population, l'on apprend que la grande majorité tombe dans les filets de la drogue pour se jeter après dans les bras des groupes mafieux afin de garantir leur dose quotidienne. Selon une étude, sur le processus migratoire des mineurs non accompagnés, élaboré, par l'association des travailleurs et immigrants marocains en Espagne (Atime), le monde de la drogue est la destination finale de plusieurs de ces enfants. En revanche, les enfants qui disposent d'une présence adulte, succombent moins à la tentation des stupéfiants. Les adolescents qui vivent en Espagne, seuls et sans aucune compagnie, consomment des tranquillisants, du cannabis de la cocaïne et de l'extasie. Selon les auteurs de cette étude, la solitude et la perte de toute autorité parentale ou adulte poussent ces jeunes à se réfugier dans la consommation de substances illicites. La plupart d'entre eux débarquent avec un passé de consommateur à leur actif, acquis dans le pays d'origine sinon durant le voyage migratoire. Si le fait de pousser les enfants vers le détroit de Gibraltar est une solution facile pour certaines familles vivant dans le besoin, sous prétexte que leurs rejetons vont bénéficier d'une situation plus confortable une fois adulte, qu'ils se détrompent. Rares sont ceux qui réussissent à se garantir un avenir prometteur. Mais, comme nous le résume cet éducateur d'un centre d'accueil à Algésiras, le plus intelligent de ces jeunes devient un narcotrafiquant ou un passeur, le reste erre dans les rues ou trouve la mort dans une futile bagarre de bandits. Aujourd'hui, ce sont leurs ainés qui font l'actualité comme protagonistes des faits divers les plus violents et insolents en Espagne! Triste sort.