La 26e édition du Festival Oslo World s'est ouvert sur un spectacle de toute beauté pensé par l'actrice «almodovarienne», également chanteuse et danseuse. «Utopian Lullabies», qui a rassemblé les voix de Mon Laferte, Hindi Zahra, Natacha Atlas, Silvia Pérez Cruz, Ane Brun, Ayo ou encore Liniker, sublimées par le piano passionné de Sverre Indris Joner, a su bercer le monde le temps d'un spectacle dans toutes les langues et sans frontière aucune. Ce 29 octobre, le temps s'est arrêté à Oslo. Retour sur un moment magique avec Rossy de Palma. Comment est né ce beau projet? Pour moi, réunir autant de femmes incroyables autour d'un même projet grâce au festival et à Alexandra Archetti Stølen (directrice du festival), était une utopie en soi. On voulait faire quelque chose d'original. C'est parti de Concha Buika, grande amie à moi. Je voulais faire quelque chose autour d'elle et rassembler plusieurs artistes. Cela ne s'est pas fait car elle avait des engagements. Mais j'ai quand même décidé de continuer sans elle. C'était un peu égoïste aussi, parce que j'avais envie de vivre des moments avec elles! Ces femmes, ces artistes sont à la fois mes amies et des artistes que j'admire. Je voulais voler ces petits moments utopiques. On a besoin de compassion, de douceur, de protection, de toutes ces choses qui font la féminité. Et pas que. Les hommes peuvent être tout ça aussi. Je ne veux pas exclure les hommes. On a besoin les uns des autres pour construire le monde. Pourquoi «Berceuses utopiques»? La terre est un peu orpheline, elle vit des choses pas très heureuses tous les jours, elle a besoin d'être rassurée comme un bébé, par une berceuse, par des berceuses. Toutes ces politiques font office de parents, en train de se disputer tout le temps, et nous, humains, nous sommes tels des enfants qui en font les frais. Nous sommes abandonnés à notre sort. Et souvent, les humains oublient que nous sommes une seule et même famille. Le gens qui ne se sentent pas concernés par l'écosystème me font rire. C'est notre problème à tous, nous sommes en train de détruire notre maison. Moi, je suis de Majorque mais mes parents sont originaires du Nord de l'Espagne, ce sont des Celtiques. Je me sens chez moi partout. Quand je suis au Maroc, je suis chez moi! Quand je suis à Oslo, je suis Viking! Les seules frontières qui existent sont gastronomiques! Ce sont des frontières joyeuses au moins! (Rires). Il y a tellement d'absurdités dans ce monde, nous allons le payer cher. Nous ne nous inscrivons plus dans une humanité. Ce spectacle est une leçon d'humanité en différentes langues, dans différents univers. Comment avez-vous pensé ce spectacle? On a travaillé vite parce que, vu les engagements de chacune, nous n'avions pas de temps devant nous. J'ai la chance d'avoir une bonne relation avec ces artistes et je pense qu'avec moi, on se détend vite, il n'y a pas d'ego ou de malaise. On s'amuse. L'idée était de mettre chacune en valeur à travers un solo, que les langues, les pays, les cultures se suivent. Que tout le monde se retrouve. J'ai adoré voir les musiciennes sur scène côte à côte, se serrer dans les bras, pleurer, rire. C'était mon plus beau cadeau. Il y avait un réconfort. La musique est thérapeutique. Il y avait un abandon à la beauté de la rencontre. Qu'est-ce que l'utopie, pour vous? C'est quelque chose de difficile à avoir, certes, mais de petites utopies sont possibles. Changer de petites choses dans sa vie, dans son quotidien, c'est possible. Après, la plus grande utopie pour moi, dans le monde dans lequel nous vivons, consiste à rester bienveillants. Ce n'est pas évident. Aujourd'hui, il y a des méchants partout, sans super-héros. On doit trouver en nous un petit super-héros. Je dis toujours à mes enfants «Si quelqu'un vous parle mal ou est méchant avec vous, rappelez-vous qu'il a dû lui arriver des choses pour se comporter comme ça!» Il ne faut pas être perméable au malheur des autres. Il faut donner un peu de légèreté au regard humain. L'idéal est de rester connecté à l'enfant qui est en nous. Vous avez commencé votre carrière en tant que chanteuse dans un groupe de pop, «Peor Impossible», avant que Pedro Almodovar vous repère. Vous verra-t-on beaucoup sur scène? J'aimerais bien! J'ai beaucoup de projets musicaux. L'idéal pour moi serait de combiner le jeu, la musique et la danse. J'ai fais de la danse, petite, j'ai commencé avec la musique, je suis actrice de métier. Pour moi, réunir les trois est ma priorité du moment avec plusieurs projets. J'ai créé un spectacle intitulé «Résilience d'amour», mêlant poésie visuelle et performances. C'est très féminin, aussi. Il montre comment l'amour nous offre cette résilience.