Le jugement prononcé par le tribunal de Fès à l'encontre du président de la région de l'Oriental et du maire d'Oujda a fait l'effet d'une bombe. Le Maroc n'étant pas habitué à ce genre de verdicts, les poursuites judiciaires précitées n'ont même pas été suivies par les médias, croyant que l'issue de l'affaire était connue d'avance. Maintenant que le juge a rendu son verdict public, l'on peut nommer les concernés, à savoir le puissant homme d'affaire affilié au PAM, Abdenbi Bioui, et l'influent politicien du Parti de l'Istiqlal, Omar Hjira. Poursuivis pour détournements de fonds par la Cour des crimes financiers, ils ont les deux été condamnés à de la prison ferme. Ils ont droit au recours en appel, l'affaire n'est donc pas close. Par ailleurs, ce jugement doit être perçu comme un message clair à destination de deux communautés, celles des affaires et de la politique. Et c'est aussi l'un des signaux les plus important quant à l'application du principe de reddition des comptes. Un exercice dans lequel le Maroc est toujours novice, mais celui-ci gagnerait à le faire étape par étape. Mais au delà du prononcé de jugement, c'est la portée du message qui est à disséquer. Car d'aucuns -des deux bords, le business et la politique- ont tendance à oublier les prérequis d'un Etat de droit. Je ne citerai point d'exemple car ce n'est pas l'objectif, mais je ne peux dissimuler mon enthousiasme quant à l'audace du juge. Oui, il faut de l'audace même dans l'application de la loi. Ce jugement, aux allures de séisme politico-économique, va secouer le microcosme économique et surtout les sphères politiques. Il est temps de conférer aux deniers publics un caractère sacré, comme en Chine où la peine peut aller jusqu'à la condamnation à mort. Car il en va du sort de dizaines de millions de Marocains qui voient la richesse du pays dilapidée par certains alors que la pauvreté les entoure, et la misère les guette.