Secteur en berne, montée de la concurrence dans les régions du Sud... Ciments du Maroc devrait connaître une belle année, malgré le contexte dans lequel elle évolue. Une grande partie des analystes de la place semblent optimistes et recommandent le titre à «conserver». Le secteur du ciment est à la peine. Après une phase d'euphorie qui s'est étalée sur toute la période 2000-2008, le secteur cimentier s'inscrit depuis l'année 2009 sur une trajectoire baissière, sur fond d'atonie de l'activité bâtiment qui absorbe à elle seule près de 80% des ventes de ciments. Selon les derniers chiffres de l'Association professionnelle des cimentiers (APC), les ventes de ciments se sont encore réduites de 4,78% au bout des cinq premiers mois de l'année. Les volumes écoulés se sont limités à 5,76 millions tonnes contre 6,04 millions à la période de l'année dernière. D'après les analystes de CDG Capital, la spécificité du secteur du ciment réside dans son pouvoir de détermination des prix. Ce pouvoir revient d'une part à sa situation oligopolistique (deux opérateurs contrôlent 78,5% des ventes du marché ciment) et d'autre part au coût élevé du transport. Cela explique que même en cas de recul important des volumes, les cimentiers seront en mesure de maintenir leur prix, voire de les augmenter dans un marché concentré. En 2018, tous les producteurs de ciment devraient être confrontés à une hausse des coûts des matières premières, et ce en raison du fort renchérissement du petcoke et du fret. «Nous prévoyons donc une hausse de prix de 2,9%. Il s'agit d'une hypothèse prudente dans la mesure où en 2013-2014, les groupes cimentiers ont pratiqué des hausses de prix allant bien au-delà de 3%, alors que les volumes baissaient de 6,3% en 2013 et de 5,4% en 2014», expliquent les analystes. Ils soulignent que cette démarche aurait déjà été entamée puisque, selon leur dernier recensement sur le marché, les prix ont augmenté de 3% entre décembre 2017 et mars 2018. De leur côté, les analystes de CFG Capital tiennent un discours plutôt optimiste. Une reprise «modérée» devrait être constatée cette année. «Nous tablons sur une légère reprise de la croissance avec une hausse estimée à 1% en 2018, suivie de 2,5% en 2019 et de 3% en 2020. Malgré la reprise anticipée durant les prochaines années, il convient de souligner que la croissance du secteur devrait revêtir un caractère modéré et rester inférieure aux niveaux observés sur la dernière décennie (TCAM 2004-2011 de 7,4%)». Les experts de CFG Capital sont convaincus du fait que la consommation de ciment a connu au cours de la dernière décennie un important effet de rattrapage, et que, de facto, la croissance à long terme du secteur devrait rester limitée. Les différents scenarii prévisionnels considérés les poussent à estimer la croissance à long terme du secteur dans une fourchette comprise entre 1,4% et 3,1%. Au final, le scénario retenu est celui d'une croissance à long terme de 2,2% par an. Qu'en est-il donc des opérateurs tels que Ciments du Maroc? Pour les analystes de la place, le cimentier devrait tirer son épingle du jeu durant les prochains exercices, et ce malgré une montée de la concurrence dans les régions du Sud. Ciments du Maroc verra sa part de marché relativement réduite en 2018, conséquence de l'entrée en service du broyeur, mais devrait dès 2019 capter des parts de marché additionnelles grâce à son positionnement géographique au sein des régions du Sud, pour revenir progressivement à son niveau de 2016. Le discours optimiste règne également au sein des équipes d'Upline. Pour 2018, Ciments du Maroc devrait tirer profit des efforts de l'Etat en matière de chantiers d'infrastructures pour un coût global de 2 MMDH. D'autres projets ont été récemment annoncés comme le nouveau programme d'urgence pour la construction, dans différentes régions du royaume, de barrages de différentes capacités (grande, moyenne et petite), ainsi que des barrages collinaires et l'éventuelle mise en place de stations de dessalement. Le cimentier devrait également, selon Upline, capitaliser sur son appartenance au Groupe allemand HeidelbergCement pour doper son volume d'export de clinker en Afrique. Au final, le titre, qui s'échange à 1.780 DH (en hausse de plus de 5,33% depuis le début d'année), est à conserver dans les portefeuilles selon une grande partie des analystes. Il est à noter que le niveau de valorisation actuel du titre en Bourse a incorporé la totalité du potentiel de croissance de la société, reflété notamment par un PE 2017 relativement élevé à 22,6x. Fatma Charfi Analyste chez AlphaMena En dépit d'un marché marocain en repli et une consommation de ciment en régression, Ciments du Maroc (Alléger, Maroc) ressort des chiffres 2017 positifs. Le cimentier a clairement tiré profit du marché export pour compenser la baisse des ventes locales en faisant valoir son pricing power. Toutefois, le résultat net ajusté 2017 ressort en baisse selon nos calculs, tenant compte de la non-récurrence de la dotation de provision d'impairement de la participation dans Suez Cement à hauteur de 1,253 MMDH comptabilisée en 2016. La société s'est montrée généreuse avec ses actionnaires, en distribuant un dividende de 100 DH (dont 25 DH exceptionnels) contre 65 DH une année auparavant. Nous apprécions les résultats de CIMAR, notamment la croissance des revenus dans un marché baissier, quoique la reprise des volumes de vente soit primordiale pour la soutenabilité des marges d'EBITDA à un niveau au-dessus de 44%. Dans un contexte de hausse des prix du pétrole, la maîtrise des coûts d'énergie redevient le principal focus pour les cimentiers. Nous anticipons une baisse de la demande locale de 2% en 2018 et une reprise décalée à 2019.