Lors de notre consultation hebdomadaire en ligne, 61% des 613 internautes ayant répondu ont jugé que l'évolution de l'Indice des prix des actifs immobiliers (IPAI) en 2018 T1 est plutôt rassurante. À l'inverse, 39% des internautes pensent que l'évolution de cet indice est inquiétante. En préambule, rappelons que les IPAI sont élaborés conjointement par Bank Al-Maghrib et l'Agence nationale de la conservation foncière, du cadastre et de la cartographie (ANCFCC) à partir des données de l'ANCFCC à une fréquence trimestrielle et sur une base 100 en 2006. Aussi, ils sont calculés selon la méthode des ventes répétées qui ne prend en considération que les biens ayant fait l'objet d'au moins deux transactions au cours de la période concernée. Ainsi, ceux qui sont plutôt rassurés pensent probablement à la quasi-stagnation des prix des actifs immobiliers (-0,1%) en glissement trimestriel, avec des hausses de 0,2% pour les biens résidentiels et de 0,1% pour ceux à usage professionnel, ainsi qu'une baisse de 1,1% des prix du foncier. De même, au niveau de l'évolution trimestrielle par ville (2018 T1 v/s 2017 T4), des éclaircies ont été observées à Fès (+0,4%), Casablanca (+1,2%), Rabat (+1,4%), Tanger (+1,6%) et Agadir (+2%). Ainsi, au niveau des grandes villes, seule Marrakech semble rechuter avec une baisse trimestrielle des prix de 6,6%. Un autre argument de satisfaction concerne l'évolution des volumes sur un horizon annuel. En effet, au niveau des transactions, le rythme a progressé de 1,5% entre 2018 T1 et 2017 T1, même si les ventes des biens résidentiels ont reculé de 3%. En particulier, le trimestre a enregistré une hausse annuelle des ventes de terrains de 16,1% contre 6,2% pour les biens à usage professionnel. Au niveau du résidentiel, les villas ont aussi souffert avec une baisse des transactions de 13,6% contre un recul de 3,1% pour les appartements et une hausse de 3,6% pour les maisons. Quant à ceux qui s'alarment suite à l'évolution de l'indice des prix immobiliers, leur avis se base d'abord sur la décélération perceptible des prix. En effet, les prix au premier trimestre 2018 ont reculé, sur un an glissant, de 0,4% contre une hausse de 0,9% en 2017 T4, de 4,7% en 2017 T3, de 6,2% en 2017 T2 et de 7,6% en 2017 T1. Ainsi, pour 2018 T1, le recul annuel de 0,4% traduit une baisse de 0,7% pour le résidentiel, de 0,3% pour le foncier et de 0,5% pour les biens professionnels. Aussi, pour le résidentiel, les prix des villas ont craqué avec une chute de 7,2% contre une baisse de 2,3% pour les maisons et un recul limité à 0,2% pour les appartements. Par ailleurs, cette inquiétude est étayée par d'autres statistiques en provenance d'autres sources. En effet, les ventes cumulées de ciment sur les 4 premiers mois de 2018 ont atteint 4,54 millions de tonnes, en baisse de 5,57% par rapport à fin avril 2017. Aussi, en Bourse, l'indice sectoriel de promotion immobilière affiche une contre-performance annuelle 2018 YtD de 33,9%. Enfin, l'encours des crédits aux promoteurs immobiliers à fin mars 2018 est en baisse de 2% par rapport à fin décembre 2016. Notons enfin que, curieusement, cette évolution hésitante des prix immobiliers survient malgré la flexibilité partielle du dirham. Cette dernière est censée favoriser l'investissement dans les actifs réels comme l'immobilier ou les actions. Farid Mezouar DG de FL Market Les Inspirations ECO : Faut-il s'inquiéter pour l'immobilier ? Farid Mezouar : Je suis tenté de répondre par la négative à un niveau global car, en termes de prix, nous faisons plutôt face à une décélération ou à une baisse limitée, et non à une chute rapide à deux chiffres. De plus, les vendeurs résistent globalement et bradent rarement leurs biens immobiliers. Enfin, le marché n'a pas encore intégré l'entrée des OPCI qui ne sont pas complètement opérationnels. Comment expliquer ce sentiment de crise ? C'est un peu comme pour la Bourse: quand les prix se stabilisent après un cycle haussier, certains évoquent une crise. Aussi, la baisse médiatisée des bénéfices de certains promoteurs et les difficultés d'autres ont amplifié ce sentiment de crise. Toutefois, à mon avis, celui-ci ne doit pas être généralisé à tout le secteur de la promotion immobilière car ceux qui réussissent à ajuster leur modèle économique pour s'adapter à la mutation de la demande des ménages vont sortir renforcés de cette période d'ajustement.