Aujourd'hui s'est ouvert à Bruxelles le procès de Salah Abdeslam, l'unique survivant de l'attentat de Paris et de son complice Sofien Ayari. Si le second a répondu approximativement aux questions de la juge Marie-France Keutgen, Salah Abdeslam se dit venir au tribunal parce qu'on lui a dit de le faire et ne compte pas s'exprimer. Plus d'une centaine de journalistes ont été accrédités pour le premier jour du procès retentissant de Salah Abdeslam et Soufiane Ayari, qui a lieu à la 90e chambre correctionnelle du tribunal de première instance francophone de Bruxelles. Ils sont poursuivis pour des faits qui remontent au 15 mars 2016. Ce jour-là, ils avaient tiré sur des policiers belges et français qui s'apprêtaient à perquisitionner la planque où ils se trouvaient, rue du Dries à Forest, une commune de la capitale de l'Europe. Très tôt ce matin, Salah Abdeslam a été transféré de la prison française de Fleury-Mérogis où il est détenu depuis avril 2016. Il est 8 h 45 quand la présidente de la chambre, Marie-France Keutgen, commence l'interrogatoire de Sofien Ayari. Ce dernier raconte comment il est arrivé en Belgique en provenance de Syrie et précise comment il a débarqué en Allemagne, là où Abdeslam est venu le récupérer le 3 octobre 2015. Il détaille ensuite comment il a vécu sa cavale avec Salah Abdeslam et soutient mordicus qu'il n'a pas tiré sur les policiers français et belges lors de l'assaut de la rue du Dries, à Bruxelles. Au fur et à mesure de son récit, Soufiane Ayari, d'origine tunisienne, montre des signes de fatigue et décide de ne parler qu'en arabe. À propos des différentes planques qu'il a utilisées à Bruxelles, les raisons de sa venue en Belgique, ses donneurs d'ordre, Soufiane s'est refusé de s'exprimer, mais annonce qu'il voulait revenir en Syrie. «D'abord, je n'ai pas participé à ces attentats. Et puis, je l'ai déjà dit, mon intention était de retourner en Syrie après le 13 novembre (...) Je n'avais pas d'autre alternative que de retourner en Syrie et rejoindre l'Etat islamique. Dans mon pays, en Tunisie, je risquais la prison (...)», déclare-t-il avant de refuser de s'exprimer davantage. «Jugez-moi, je place ma confiance en Allah» Il est 10 h quand la présidente commence l'interrogatoire de Salah Abdeslam. D'entrée de jeu, il annonce la couleur avec une voix calme et des mots précis : «On m'a demandé de venir, je suis venu tout simplement, il y a un procès, je suis l'acteur de ce procès, on m'accuse et voilà je suis ici, je garde le silence, c'est un droit que j'ai, mon silence ne fait pas de moi ni un criminel ni un coupable, je me défends comme ça en silence, j'aimerais qu'on se base sur les preuves scientifiques et tangibles, et pas sur de l'ostentation ou sur ce que pense l'opinion publique». Il rajoute : «C'est en mon seigneur que je place ma confiance. Jugez-moi je place ma confiance en Allah, je n'ai rien à ajouter». La juge, les avocats et les parties civiles sont dépités par son attitude qui augure d'un procès qui va patauger. L'audience est suspendue. La juge sentant le blocage accorde à Salah Abdeslam le droit de s'entretenir avec ses avocats dans la salle d'audience vie. Ce procès qui s'annonce très lourd se tiendra du 5 au 9 février avec une première audience ce lundi qui permettra aux juges d'interroger les prévenus de la fusillade du 15 mars 2016. Demain, c'est au tour de la plaidoirie du procureur fédéral et des parties civiles, avant de céder la place jeudi à la défense des prévenus. Ces derniers auront le droit à la parole vendredi, avant que la cour entre en délibération. À en juger par l'attitude de deux prévenus, ce procès risque d'être un nouveau rendez-vous manqué pour démêler l'écheveau d'une affaire aux ramifications complexes au risque que le mystère reste entier sur le véritable rôle de chacun dans les attentats qui ont secoué l'Europe. Affaire à suivre.