Chantier à ciel ouvert depuis plusieurs mois, la capitale économique et industrielle du royaume ne manque néanmoins pas de s'illustrer sur le plan environnemental... Et à l'échelle continentale. Casablanca serait en effet parmi les six grandes villes industrialisées les plus «green» du continent. C'est ce que vient de révéler une récente étude comparative -commandée par le groupe Siemens et menée par le cabinet The Economist Intelligence Unit- en marge des conférences internationales à Durban, en Afrique du Sud, sur le climat. Dans un classement global qui prend en compte quatorze autres grandes capitales économiques africaines de différentes régions, Casablanca se place au-dessus de l'indice moyen africain des «green cities». Elle partage cette catégorie d'élites africaines du «green» avec cinq autres capitales, à savoir Accra (Ghana), Tunis (Tunisie), Cape Town, Durban et Johannesburg (Afrique du Sud). Ce tableau -fortement dominé par les villes sud-africaines- est dressé sur la base de huit critères précis. Ces derniers vont de la gouvernance environnementale à la distribution de l'eau et la gestion des déchets, en passant par les aspects liés aux moyens de transport urbain, à l'assainissement ainsi qu'aux émissions de CO2 en fonction de la consommation énergétique. Ce qui suit décortique en détails les bonnes et mauvaises notes de Casablanca. CO2... Silence, ça pollue ! Sur ce dernier aspect -l'un des plus significatif par ailleurs-, l'étude avance que 99% des foyers casablancais ont accès à l'électricité, un des plus grands ratios des villes étudiées, se situant bien au-dessus de la moyenne africaine qui est de 84%. En face, cette forte consommation énergétique produirait un ratio d'émissions de CO2 estimé à quelque 450 kg/per capita, bien en dessous de la moyenne continentale de 984 kg/per capita. Un chiffre que les experts expliquent principalement par le fait que «plus de la moitié de la production électrique de la ville est générée à partir de la combustion du charbon», une énergie fossile fortement pollueuse. Sur ce critère, la capitale marocaine figurerait aux mêmes niveaux que Johannesburg et Accra. Elle est par contre dépassée par Addis-Abeba et Lagos, qui se trouvent bien au-dessus de l'indice moyen. Aménagement... Pas assez «vert» La capitale économique bénéficie d'un score relativement positif sur un tout autre critère, celui de l'aménagement de l'espace. En effet, même si chaque habitant de la ville ne bénéficierait que d'un ratio de 55 m2 d'espace vert -contre une moyenne qui s'établerait à 74 m2 par habitant-, la ville enregistrerait par contre l'un plus bas taux de populations résidant en bidonvilles (15%). «La politique locale d'aménagement de l'espace public semble bien structurée, avec une intégration davantage d'espaces verts dans les projets urbains de la ville», commente-t-on auprès de l'Economist Intelligence Unit. Dans cette catégorie, Casablanca partage son niveau de développement avec les villes sud-africaines de Durban et Cape Town, et celle d'Addis-Abeba. Transport... Le goulot d'étranglement Par contre, le cabinet donne une mauvaise note au niveau qualitatif et quantitatif des infrastructures de transport de la capitale économique. «Le transport public casablancais est estimé à un ratio de 1,4 km/km2, bien en deçà d'une moyenne continentale de 2,7 km/km2», révèlent les experts du cabinet. À cela s'ajoute la concentration des moyens de transport au niveau du centre ville, rendant difficilement accessibles les zones péri-urbaines. L'étude ouvre toutefois des perspectives, en avançant que la prochaine mise en service du tramway devrait apporter une solution à cette dernière contrainte. La capitale économique du royaume est devancée, sur ce critère, par plusieurs autres grandes cités africaines telles Le Caire, Tunis, Johannesburg et Durban. Eau... Loin du stress Dans le domaine de l'accès et à la consommation d'eau potable, il est par ailleurs estimé que le système de distribution de la Lydec, enseigne délégataire de ce service, perdrait une estimation de 28% du total de volume distribué en fuites, par rapport à un taux moyen général de 30%. «La politique locale de gestion appliquée est également relativement forte. Casablanca est en effet l'une des quelques rares villes dans le rapport à disposer d'une réelle stratégie visant à réduire la pression sur ses ressources en eau et à promouvoir une consommation efficace», compare-t-on dans le rapport en question. Ce dernier ajoute que des normes standards de qualité de l'eau ont également été déterminées, ce qui n'est pas le cas dans la plupart des quatorze autres grandes villes africaines. Au final, le regroupement de tous ces arguments, placent la ville marocaine au dessus de la moyenne continentale avec Durban, Cape Town et Addis Abeba. Gouvernance environnementale... Peut mieux faire Sur cet aspect, le rapport du cabinet international n'a pas fait dans la complaisance. Il apprécie relativement bien le niveau de management environnemental public des autorités locales de la ville, tout en déplorant toutefois l'indisponibilité d'informations sur les performances environnementales de celle-ci. Selon les experts de l'Economist Intelligence Unit, la capitale marocaine pourrait également mieux faire en termes de «participation du public dans l'environnement des affaires». L'organisme part du constat qu'un certain nombre de domaines de la politique environnementale -électricité, eau et gestion des déchets- sont gérés par des organismes publics sous formes de partenariats public-privé (PPP), dans lequel le gouvernement accorde une concession à une entreprise privée pour exécuter le service dans les différentes communes de la ville. Malgré les déboires qui ont longtemps défrayé la chronique -mettant en scène plusieurs contrats de gestion déléguée qui ont viré au claquage de porte entre autorités locales et opérateurs- les auteurs du rapport pensent tout de même que ce système de gestion a au moins permis de «révéler un moyen efficace d'améliorer les services publics». Résultat : Casablanca se retrouve tout juste dans la moyenne africaine, et dans la même liste qu'Alexandrie, Lagos, Le Caire et Tunis. Déchets... le bât qui blesse On en produirait beaucoup, à Casablanca. Le ratio se situerait en effet à 474 kg de déchets par habitant, par rapport à un indice moyen continental de 408 kg. Le rapport souligne, en l'occurrence, que les politiques de recyclage sont relativement sous-développée -voire inexistante-, en comparaison aux quatorze autres villes africaines étudiées. D'un point de vue global, «si le système de collecte de déchets s'est relativement amélioré sur les cinq dernières années, la qualité du service varie largement à travers la ville», selon les concepteurs de l'étude. La ville se rattrape néanmoins sur quelques petits aspects comme la collecte des déchets spéciaux et le dispositif y afférent, parmi les meilleurs en vigueur sur le continent. Mais la capitale fait partie des «mauvais élèves» en termes de points de collecte pour les déchets recyclables, et du nombre limité de matières recyclables. Assainissement... ça coule sous nos pieds Le rapport estime que 99% de la population de la ville ont accès à un système d'assainissement, ce qui dépasse l'indice moyen africain fixé à un taux de 84%. «Vues dans l'ensemble, les politiques d'assainissement de la ville sont assez robustes», pensent les experts de l'Economist Intelligence Unit. Les autorités de la ville, qui disposeraient en effet d'un code d'assainissement, auraient aussi défini des standards pour le traitement des eaux usées. Le rapport revient ainsi sur les derniers projets de la Lydec dans ce sens, estimant que l'opérateur «a apporté beaucoup d'améliorations dans la gestion des eaux usées à travers la ville. En illustration, figure le projet de construction d'un canal de secours après les inondations du Oued Maleh». Résultat final : Casablanca passe au-dessus de l'indice moyen continental. Qualité de l'air... À vos masques à gaz ! Le niveau de qualité de l'air est relativement élevé à Casablanca. Une politique est en vigueur pour l'amélioration de la qualité de l'air ambiant, ainsi que la surveillance régulière des niveaux de pollution de l'atmosphère dans plusieurs endroits de la ville. La principale menace environnementale qui pèse sur cet indicateur vient bien sûr des fortes congestions du trafic urbain, ainsi que des rejets provenant des unités industrielles implantées dans la région.