Quels sens pour l'intégration du Maroc à l'UA et à la CEDEAO ? La question a fait l'objet d'un panel lors de la 10e édition des MEDays à Tanger. Compte rendu. C'est probablement l'un des panels les plus suivis lors de cette 10e édition du Forum MEDays. Et il avait pour thème : «UA-CEDEAO : Quels sens pour l'intégration du Maroc». Sur la tribune, l'ancien chef de la diplomatie sénégalaise, Mankeur Ndiaye, le conseiller spécial de l'actuel premier ministre du Sénégal, Moubarak Lo, au côté de Mohamed Methkal, directeur général de l'Agence marocaine de la coopération internationale (AMCI) et Jawad Kerdoudi, président de l'Institut marocain des relations internationales (IMRI). Devant une salle presque comble, ils ont tous, pendant environ une heure, défendu le dossier et les positions du Maroc aussi bien à l'Union africaine que le royaume a (re)intégrée en janvier dernier, qu'à la CEDEAO, qui s'apprête à accueillir le Maroc en tant que 16e pays membre. Contribution positive À l'UA, Mankeur Ndiaye, qui était ministre des Affaires étrangères du Sénégal lors du retour du Maroc, a rappelé le vif débat qui a opposé la majorité favorable au dossier marocain, à la minorité réticente à cette réadmission. Globalement, a-t-il laissé entendre, il est apparu que les objections de certains Etats, en majorité d'Afrique australe, ne faisaient pas le poids face à la légitimité pour le Maroc de réintégrer sa famille africaine. Désormais, le travail, doit porter, selon le directeur général de l'Agence marocaine de la coopération internationale (AMCI), sur la reconnaissance totale de la souveraineté marocaine sur le Sahara. «Pour nous, la question sur la souveraineté nationale est non négociable», a lancé Mohammed Methkal, laissant comprendre que le royaume ne baissera pas les bras tant que la pseudo «RASD» siège au sein de l'UA. Mankeur Ndiaye rassurera en projetant un règlement de cette question «d'ici quelques années». En dehors de cette question épineuse sur le Sahara, tous les intervenants sont d'accord sur la «contribution positive» du Maroc à l'UA, notamment en partageant ses succes-stories dans de nombreux secteurs avec le reste du continent. Migration Une fois la question de l'UA «évacuée», le débat a vite bifurqué sur la CEDEAO. Dans l'assistance, constituée de responsables politiques et économiques, mais aussi de très nombreux étudiants, l'attention redoublait d'intensité. Certes le débat était à sens unique, mais à ce niveau, plusieurs craintes sont apparues en filigrane des interventions. Face à Jawad Kerdoudi, président de l'IMRI, qui alerte sur la pression migratoire et la nécessité pour le Maroc de s'y préparer une fois son admission au sein de la CEDEAO actée, le conseiller spécial du premier ministre sénégalais a préféré s'attarder sur «les avantages» pour les pays de la CEDEAO et du Maroc. Même son de cloche de la part du diplomate Mankeur Ndiaye, qui a longuement rappelé que lors du Sommet de Monrovia en juin dernier, aucun chef d'Etat ouest-africain ne s'était opposé à l'entrée du Maroc. Questions sans réponses Au fur et à mesure de l'avancée du débat, on sentait le public certes absorbé par les interventions des panélistes, mais «le diplomatiquement correct» qui a prévalu lors des échanges a laissé une bonne partie de l'assistance sur sa faim. À part le défi migratoire, beaucoup de questions ont été minutieusement passées sous silence. Toutefois, une chose est presque sûre : contrairement à son entrée à l'UA obtenue au terme d'une confrontation farouche avec ses adversaires, le Maroc n'aura pas besoin de trop forcer pour être membre de la CEDEAO. En tout cas, pour Mankeur Ndiaye, «l'opportunité» qu'offre cette adhésion prime sur tout, y compris le critère géographique. Le verdict sera connu dans une vingtaine de jour à l'occasion du prochain sommet des pays membres de la CEDEAO. Mankeur Ndiaye Ancien ministre sénégalais des Affaires étrangères Il n'y a pas d'obstacle juridique à l'adhésion du Maroc à la CEDEAO. Le traité de la CEDEAO reste muet sur l'admission d'un nouvel Etat, donc seule une décision politique des chefs d'Etat pourra résoudre le problème.» Moubarak Lo Conseiller spécial du premier ministre sénégalais L'entrée du Maroc dans la CEDEAO pose certes des défis, mais apporte aussi des avantages. La CEDEAO doit davantage s'intéresser aux apports positifs de l'intégration du Maroc.» Jawad Kerdoudi Président de l'IMRI «Avec son adhésion à la CEDEAO, le Maroc exportera plus, mais aussi importera plus. La libre-circulation des personnes va accentuer le phénomène migratoire. Le Maroc doit se préparer à recevoir plus de migrants subsahariens.»