«Fournir au moins 70% de produits alimentaires supplémentaires d'ici 2050», c'est ce qu'il faudra à l'agriculture mondiale pour nourrir la dizaine de milliards d'êtres humains qui peupleront la Terre à cet horizon. Un défi qui devra être relevé, selon la FAO, en «tenant compte des probables incidences du changement climatique». Ce phénomène est en évolution accélérée et réunit justement, depuis lundi dernier, les écosensibles issus de 200 nations du monde entier à Durban, en Afrique du Sud. Cette 17e conférence de l'ONU sur le climat est vue comme «une étape intermédiaire dans les négociations climatiques internationales». Au lendemain de l'échec des négociations de Copenhague, les leaders du monde -en l'occurrence, ceux des pays industrialisés- sont attendus à la tribune des bonnes volontés écologiques. Mais force est de constater, quatre jours déjà après le démarrage des discussions, que les paroles tardent encore à se traduire en pratique. Le spectre de l'échec des compromis continue-t-il à planer ? «L'objectif est, tout au moins, de trouver un consensus pour conserver l'architecture du Protocole de Kyoto, et éviter le pire en attendant qu'un accord global se dessine à l'horizon 2015/2020», préjugent déjà certains experts. La COP17 est pourtant d'autant plus déterminante qu'elle devrait, a priori, être le théâtre d'une nouvelle entente sur la protection du climat. Dernière chance Le Protocole de Kyoto devrait, en effet, expirer en fin 2012, pour laisser un grand questionnement sur l'avenir du climat. Cela, sans oublier que les deux principales puissances industrielles du monde, et championnes en émissions de CO2 -Chine et Etats-Unis- s'entêtent à camper sur leurs positions de priorisation économique. Ajoutées à cela, les dernières crises économiques et de la dette européenne sont venues rendre les choses plus compliquées que jamais. Faute de mieux, en attendant que les choses se précisent, hier encore, le groupe de représentants des pays africains à Durban a haussé le ton, incitant l'ONU à mettre en œuvre des mesures «d'adaptation aux changements climatiques». Dans ce sens, d'ailleurs, la question de l'alimentation du Fonds vert pour le climat, pour aider les pays en développement à lutter contre les changements climatiques, devrait être largement débattue. Pour information, les Etats-Unis ont d'ores et déjà manifesté leur rejet de l'option de participer à cette initiative. Menaces Dans cet imbroglio où pays riches et pauvres tirent chacun de son côté la couverture, les scientifiques se veulent prévenants. Pour ces derniers, appartenant soit au Groupe international des experts sur le climat (GIEC), soit à l'Agence internationale de l'énergie (AIE), l'urgence est de réduire de 25 à 40% les émissions de gaz à effet de serre (GES), pour espérer contenir la hausse des températures en dessous de 3 à 5°C. Pour y arriver, le GIEC a récemment publié une sorte de mode d'emploi : le Special Report on Renewable Energy Sources and Climate Change Mitigation (SRREN), rendu public en août dernier. Ce document, qui semble être un véritable plaidoyer pour le développement et la promotion des énergies propres afin de soutenir la croissance économique, avance que «près de 80% de l'approvisionnement énergétique mondial pourraient être couverts par les énergies renouvelables à l'horizon 2050». Cela devrait permettre, en retombées, une réduction du quart du volume actuel des émissions de GES dans le monde, équivalant à quelque 220 à 560 gigatonnes de dioxyde de carbone, entre 2010 et 2050. «Nous n'avons pas encore pris conscience des potentiels que nous offrent les énergies renouvelables», commentait, dans ces mêmes colonnes (Les Echos quotidien du jeudi 18 août 2011), le Dr. Mohammed-Saïd Karrouk, professeur marocain en climatologie et membre du GIEC / IPCC - WMO / UNEP - ONU (Climate Change). Quoi qu'il en soit, le prix à payer pour recouvrer une planète saine, sera à coup sûr des plus élevés dans les prochaines décennies. Chaque minute compte... Qui sème du green Pour l'heure, les défis de l'adaptation aux changements climatiques, en l'occurrence pour le secteur agricole, sont déjà érigés par les organismes internationaux à l'image de la FAO. Pour celle-ci, les «pratiques agricoles actuelles devraient être transformées pour alléger la pression exercée sur les systèmes d'exploitation de la terre et de l'eau». Les experts de l'institution onusienne pensent aussi que les nations devraient œuvrer à réduire les retombées négatives des systèmes de production. L'augmentation de la production alimentaire et la réduction de la pauvreté, la sécurité alimentaire, la diversification et la préservation des services écosystémiques devraient découler de ces efforts. De plus, les politiques d'investissement et les politiques économiques et commerciales de ces pays devraient privilégier une agriculture durable, ainsi qu'un développement rural équilibré. «L'intensification durable de la production agricole devrait être mise en pratique selon une approche de planification et de gestion intégrée», en tenant compte simultanément de l'atténuation du changement climatique et de l'adaptation à ses effets. Pour finir, les systèmes agricoles en danger devraient bénéficier d'une attention prioritaire et l'élimination progressive des risques surveillée.