Dans un contexte où la région euro-méditerranéenne est confrontée à des défis complexes, le projet méditerranéen s'impose plus que jamais. Malgré les efforts consentis par la Politique européenne de voisinage (PEV), la construction d'un espace de stabilité et de prospérité partagées, tant attendu par les deux rives, tarde à se concrétiser en raison du manque de convergences entre les Etats européens, de volonté politique de certains partis eurosceptiques et de l'inadaptation de certains instruments aux nouvelles transitions survenues en Méditerranée. L'Europe, en complémentarité avec ses partenaires méridionaux, est plus que jamais appelée à peser dans la région méditerranéenne, notamment à travers l'Union pour la Méditerranée (UpM), qui a pour vocation de favoriser la coopération régionale et la cohésion des pays euro-méditerranéens. Stabilité partagée Il est impératif de mettre le cap sur le Sud car la Méditerranée dispose d'énormes potentialités humaines et naturelles, pouvant être un véritable moteur de croissance économique pour l'Europe. Cela impliquerait, de la part de cette dernière, une coopération plus solidaire, en phase avec les priorités des pays du Sud et le renforcement de ses capacités d'action dans cet espace régional, tout en confortant le rôle de l'UpM en tant qu'acteur majeur dans la future configuration de la PEV. Cela est nécessaire pour réduire les inégalités économiques et sociales, amoindrir les crispations identitaires qui se développent au Nord comme au Sud, car la stabilité et la sécurité de l'Europe, de même que son redressement économique et productif, passent par la stabilité et le développement du sud de la Méditerranée. Il convient donc de créer les conditions pour formuler de nouveaux modèles de croissance et de développement, plus inclusifs et durables, bénéfiques à toute la région. Et cela, à travers la valorisation des ressources des pays du Sud, en instaurant des marchés du travail inclusifs et des activités génératrices de revenus pour les jeunes, ainsi qu'une meilleure intégration économique, en développant les infrastructures et en promouvant les investissements. Il est aussi question de la promotion des valeurs cultuelles et culturelles pour prémunir les jeunes de toute forme d'extrémisme. Dimension africaine L'UpM l'a bien compris, en se dotant d'une nouvelle feuille de route centrée sur l'action visant le renforcement de la coopération régionale en Méditerranée, basée sur la création d'opportunités économiques en faveur des jeunes. Cette orientation implique aussi que les pays du Sud réalisent leur propre travail en interne, en termes de gouvernance, de démocratie, d'Etat de droit et de réformes structurelles, en mobilisant toutes les synergies en faveur de la croissance, l'inclusion et l'équité sociale. La promotion d'une approche régionale pour la pérennité de la paix et du développement appelle à la prise en compte de toutes les dimensions stratégiques, notamment africaine. Le Maroc l'a bien compris en faisant le choix et le pari de l'ouverture sur son continent, en optimisant sa position géostratégique, trait d'union entre l'Afrique et l'Europe. En effet, le roi Mohammed VI a toujours voulu ancrer l'Afrique dans un cercle vertueux, car l'Afrique est le continent de l'avenir, disposant de fortes marges de croissance durable. C'est le continent qui dispose d'une richesse d'atouts multidimensionnels qu'il convient d'exploiter au bénéfice du développement humain durable. Le triptyque marocain C'est tout le sens qui a été donné à la vision africaine du royaume voulue par le souverain, basée sur le triptyque «promotion de la paix et de la sécurité-impératif d'une croissance partagée-capitalisation sur des solidarités durables, porteuses d'ouverture et de stabilité pour le continent. En effet, il ne peut y avoir de développement sans sécurité et, réciproquement, il ne saurait y avoir de sécurité et de paix sans développement. C'est dans ce sens que le Maroc a toujours accompagné les pays d'Afrique dans la consolidation de la paix et de la sécurité régionales. Le Maroc promeut également une croissance partagée et un co-développement en faveur du développement humain, qui s'affranchit des règles de conditionnalité qui ont longtemps façonné les relations Nord-Sud. La nouvelle dynamique pro-active du partenariat Maroc-Afrique se traduit par les multiples déplacements effectués par le souverain en Afrique, mais aussi par des actions structurantes à forte valeur ajoutée, en faveur d'une Afrique émergente et autonome, dans le cadre d'une coopération sud-sud innovante et mutuellement bénéfique. Force économique majeure Le projet régional visant la construction du gazoduc Nigeria-Maroc, qui générera de nombreux avantages en termes d'opportunités socio-économiques, de création d'emplois et de développement dans tous ses aspects multidimensionnels, en est un exemple. Le Maroc s'impose aussi comme force économique majeure sur le continent, en renforçant sa dimension économique et technique, par l'implantation d'entreprises marocaines au service d'un projet africain commun et de ses bénéficiaires. Il capitalise aussi sur une solidarité agissante qui se traduit par la formation d'africains aussi bien au niveau universitaire que professionnel, en accueillant plus de 8.000 étudiants dans ses établissements supérieurs, dont 6.500 boursiers. Enfin, l'Afrique doit désormais se prendre en charge et assumer son avenir dans le monde en dépassant les entraves à son développement socio-économique et ce, en valorisant sa jeunesse, véritable moteur et force vive de développement du continent. Youssef Amrani Chargé de mission au Cabinet royal. Ancien secrétaire général de l'Union pour la Méditerranée