C'est parti pour les législatives ! Officiellement, la campagne électorale sera ouverte le 12 novembre prochain, pour prendre fin la vielle du scrutin, c'est-à-dire le 24 novembre. L'heure est donc aux derniers réglages pour les partis politiques, après l'étape tumultueuse de l'adoption d'une batterie de lois électorales devant garantir les conditions d'un processus transparent et qui semblent, dans l'ensemble, satisfaire toutes les parties, en dépit de quelques réserves. Les rencontres, au sommet, se multiplient au niveau des différents états-majors des formations politiques, pour apporter les derniers retouches aux programmes électoraux et statuer définitivement sur les candidatures et les têtes de listes, locales et nationales, qui doivent, en principe être déposées entre le 3 et le 11 novembre. La plupart des partis ont déjà dévoilé leurs programmes électoraux et on connaît les têtes de listes pour plusieurs circonscriptions, surtout pour les grosses pointures. Les retardataires ont donc jusqu'à ce weekend pour prendre place dans les starking blocks de la campagne. Dans l'ensemble, les grandes orientations des formations politiques sont connues, après la sortie de l'Alliance pour la démocratie, le PJD, l'Istiqlal ou le PPS. Seul l'USFP semble encore tergiverser. La première lecture des programmes déclinés laisse transparaître un certain consensus sur les grandes orientations stratégiques du royaume. Principalement sur les constantes du royaume, sur l'intégrité territoriale et sur les grands chantiers structurants, ou le projet de régionalisation, les partis restent sur la même longueur d'onde. Une entente somme toute normale, puisqu'elle n'est que la traduction des choix que le peuple marocain a massivement consacrés dans la Constitution adoptée le 1er juillet dernier. «Dis moi quel est ton programme et je te dirai de quel bord tu es !». Cette fois encore, les partis politiques marocains ont péché par manque d'audace dans la déclinaison de leurs programmes, même si l'intention y était. La preuve, aucune mesure phare qui distingue vraiment les formations politiques mais des promesses, comme par le passé. C'est une manière certes prudente au regard de la difficulté à traduire en actes les engagements pris, en cas d'éventuel victoire, mais qui ouvre la voie à la surenchère. Il y a bien sûr des programmes économiques avec des objectifs chiffrés, des délais et des leviers identifiés qui font que les programmes se ressemblent, ou presque. C'est le cas par exemple pour le taux de croissance, levier principal du développement économique. Alors que le PJD vise une croissance à 7%, l'Alliance pour la démocratie table sur 6% et l'Istiqlal, fait dans la prudence avec des prévisions de 5% de croissance annuelle. Trop pessimiste, l'Istiqlal ? Pas vraiment, pour le parti du Premier ministre, qui a eu à souffler le chaud et le froid durant les quatre dernières années avec l'effet de la conjoncture internationale et les prévisions de récession. D'ailleurs, à la question de savoir par quel miracle stimuler le taux de croissance que le contexte mondial risque de maintenir en deçà de la barre des 5% pour les deux prochaines années, au moins, les approches divergent. Pour le PJD, tout est une question de gouvernance et de répartition des richesses. Le parti de la lampe s'engage à réduire le chômage de 2% et à diminuer de 50% le taux de la pauvreté. Pour cela, Benkirane et compagnie ne manquent pas d'ambition. Augmentation du revenu individuel de 40% au cours des 5 prochaines années, limitation du déficit budgétaire à 3%, doublement du rendement de l'investissement public et participation des PME dans la mise en œuvre des grands marchés publics, à hauteur de 30%, telles sont les grandes lignes du programme économique de ce parti, qui envisage également de diminuer l'IS à 25% et de mettre en place un nouveau système fiscal de la TVA afin d'exonérer les produits de base au niveau alimentaire et médical. L'Istiqlal s'est engagé, de son côté et en cas de reconduction, à créer 750.000 postes durant les 5 prochaines années dans le secteur privé. Ce choix est justifié par le fait que le secteur génère annuellement près de 90% des emplois créés. À cela s'ajoute la création de 100.000 emplois, soit 20.000 par an, dans la fonction publique pour accompagner, notamment, «l'émergence d'une administration régionale», nous a confié un économiste du parti. Répartition des richesses Le retrait de l'examen de la loi de finances aurait pu donner un bref aperçu sur la position des partis par rapport à cette question, devenue au cœur des débats ces dernières semaines. «Il est normal, après une décennie de croissance que les citoyens commencent à en voir les fruits», confirme un expert. Les partis semblent s'approprier cet enjeu, en proposant des solutions, dont le projet de loi de finances avait ébauché quelques lignes avant son retrait. La discussion sur le fonds ne se fera pas au Parlement mais sur le terrain électoral. L'Alliance pour la démocratie, dont le programme commun n'est pas encore dévoilé, a déjà promis une vingtaine d'engagements en ce sens. Pour le moment, la seule information qui a filtré est la création d'un fonds de solidarité, notamment en faveur des jeunes. L'Istiqlal prévoit, pour sa part, l'instauration de deux fonds, dont le premier pour le soutien à la lutte contre la pauvreté et le second consacré au développement des régions éloignées et montagneuses». Ces fonds seront alimentés à partir de nouvelles taxes, notamment sur les «gros salaires». Le PJD lui, planche pour une augmentation du Smig qui sera porté à 3000 DH et les pensions de retraite, dont le niveau minimal sera de 1.500 DH. Un aspect qu'on retrouve dans les orientations générales du PPS, qui prévoit d'augmenter le Smig, «afin de préserver la dignité d'au moins un million de familles marocaines sans ressources», selon Karim Tej, du bureau politique du PPS. Pour le reste, c'est de la redite puisque les initiatives lancées semblent se rejoindre notamment sur le point de la généralisation du Ramed, la poursuite de la réforme du système éducatif ou du système judiciaire. Un terrain sur lequel, les socialistes sont très attendus. Les économistes à la rescousse La touche des économistes est perceptible à la lecture des différents programmes jusque là déclinées. Certaines formations ou union de partis ont, en effet, institué des commissions ad'hoc spécialement en charge d'élaboration du volet économique des programmes politiques. C'est le cas du PJD qui était mercredi à la tribune de la CGEM pour présenter quelques 1500 engagements en faveur du monde des affaires et particulièrement les PME. D'autres formations qui disposent déjà d'une instance dédié aux orientations économiques n'ont fait que renforcer leurs structures comme au niveau l'Istiqlal avec l'Alliance des économistes istiqlaliens. La campagne électorale, ça sera également, une confrontation entre visions et expertises sur l'économie nationale.