Le colloque international de l'ISCAE dédié à l'entrepreneuriat et au développement des PME dans le monde a été l'occasion pour les experts réunis de plancher sur les principales problématiques qui entravent le développement de cette catégorie d'entreprises. Le point sur les principales recommandations qui sont ressorties des trois tables rondes organisées. Le rôle central des universités dans le développement de l'entrepreneuriat est plus que jamais souligné. Aujourd'hui, le groupe ISCAE prend les devants pour se positionner sur ce créneau en inscrivant la question au cœur de sa stratégie de développement. C'est ce qui ressort de l'organisation de son 2e colloque international organisé en fin de semaine dernière et placé sous le thème : «L'entrepreneuriat et le développement des PME dans le monde». Cet évènement organisé à Casablanca, en partenariat avec le Groupe ISM-Dakar et l'Association internationale de recherche en entrepreneuriat et PME a été l'occasion de rassembler les experts de la PME ainsi que les différentes parties prenantes à même d'exercer un impact sur le développement de cette catégorie d'entreprises. Toutes se sont accordées sur un fait : le rôle moteur de la TPME dans le développement de l'économie nationale, dans la résorption du chômage et dans l'amélioration des indicateurs macro-économiques. Il s'agissait plus concrètement de «faire un état des lieux et valoriser la recherche sur l'entrepreneuriat et la PME au Maroc et dans le monde, d'établir un benchmark sur les modèles de gestion des PME à travers le monde et d'identifier les bonnes pratiques en matière de gestion des PME au Maroc et dans le monde», explique-t-on auprès de l'ISCAE. Ainsi, les responsables des secteurs publics et privés concernés par la thématique de l'entrepreneuriat au Maroc pour ne citer que Maroc PME, la CGEM, le secteur bancaire, la CNSS et le monde de l'université ont à l'occasion de trois tables rondes pu décortiquer différentes problématiques auxquelles sont confrontées nos PME, à savoir le financement de l'innovation au Maroc, le rôle de l'agence Maroc PME dans le développement, la promotion de l'entrepreneuriat au Maroc et l'importance du classement du Maroc dans le Doing Business ainsi que l'impact sur la compétitivité des PME. En marge de ces tables rondes, des ateliers de recherche ont été animées par des chercheurs marocains mais également étrangers afin de relever les différentes formes et typologies de l'entrepreneuriat au Maroc, d'analyser les mécanismes et conditions de financement des PME, d'aborder la question cruciale du capital immatériel ainsi que de mettre l'accent sur l'importance de l'innovation et de la performance des PME. Ces éléments d'analyse auront également permis de relever les leviers de compétitivité des PME et de réaliser un travail de benchmark à même d'apporter des solutions concrètes pour ce tissu économique stratégique pour notre économie. Le financement, nerf de la guerre Parmi les principales recommandations des experts, il faut compter l'amélioration de l'accès au financement des PME. Cette problématique qui continue de miner le développement de ce tissu entrepreneurial est en effet relevée comme étant une des principales priorités sur lesquelles doivent plancher les pouvoirs publics. Il s'agit notamment pour les participants de la table ronde dédiée à cette problématique de mettre l'accent sur la nécessité de développer des sources de financement alternatives telles que le capital-risque, le crowdfunding, la finance islamique, les fonds d'investissements gérés en mode partenariat public-privé, les business angels et l'accès à la Bourse pour les PME, ceci à travers notamment le lancement du compartiment dédié. En outre, les recommandations versent également dans le sens d'encourager la révision du système de garantie des banques afin que celui-ci soit assoupli pour un meilleur accès des PME aux crédits bancaires. Enfin, sur ce volet, les experts ont également soulevé la possibilité de plancher sur la création d'une banque publique d'investissement à caractère régional. Parallèlement à toutes ces pistes de réflexion, les participants à la table ronde mettent en exergue la nécessité d'assurer une bonne éducation financière et entrepreneuriale des jeunes, ceci durant leurs cycles d'études. Amélioration du cadre institutionnel Organisée sous la houlette de Maroc PME, la table ronde dédiée à la réflexion autour du cadre institutionnel a mis en exergue la nécessité de la mise en œuvre de la Charte de l'investissement. Cette dernière a été annoncée en juillet dernier par Moulay Hafid Elalamy, ministre de l'Industrie, du commerce, de l'investissement et de l'économie numérique. Elle prévoit déjà cinq nouvelles mesures incitatives pour l'industrie et sera commune à l'ensemble des secteurs. Dans son calendrier de mise en œuvre, le vote de cette dernière a été initialement annoncé pour début 2017. Par ailleurs, les observateurs préconisent une révision de la charte de la TPME afin que cette dernière soit plus claire et plus adaptée au contexte économique actuel. Enfin, sur le volet institutionnel, les experts notent également la nécessité de mener une plus large réflexion sur le statut de l'auto-entrepreneur afin que ce dernier puisse être «élargi à plus d'un entrepreneur» pour une meilleure incitation à l'entrepreneuriat. Un meilleur environnement des affaires La fiscalité semble être la pierre angulaire du climat des affaires. C'est du moins ce que relèvent les experts ayant planché sur la question lors du colloque international de l'ISCAE. Ainsi, ces derniers mettent l'accent sur la nécessité d'accélérer la réforme de la fiscalité pour un «choc de compétitivité». Dans ce même ordre d'idée, l'option d'un «crédit d'impôt compétitivité emploi» (CISE) a été évoquée à l'instar du système instauré en France. Il s'agit plus concrètement d'un avantage fiscal qui profite aux entreprises employant des salariés et équivaut à une baisse de leurs charges sociales. Le CICE s'impute en priorité sur l'impôt sur le revenu ou l'impôt sur les sociétés au titre de l'année en cours et de laquelle les rémunérations prises en compte pour le calcul du CICE ont été versées. Il peut ensuite être imputé sur les 3 années suivantes et est restitué au-delà de ce délai. En outre, une fiscalité sur le patrimoine est également proposée ainsi qu'une réforme de la TVA. Zineb Midafi Membre du Conseil d'administration de la CGEM et représentante de la très petite entreprise La PME tire la croissance et crée le plus d'emplois, ceci de par son caractère innovant et son agilité qui la rendent plus souple et donc plus efficiente. Ceci étant, la PME est une structure qui reste fragile. Elle dispose également de peu de moyens, notamment sur le plan financier. C'est ce qui crée sa différenciation évidente d'avec une grande entreprise. Les deux types de structures n'ont donc pas vocation à se concurrencer mais davantage à travailler dans une approche complémentaire. La grande entreprise est la locomotive qui a la capacité de tirer tous les autres modèles économiques, PME, TPE et startups. Tous ces acteurs sont aujourd'hui amenés à travailler de concert et en bonne intelligence. Pour accompagner l'entrepreneuriat, le secteur privé a mis l'accent sur la nécessité de booster l'innovation, la culture, l'entrepreneurial, sur le capital immatériel et humain et l'ouverture à l'international». Tarik El Malki Directeur du développement et de la recherche scientifique à l'ISCAE Nous sommes à peu près à 40% de taux de chômage avec des indicateurs macroéconomiques dans le rouge. Aussi, il est nécessaire que les pouvoirs publics comprennent que les vecteurs de création d'emplois de demain sont les TPE d'aujourd'hui. Je reste convaincu que le secteur privé sera de moins en moins un facteur d'absorption des jeunes diplômés qui arrivent sur le marché du travail, d'où la nécessité pour les pouvoirs publics d'orienter les politiques de manière à encourager la formation d'écosystèmes entrepreneuriaux. De nombreuses mesures ont été prises et de nombreuses politiques ont été menées dans ce sens, cependant force est de constater que sur le terrain ces politiques volontaristes et ambitieuses ne sont malheureusement pas traduites par un impact économique et social à la hauteur des ambitions du Maroc». Said Ahmidouch, directeur général de la CNSS «La PME est un facteur de création d'emplois et un levier de l'expansion de la couverture sociale. Il faut observer l'évolution de l'emploi en fonction de la taille de l'entreprise. Sur une évolution moyenne de l'ensemble du portefeuille de la CNSS, qui est de l'ordre de 8%, les très petites entreprises enregistrent une évolution de 13%. Par ailleurs, le développement de l'emploi est d'autant plus important dans les petites entreprises que dans les grandes structures. Ceci constitue une preuve par les chiffres que la création d'emplois, lors de ces dernières années, a été plus prégnante dans les petites entreprises.»