Abstraction faite de la musique gnaoua, véritable reine du festival, plusieurs genres et styles envoûtent le public d'ici et d'ailleurs. Entre la poésie urbaine de N3rdistan, la folie châabi de Hoba Hoba Spirt, la tagnaouite world music de Hassan Hakmoun, la fusion «in» de Mehdi Nassouli, les airs ghiwanis de Mohamed Derham et Omar Syad ou encore la fougue sans limite de Hamid Kasri, le Maroc et sa musique se portent à merveille. Le Maroc est toujours bien représenté à Essaouira, notamment lors du Festival Gnaoua et des musiques du monde! Mais cette 19e édition semble avoir résonné un peu plus fort. Présents sur toutes les scènes, les artistes marocains ont proposé des univers aussi riches et divers que leur royaume. Le triomphe de Hoba Hoba Spirit ! Une foule en délire, des fans avertis, le tourbillon Hoba Hoba Sprit allait encore frapper ce vendredi 13 mai à minuit trente passées sur la scène Moulay Hassan, chère à leur cœur. «On voulait vraiment jouer sur cette scène, elle est vraiment particulière, il y a une énergie particulière», confie Reda Allali, leader du groupe, qui avoue venir en famille à ce festival, un des rares festivals où il peut se permettre ce luxe. Une musique déjantée et énergique, qui puise sa source dans le Chaâbi et les rythmes populaires, occidentalisés par une bande de copains qui n'ont pas la langue dans la poche! Nul besoin de s'attarder sur leur musique, tout le monde connaît Hoba Hoba Spirit. Et le public présent ce soir-là l'a bien prouvé. En chantant à tue-tête avec le groupe, en dansant même avec lui, la foule en délire a prouvé que le groupe qui a inventé la Hayha Music était bel et bien le phénomène de toute une génération. Un concert qui a duré plus de 2h et qui restera à jamais dans les annales du festival. L'âge d'or de Derham Lors d'un concert de clôture envoûtant, Mohamed Derham, Omar Syad, Nabil Khaldi et Mustapha Baqbou ont rendu un vibrant hommage au grand dramaturge Tayeb Sadikki, en interprétant des chansons sur la perte d'un être cher, puisées dans le patrimoine de Nass El Ghiwane et Jil Jilala.«Tayeb a cassé le 4e mur du théâtre, en créant la musique théâtrale. Il l'a fait sortir du théâtre et elle a vécu. C'est la musique qu'on a essayé de porter toutes ces années». Pleins d'émotion et de générosité, les musiciens ont donné une véritable leçon de musique et de vie au public, avec des chansons qui n'ont pas pris une ride, qui continuent à parler aux nouvelles générations. «On a puisé dans le patrimoine marocain. C'est un des patrimoines les plus vastes qui soient. Nous avons un grand trésor. Nous n'avons fait que commencer quelque chose, et c'est aux jeunes de continuer. Je n'exagère pas en disant que la musique marocaine est la plus riche au monde car le Maroc est un carrefour de civilisations, entre l'Afrique, l'Europe et le Moyen-Orient. La diversité culturelle au Maroc est à cultiver, elle porte en elle les clés de nouveaux genres musicaux, encore et toujours». Des coups de cœur «maison» Entre N3rdistan, Mehdi Nassouli et Hamid Kasri, il y a un monde. Mais ce qui est beau, c'est qu'ils viennent tous du Maroc. Poétique et libre, le groupe N3rdistan a ensorcelé la plage au moyen de ses mots et de ses sons inclassables. Fraîche et universelle, la musique du groupe le plus éclectique du monde arabe est entrée dans les cœurs par la grande porte. Mehdi Nassouli, quant à lui, présente une fusion des plus gracieuses avec le groupe de barcelonaises Las Migas. Quand le Flamenco moderne rencontre la modernité de la chanson populaire marocaine, cela donne un beau moment de musique dans un toit mythique de Borj Bab Marrakech. Et du côté de la scène principale, Hassan Hakmoun et son art tagnaouite au service du monde a fait voyager. Celui qui séduit les Américains a donné sa vision du patrimoine revisité de la plus belle des manières, du oud au saxophone, accompagné de musiciens de toutes nationalités. Last but not least, Hamid El Kasri et son concert record ont clôturé un samedi plein de fougue. Le mâalem star à la voix incroyable a livré un concert d'anthologie «du haut de sa béquille», comme si la transe lui avait tout fait oublier. Le pouvoir de la musique.