Abdelaziz Arji : Expert-comptable, auditeur Commissaire aux comptes Les Inspirations ECO : Quelle nouveauté a apporté la loi de Finances 2016, en termes de TVA ? Abdelaziz Arji : La loi de Finances 2013 avait généralisé le droit de remboursement de la TVA à l'ensemble des activités ayant un crédit de TVA chronique avec l'échéancier suivant de 2014 destiné aux entreprises, dont le crédit de TVA est inférieur à 20 MDH, en 2015, 2016 et 2017. Le remboursement par tranches de 1/3 par année pour les entreprises dont le crédit est compris entre 20 MDH et 500 MDH. Ainsi, la loi de Finances 2016 a généralisé le droit de remboursement de TVA sur les biens d'investissement, même au-delà des 36 mois de la création de la société. Cela concerne les biens acquis à compter du 1er janvier 2016, à savoir les biens d'équipement le matériel et outillage, les véhicules de transport de marchandises, les véhicules de transport public ou collectif du personnel. Notons toutefois l'exclusion du matériel, mobilier de bureau et matériel de transport de personnes. À titre d'exemple, pour procéder au règlement d'une TVA mensuelle ou trimestrielle concernant 2016, on commence par déposer la TVA comme d'habitude, attendre avril et déposer la demande de remboursement avant le 30 avril. Sinon, la demande est forclose (mais le crédit de taxe demeure imputable). Il faut procéder ensuite à l'annulation de ce crédit sur la déclaration d'avril (ou du 2e trimestre). Rappelons que le délai de remboursement est fixé à 30 jours, à condition que le bien d'investissement soit éligible (pas de matériel mobilier de bureau, de voitures), que le crédit dégagé par ce bien soit annulé sur la déclaration de M+1. Sinon, l'inspecteur rejette le dossier et donne 1 mois pour rectifier. Quel rapport peut avoir la TVA avec la trésorerie de l'entreprise ? En termes de trésorerie, l'entreprise peut faire une économie de 20% du montant de l'investissement sur 3 ans, ce qui a un impact positif sur sa trésorerie. C'est une particularité maroco-marocaine. Le législateur fiscal donne de ce fait un coup de pouce à l'investisseur pour consacrer sa trésorerie à l'investissement direct au lieu de débourser la TVA puis demander le remboursement, ce qui est une gymnastique non-productive. Pourquoi l'Etat prend-il du retard à rembourser la TVA récupérable des entreprises, sachant que ces dernières pourraient être fortement impactées ? Le remboursement de la TVA est un droit du contribuable. Cependant, les moyens financiers de l'Etat dépendent de la conjoncture économique. Les recettes fiscales sont destinées au financement des projets nationaux. L'Etat doit donc gérer des priorités. Mais nous avons constaté qu'un engagement est pris et que des efforts importants sont entrepris pour contenter tantôt les grandes entreprises tantôt les PME. S'ajoutent à cette difficulté, les contraintes des ressources humaines, car le traitement des dossiers de remboursement par les inspecteurs est fastidieux et chronophage. La dématérialisation est en marche, mais elle ne concernera pas le remboursement de la TVA de sitôt. Pourquoi la TVA est-elle considérée comme étant l'impôt le plus important à régler pour l'entreprise ? La TVA est l'impôt le plus rentable pour l'Etat. Un tiers des recettes fiscales provient de la TVA. L'Etat peut transiger sur n'importe quel impôt sauf la TVA, car la doctrine considère que le contribuable est un simple intermédiaire qui encaisse la TVA pour la reverser au Trésor. Les contribuables qui considèrent que la TVA «leur appartient» l'apprennent à leur dépens : la pénalité est de 30% contre 15% pour les autres impôts. Quel quiproquo lié à la TVA peut-il naître d'une activité à vocation d'export ? Beaucoup de contribuables considèrent que la TVA n'est pas à facturer à partir du moment où le paiement est fait en devises par une société étrangère. Or, le principe de la territorialité impose la facturation de la TVA à partir du moment où la prestation est consommée sur le territoire marocain, y compris les zones maritimes marocaines. Dans quel cas les entreprises bénéficient-elles d'une exonération de TVA ? Je m'intéresse plus aux cas d'option qui sont de véritables leviers plus que les cas d'exonération de droit. C'est de cette manière qu'intervient véritablement la gestion de la TVA. Il s'agit de trois options principales, à savoir l'option pour l'exonération de la TVA sur les investissements au cours des 36 premiers mois à partir du début d'activité de l'entreprise, l'option pour la demande de remboursement de TVA, et l'option pour bénéficier du régime suspensif, qui suppose la catégorisation fiscale.