Monument du théâtre marocain et arabe, Tayeb Saddiki, qui s'est éteint le 5 février dernier, a fait l'objet d'un hommage qui lui a été rendu au théâtre Mohammed V de Rabat le mardi 29 mars. Sa pièce «Le dîner de gala» a été réadaptée par une jeune troupe, avec une mise en scène signée Ayoub El Aiassi et une interprétation pleine de fraîcheur par la jeune Selma Naguib. Son œuvre était grande, aussi grande que lui! Tayeb Saddiki aura laissé une famille du théâtre orpheline, ce 5 février 2016. Un début d'année bien triste pour le Maroc ainsi que le monde du théâtre et du cinéma, mais metteurs en scène et artistes en général se le remémorent grâce à des hommages, à des réadaptations de son œuvre unique. C'est ce qui s'est passé ce mardi 29 mars au Théâtre Mohammed V de Rabat, où le metteur en scène Ayoub El Aiassi a réadapté la pièce du maestro qu'est Le dîner de gala. C'est l'histoire de Ali Chater, metteur en scène et chef de troupe, qui organise un dîner de gala en recevant les spectres des grands auteurs du théâtre: Molière, Shakespeare, Badi' al-Zamān al-Hamadāni, Abû Hayyân al-Tawhîdî ... Il porte la cause d'un théâtre qui se voit subitement face à une décision de démolition, alors qu il est en plein devenir. Ali Chater et sa troupe ne veulent pas quitter les lieux après la dernière représentation donnée au théâtre municipal de Casablanca, qui fut réellement démoli en 1984, et dont Tayeb Sadiki fut pendant longtemps le directeur général. Celui-ci a d'ailleurs été remplacé par un parking. «Avec beaucoup de dérision, mais aussi beaucoup de colère et de tristesse, il fait ressortir le sujet de manière subtile. Ali Chater est un personnage qui semble être touché dans son amour-propre, un personnage sensible mais qui, à la fois, ne veut pas laisser transparaître sa tristesse, et utilise donc la dérision pour souligner d'importants sujets de notre société qui lui tiennent à cœur. Dans cette pièce, le metteur en scène a voulu choisir une femme, pour conférer une fragilité et une sensibilité au personnage. Mais le personnage reste mystérieux quant à son identité», confie celle qui incarne le personnage, Selma Naguib. «Ni femme, ni homme, ce personnage reste mystérieux. Il est défini par son rôle de metteur en scène uniquement. Feu Tayeb Sadiki, que je n'ai malheureusement pas eu l'occasion de rencontrer -je l'aurais tant souhaité- représente pour moi un père et un précurseur du théâtre marocain et arabe de manière plus générale. C'était un génie passionné, un homme aux multiples facettes: calligraphe, écrivain, dramaturge, metteur en scène, comédien, etc. Il a révolutionné la mise en scène du théâtre marocain en travaillant sur les formes pré-théâtrales marocaines. Il a réussi à créer une forme théâtrale singulière en faisant appel au patrimoine culturel marocain et arabe, ce qu'on retrouve typiquement dans la pièce «Al Harraz» par exemple», confie l'actrice qui en est à sa première expérience théâtrale, mais non des moindres! Lauréate d'une école de commerce et ayant fait un parcours dans l'aéronautique, Selma Naguib passait son temps à découvrir des pièces de théâtre à Paris, où elle a vécu pendant quelques années. C'est là-bas qu'elle a décidé de faire des stages de théâtre, notamment au cours Florent, pour se perfectionner. De retour à Casablanca, elle prend des cours d'improvisation, parallèlement à une carrière professionnelle dans le département commercial d'une société proposant des produits destinés aux travaux publics. «Le théâtre pour moi est synonyme de magie, magie qu'on arrive à procurer au public. Un sentiment unique de liberté. Un plaisir à pouvoir changer de personnage, à pouvoir se transformer, à vivre dans la peau d'un autre personnage sur scène». La pièce, qui mêle musique et poésie, connaît la participation d'interprètes comme Moustapha Khallili, Farid Baka, Soufiane Guerraoui et Ayoub El Aiassi qui est à l'interprétation comme à la mise en scène, avec une scénographie signée Yasmine Bouaibi, sera en tournée dans tout le Maroc très prochainement...À découvrir !