Le développement qu'ambitionne le Maroc avec l'adoption de sa nouvelle Constitution requiert des conditions ainsi qu'une une véritable dynamique d'opérationnalisation. Relever ce défi est tributaire d'une «approche nouvelle et audacieuse», où l'apport d'une implication forte et consensuelle est cruciale. En effet, un contexte particulier a accompagné l'avènement de cette Constitution, dont l'objectif est aussi de réconcilier les citoyens avec leurs institutions, de revigorer leur confiance en l'Etat. Assurément, les réformes visent l'adoption de «bonnes pratiques politiques» afin d'améliorer le rôle des institutions, de corriger les distorsions socioéconomiques et d'assurer une pérennité sociale. Ceci n'est pas sans soulever, au moins, trois questions fondamentales : avec quels partis politiques ? Avec quels acteurs efficients et quelle «gestion différenciée» de la problématique du développement ? Dès lors, les gouvernants doivent favoriser un climat assurant une mise en œuvre optimale de la nouvelle Constitution. En même temps, ils doivent annihiler les «facteurs de défiance ou de résistance», notamment ceux qui risquent de procurer le sentiment d'un «remake» politique, sans incidence effective sur la vie des citoyens. Une démarche politique inappropriée finit par atteindre la confiance en les institutions, en leur crédibilité ainsi qu'en toute aspiration au changement. Elle est, de surcroît, décriée par son incapacité à résoudre des situations endémiques, en particulier celles inhérentes à l'injustice, aux disparités sociales, à la pauvreté et au chômage. Indubitablement, perdure cet «anachronisme inhibant» des partis politiques. Il est à l'origine de la désaffection au sein de vastes segments de la population, particulièrement les jeunes. Pourtant, sans «canalisation ou engagement politique», ces jeunes forment une «bombe sociale» car dans leur retranchement politique, se créent des voies parallèles de réaction et de contestation parfois subversives. Une stratégie de sensibilisation et d'information doit être élaborée à leur attention, en vue d'améliorer leur participation à la gestion des affaires publiques. La confiance est quelque chose qui se mérite et qui ne se décrète aucunement. Par ailleurs, la finalité de développement recherchée par la nouvelle Constitution est un processus qui nécessite des compétences, une élite acquise à la volonté sincère de traduire «sur le terrain, de façon tangible, la substance» de cette Constitution. Il s'agit d'acteurs agissant passionnément pour la mobilisation de tout l'éventail social afin de renforcer la capacité du pays à s'approprier le devoir de la modernisation et du progrès. Le développement social est indissociable de son contexte humain, économique, politique et écologique. Il ne peut être envisagé dans une perspective sectorielle sans une «logique d'ensemble». De même, il reste lié à la consolidation de la paix sociale, de la liberté, de la stabilité et de l'esprit d'initiative. Il exige que les objectifs et les priorités soient orientés de manière à assurer le bien-être de tous les citoyens, à promouvoir et à renforcer les institutions et les politiques qui le favorisent. Le plan d'action de ce développement ne saurait être réduit à un certain nombre d'objectifs pris isolément: opérer à l'ajustement de l'économie, corriger les formes détériorées de la gestion publique, offrir davantage d'éducation ou dispenser plus de soins et de santé... Il devrait comporter des initiatives qui recoupent diverses politiques, divers secteurs, diverses institutions et surtout qui parviennent à l'implication de toutes les forces vives de la Nation. Cette vue du développement social, c'est-à-dire d'un processus exhaustif centré sur la création des capacités d'apprentissage, de participation et de génération de valeurs, pourrait constituer la trame du nouveau contrat socioéconomique. Assurément, le développement passe par le relèvement du bien-être de la population grâce à de multiples critères : prévalence des droits de la personne, des devoirs et des droits politiques d'équité, de solidarité sociale et de croissance,d'accessibilité des biens et des services pour tous les segments de la population. Il est clair que la croissance et l'accessibilité des biens et des services ne peuvent s'effectuer que par la croissance économique, qui est tributaire, elle-même, d'une productivité et d'une compétitivité à préserver. Accorder la priorité à l'humain, proposer un concept de développement qui repose sur le déploiement des capacités à tous les niveaux - national, régional, local et individuel -, témoigne non seulement d'une importante réorientation du «paradigme traditionnel» sur le développement, mais s'apparente également à une réorientation profonde de ce paradigme d'une manière équitable et pérenne. Cette théorie met l'accent sur le capital humain et social comme capacité d'action «citoyenne et collective» pour la démocratisation et le développement incontournables de notre pays.