C'est devenu presque une rhétorique traditionnelle. Comme à son habitude, et à chaque veille de Ramadan, le département des Affaires générales et économiques, en coordination avec les autres ministères concernés, publie son estimation relative à l'approvisionnement du marché en denrées alimentaires. Et cette année encore, pas de panique à l'horizon. Selon le ministère de l'Intérieur, «l'offre en produits alimentaires sera suffisante avec une stabilité au niveau des prix». Les données fournies par les principaux intervenants ainsi que celles établies par les services compétents au niveau des provinces et préfectures du royaume convergent vers le même avis. L'approvisionnement des marchés en produits alimentaires sera non seulement garanti mais plus, «de façon régulière et suffisante en vue de répondre aux besoins de la consommation durant le mois sacré de Ramadan». Les autorités veilleront, d'ailleurs, à assurer un suivi permanent afin de maintenir la stabilité des prix et garantir la qualité des produits. À première vue, ce qui peut ressembler à un coup d'éclat, au regard de la situation des prix au niveau national et le contexte international, peut se justifier par une conjugaison de facteurs dont la bonne récolte enregistrée cette année mais également par le biais de la providentielle Compensation, l'éternelle manière pour le gouvernement de maîtriser l'inflation des prix alimentaires. Une bonne récolte Les produits de forte consommation durant ce mois, comme les légumineuses et les produits d'élevage, sont disponibles en grande quantité et serviront à couvrir plusieurs mois de consommation. Le HCP avait déjà annoncé en début de mois une baisse de 0,4% de l'indice des prix à la consommation, au mois de juin dernier, due principalement à celle des prix des fruits de 5,6%, des légumes de 2,9% et des poissons et fruits de mer de 1,5%. Cette détente sur les prix est à imputer à l'importance de la production nationale qui serait, d'après les prévisions sur les quatre principales légumineuses et au titre de la campagne agricole 2010-2011, estimée à 3,03 millions de quintaux sur une superficie de 398.200 hectares, en dépit des dégâts causés par l'abondance des dernières précipitations. Le département d'Akhannouch s'est voulu, en tout état de cause, rassurant par rapport à l'approvisionnement du marché local durant le mois sacré, prévoyant même «une stabilité voire une baisse des prix». Pour ce qui est des céréales, les dernières données de l'ONICL arrêtées courant juillet ont fait ressortir que la collecte cumulée a atteint 12,42 millions de quintaux, dont 99,77% de blé tendre. Cette récolte jumelée à un prix de référence fixé à 258,80 DH par quintal, en baisse par rapport au dernier prix appliqué, ne peut que présager un relâchement des prix finaux. Mais pour les autres produits, la situation n'est pas aussi reluisante, surtout ceux importés. C'est le cas par exemple du thé, dont les prix à l'international continuent leur envolée, et du sucre, deux produits également très sollicités lors du mois sacré. Du coup, la facture alimentaire qui avait déjà connu une progression, cette année, de 56,9% en glissement annuel après une baisse de 4,2% en 2010, risque de s'alourdir encore un peu plus. En parallèle, les dépenses de compensation qui ont atteint, à la même période, 20,7 MMDH, en progression de 85,2% sur l'année, risquent de pâtir davantage de l'effet de la flambée des cours internationaux des matières premières. C'est le prix à payer pour maîtriser l'inflation alimentaire, dont le niveau reste, certes, l'un des plus faibles de la région, qui ne va pas sans grever les finances publiques. Haro sur la spéculation Aussi, le gouvernement s'attelle à préserver les prix à des niveaux stables. Des instructions ont été fournies aux différents services de contrôle au niveau des provinces et préfectures pour intensifier les campagnes de sensibilisation et de contrôle en vue de lutter, avec détermination et rigueur, contre toute tentative de monopole ou de spéculation, de stockage illicite ou de fraude dans la qualité des produits alimentaires. Le Ramadan s'annonce donc sous de bons auspices. La seule question, à quel coût ?