L'or a toujours été considéré comme le placement refuge par excellence en temps de crise, mais aujourd'hui, nous assistons à la baisse de son cours. Le mythe du métal jaune est-il en train de s'effondrer? Commençons d'abord par une analyse de la situation. L'année 2012 a été caractérisée par un repli des cours des métaux au niveau international, dans la lignée de la crise économique en Europe et des événements politiques au Moyen-Orient. Seul l'or a été épargné, ayant justement profité de sa position de valeur refuge. Le cours du métal jaune s'est apprécié cette année de 6% pour s'élever à 1.669 dollars l'once. Toutefois, depuis le début de l'année 2013, les cours des métaux précieux, notamment celui du métal jaune, semblent emprunter une tendance baissière. Le cours de l'or (pourtant le seul à avoir résisté en 2012) passe de 1.688,9 dollars l'once en début d'année à 1.395 l'once à fin mai 2013, soit -17,4%. Il a ainsi effacé près de deux ans de hausse. Plusieurs banques à l'international ont revu à la baisse leurs prévisions sur le métal jaune. Est-ce la fin d'un mythe? Le prix doublera sur deux ans Selon le trader Mostafa Belkhayat, il faut faire, d'abord, la différence entre l'or papier et l'or physique. «La dernière baisse de l'or concerne l'or papier, tandis que l'or physique a immédiatement réagi pour profiter de l'aubaine à bon compte», nous explique le spécialiste marocain de l'or. Il ajoute: «les causes de cette baisse sont multiples. La moins connue est que les autorités américaines cherchent à manipuler le marché de l'or pour tirer le prix vers le bas, parce que l'or est de plus en plus le concurrent direct du dollar dans les réserves de change des banques centrales». Toutefois, il ne sera plus possible de manipuler l'or de cette façon à partir de septembre 2013. Selon le trader, l'Inde et la Chine sont en train de constituer des stocks importants d'or physique. La conclusion est donc que le potentiel de hausse de l'or est considérable. «On peut s'attendre à ce que le prix de l'or double les deux prochaines années», souligne d'emblée Belkhayat. Toutes les devises dans le monde vont baisser par rapport à l'or. Concernant les matières premières, on devrait assister à un retour des prix élevés du blé, du café et sucre. Comment doit-on alors se positionner ? «Les investisseurs doivent d'abord comprendre la puissance de l'or dans le monde financier. Tout portefeuille, privé ou institutionnel doit contenir au moins 15% d'or, mais surtout pas d'or papier, uniquement de l'or physique», affirme le trader. Dans ce contexte, les minières cotées pourraient-elles être également considérées comme des valeurs intéressantes? Si les perspectives de l'or sont prometteuses, celles de nos minières le sont moins, et pour cause: les sociétés minières cotées à la bour se de Casablanca ne sont pas uniquement dédiées à l'extraction de l'or, mais également à d'autres métaux. Dans cette lignée, les cours des métaux de base affichent également un trend baissier depuis janvier 2013, suite notamment au ralentissement de la croissance chinoise, un des principaux clients de ce type de minerais. Durant les mois à venir, «il sera difficile de prévoir l'évolution des cours des métaux de base et des métaux précieux au niveau international compte tenu de la forte volatilité constatée ces dernières années. Néanmoins, certains signes laissent présager une éventuelle hausse des cours du zinc et du plomb, dans le sillage de la reprise de l'activité automobile au Japon, fortement consommatrice de ces minerais», expliquent les analystes de BMCE Capital. Les minières influencées par la baisse des métaux Dans ce contexte difficile et à périmètre constant, «les sociétés cotées pourraient subir l'impact de ce repli des cours au niveau international, hors intégration de nouveaux projets et d'augmentation des capacités de production», prévoient-ils. Si pour CMT (Compagnie Minière Touissit), ils estiment que la société devrait capitaliser sur sa politique de couverture favorable (selon son top management), avec une production couverte à hauteur de 56% à des niveaux avantageux. SMI et Managem devraient voir la progression de leur revenus atténuée par cette situation, en dépit de l'impact positif de la hausse de la production en 2013, et de la neutralisation du portefeuille de couverture défavorable vers la fin de la même année. En conséquence, les analystes de BMCE Capital recommandent le titre CMT à l'achat, compte tenu d'un cours cible de 2.392 dirhams. En revanche, et eu égard à la forte contraction du cours de l'argent depuis le début de l'année, ils prévoient de revoir à la baisse leurs prévisions pour SMI, ce qui aura un impact sur sa valorisation, ainsi que celle de Managem. Point de vue Eric Benabou Propriétaire de la bijouterie joaillerie Madd. Les prix publics sont toujours en hausse Les prix de l'or ont continué à augmenter depuis le début d'année. Il y a eu certes une légère baisse des cours du métal jaune durant le mois d'avril, mais cela ne s'est pas fait sentir sur les prix de vente et à raison. Les vendeurs préfèrent arrêter leur activité en période de baisse en attendant des jours meilleurs. De toutes les manières, quand vous allez chez un vendeur pour acheter en période de baisse, il vous dira que l'or qu'il vous vend a été acheté un ou deux mois avant, quand ce dernier valait le prix fort. En conséquence, les prix publics sont toujours en hausse. Par contre, la situation est inversée quand les clients essaient de revendre leur or, un besoin en liquidités se faisant sentir. En effet, il y a un écart entre le prix de vente et celui de l'achat. Cet écart s'explique par le coût du façonnage, ainsi que par la marge du bijoutier. L'or contenu dans les bijoux qui sont fondus pour que l'on puisse ensuite en créer de nouveaux subit une dépréciation, notamment à cause des impuretés qu'il peut contenir. À cela, il faut ajouter le prix de la main-d'œuvre et la marge du bijoutier. Toutefois, les prix de rachat varient selon l'enseigne à laquelle on s'adresse. Si le prix offert aux particuliers est de 250 dirhams le gramme pour les bijoux réservés à la «casse», il va jusqu'à 300 voire 350 dirhams pour ceux destinés à être revendus en l'état. En effet, certains bijoutiers se contentent de restaurer et revendre le bijou acheté à leurs clients et empocher une plus-value. Dans cette situation là, ces derniers peuvent proposer des prix de rachat plus intéressants. Dans ce contexte, la revente est rentable seulement pour les bijoux achetés il y a 10 ou 20 ans, quand le gramme de l'or valait moins de 150 dirhams. Ces derniers recèlent une plus-value potentielle de 100% à 150% !