Le nouvel arrêt des pluies correspond à la phase critique de formation et de remplissage (grossissement) des grains Les cultures de printemps (maïs, pois chiche) sont mal parties. L'agriculture marocaine s'achemine, cette année, vers une campagne médiocre. Et pour cause, les cultures ont subi toutes sortes d'aléas climatiques : froid, retard des pluies et dernièrement vague de chaleur avec évapotranspiration intense affectant les réserves en eau du sol et l'état général des cultures. En irrigué, cependant, les variations climatiques ont moins d'impact direct que sur les cultures bour, même si la pluie a des effets bénéfiques. Le cumul pluviométrique national n'a pas changé depuis les dernières pluies (plus d'un mois). Au 4 avril 2005, il était de 224 mm contre 294 pour une année normale, soit un déficit moyen de 31 %. Concernant l'état végétatif dominant des cultures, les différentes régions de production sont réparties, d'après les estimations du ministère de l'Agriculture, en trois zones : environ 50 % des emblavements en zone bour sont dans un état satisfaisant. Cette situation concerne, entre autres, la haute Chaouia, le Zaër, le Pré-Rif, le Gharb et le Loukkos. Sont dans un état moyen (30 %) les parties bour de Doukkala et Tadla, le Souss, Abda, Chiadma et le nord-est. La basse Chaouia, le Haouz, Rhamna, Hmar (20 % des emblavements) sont pour leur part affectées. L'évolution de la situation dépendra des pluies d'avril qui feront que les régions pourront basculer du satisfaisant vers le moyen ou affecté, ou le contraire. Céréales d'automne Avec 4,9 millions d'ha, dont environ 400 000 irrigués (8 %), elles représentent autour de 95 % des céréales cultivées annuellement. D'après les producteurs céréaliers, les semis tardifs et les champs de qualité moyenne ou médiocre sont perdus. Les semis précoces de blé ont le mieux profité des dernières précipitations. Les champs ayant bénéficié de soins appropriés (bonne préparation du sol, engrais, désherbage…) sont encore dans un état satisfaisant et pourront donner un bon rendement en cas de précipitations dans les jours à venir. Ces cultures risquent toutefois d'être affectées par l'échaudage (arrêt de la croissance du grain). Deux périodes sont considérées comme critiques : la levée et la période de formation et de remplissage (grossissement) des grains, qui est le stade actuellement dominant. Légumineuses d'automne La fève occupe 170 000 ha, les lentilles 70 000 et le petit pois 60 000. Certaines variétés précoces de lentilles sont presque arrivées à maturité. En général, pour les légumineuses, la sécheresse, comme l'excès d'eau, sont néfastes. Elles ont aussi souffert du froid et du manque de pluies et leur floraison a coïncidé avec un état végétatif faible à moyen, une période sèche et de fortes chaleurs. Maïs Avec 190 000 ha, dont 5 000 irrigués, contre 185 000 ha la campagne précédente, il est surtout cultivé en zone côtière et il bénéficie de l'humidité de l'air et quelquefois du brouillard lui permettant de mieux résister au retard des pluies. Légumineuses de printemps Les semis de pois chiche ont atteint 50 000 ha, soit une baisse de 20 % par rapport à la campagne précédente. Leurs besoins en eau sont plus réduits que les céréales d'automne et les autres légumineuses et peuvent résister à de longues périodes sèches. Pomme de terre Actuellement, la production est importante malgré les dégâts dus au gel. Les champs en culture bénéficient de conditions climatiques très favorables : l'absence de précipitations préserve les parties aériennes (tiges, feuilles) de la plante. En effet, les températures élevées et le climat sec font qu'il n'y a pratiquement pas de maladies cryptogamiques (mildiou, alternaria …). Les agriculteurs se limitent à des traitements préventifs. Ceci laisse présager de bons rendements et probablement une baisse des prix au producteur plus prononcée que les autres années. Fraise C'est une année difficile pour les producteurs. Après les dégâts dus au froid, la production a repris. Les fortes chaleurs et l'arrivée à maturité groupée de plusieurs bouquets (accumulation) ont entraîné une inondation du marché intérieur au moment où les prix sur le marché extérieur ne sont pas très encourageants. De même, l'abondance de la production printanière provoque une ruée sur le surgelé : les stations produisent et stockent en attendant la commercialisation. Melon sous abri Entrée en production dans le Souss et la région de Marrakech. Les dégâts dus au gel ont été plus limités que ce qu'on craignait, surtout sous grands abris. Cependant, la qualité n'est pas encore au rendez-vous. Il faudra attendre la mi-avril pour qu'elle s'améliore. Primeurs Les dernières fortes températures n'ont pas eu d'effets notables. En revanche, le gel a entraîné une détérioration de la qualité de la tomate qui présente des déformations sur 2 à 3 bouquets. Pour les courgettes, les prix à l'export sont très bas à cause de l'entrée en application des droits d'entrée. Le haricot vert continue d'être exporté malgré la baisse des prix. Arboriculture Le départ de végétation pour le pommier et la floraison pour le pêcher, l'amandier tardif et le pommier précoce sont les stades actuellement prédominants. Le principal problème est d'ordre commercial. En effet, dans le cadre des accords de libre-échange avec l'UE, des licences ont été délivrées pour l'importation de 2 000 tonnes de pommes pour le mois d'avril. Pour le moment, on s'interroge sur la nature des produits que vont importer les bénéficiaires de ces licences et leur effet sur le marché, sachant que les frigos sont encore pleins de stocks. Pour l'olivier, après une production record en 2003 et une année d'alternance en 2004, une deuxième campagne de moyenne à basse production s'annonce (floraison réduite, faible pluviométrie, etc.). Agrumes La période actuelle correspond au départ de la végétation et à la floraison. Le problème est que les dernières chaleurs ont favorisé le développement des parasites (cochenilles, mineuses…). D'après My Abdallah Alami, vice-président de l'ASPAM (Association des producteurs d'agrumes du Maroc), les dégâts du gel sont très importants et, rien que pour la région de Béni Mellal, ils ont été évalués à 60 MDH pour la production de cette année. Quant aux séquelles sur l'arbre, elles sont difficiles à évaluer et les agriculteurs doivent utiliser des régulateurs de croissance et autres produits pour aider les arbres dans leur développement. Les produits sont toutefois très chers, surtout pour des producteurs déjà éprouvés.