Abdelilah Benkirane se réunira avec les transporteurs après les élections pour trouver une issue au blocage. Pour le ministre délégué chargé du transport, la réforme est toujours une priorité et elle sera bel et bien mise en Å"uvre. Le chef du gouvernement va se saisir personnellement du dossier de la réforme du transport de voyageurs. M.Benkirane devrait programmer une réunion dans quelques semaines avec les transporteurs et les différents ministères impliqués dans ce secteur pour trouver une solution au blocage qu'a connu le dossier depuis le début de l'année. C'est ce que nous a confié Mohamed Najib Boulif, ministre délégué en charge du secteur du transport. Depuis plusieurs mois, les transporteurs avouent ne pas avoir de la visibilité sur le sort que compte réserver la tutelle au projet de réforme, qui a été bloqué suite au refus des professionnels de signer le contrat programme en décembre 2014. «Nous avions fait des propositions en avril dernier pour débloquer la situation et elles ont été plutôt bien accueillies par les services du ministère. Nous devions en discuter après, lors de réunions qui n'ont finalement pas eu lieu», explique Abdelillah Hifdi, président de la Fédération du transport routier affiliée à la CGEM. Même son de cloche auprès de plusieurs transporteurs que nous avons sondés, dont beaucoup considèrent que cette réforme «pourrait finalement ne jamais avoir lieu. Du moins, pas durant le mandat du gouvernement actuel qui se termine, pour rappel, en 2016», confie l'un d'eux. En fait, il semblerait que le dossier est toujours considéré comme une priorité par les pouvoirs publics. «Nous nous étions déjà réunis il y a quelques mois avec le chef du gouvernement et d'autres départements ministériels. Nous nous sommes mis d'accord avec lui que la réforme est une nécessité et qu'elle sera bel et bien mise en œuvre», explique le ministre en charge du transport qui ajoute que «le chef du gouvernement avait conditionné le lancement de la réforme par une rencontre qu'il aura en personne avec les professionnels». Cette réunion devait en principe avoir lieu durant le mois de juillet. Pour des raisons liées aux agendas chargés relatifs aux élections, Abdelillah Benkirane aurait finalement appelé le ministère en charge du transport à reporter la rencontre avec les professionnels pour après élections. Ces dernières devant avoir lieu ce vendredi 4 septembre, le dossier de la réforme du transport de voyageurs devrait donc immédiatement être remis sur la table. Les intérêts diffèrent d'un transporteur à l'autre Il reste maintenant à savoir sur quels arguments s'appuiera le chef du gouvernement pour convaincre les transporteurs. Il faut bien souligner à ce niveau que tous n'adoptent pas forcément la même position. «Malheureusement, au sein de ce secteur, même les professionnels ne sont pas d'accord entre eux», martèle un transporteur. Cet avis est également partagé par Mohamed Najib Boulif. «Il y a des transporteurs qui ont vraiment de bonnes intentions. Mais il y en a aussi qui n'ont pas forcément envie de voir la réforme émerger. A un certain moment, cette frange a dépassé les limites et a même eu recours aux mensonges pour bloquer la réforme», confie le ministre délégué . En fait, le problème dans le secteur, comme l'expliquent les transporteurs eux-mêmes, c'est qu'il existe plusieurs catégories de professionnels dont les intérêts divergent complètement. Un professionnel qui est exploitant d'agréments appartenant à un tiers ne défend pas les intérêts des détenteurs d'agréments qui se contentent de les louer. Il en est de même pour ceux qui ont à la fois des agréments et sont des exploitants et qui se retrouvent entre les deux parties. Du coup, chacun tire la couverture de son côté, provoquant ainsi une divergence de positions face à la proposition de réforme faite par les pouvoirs publics. Il serait néanmoins injuste de tout mettre sur le dos des transporteurs car, il faut bien le reconnaître, les pouvoirs publics ont également leur part dans ce blocage. «La soi-disant réforme a été entamée par la diffusion des listes des détenteurs d'agréments et toute la polémique qui s'en est suivie. Pour rassurer les transporteurs, le gouvernement avait proposé un projet de rachat des agréments lors de la Loi de finances 2014 pour enfin introduire le système des autorisations. Une fois ce projet refusé par le Parlement, cela a créé un climat de tensions entre les professionnels du transport et le gouvernement», explique un membre de la Fédération du transport. Défaut de communication ? En fait, pour une partie des transporteurs, le dossier de la réforme a été mal géré sur le plan de la communication vu que l'on a promis aux détenteurs d'agréments une contrepartie financière s'ils n'exploitent pas par eux-mêmes leur titre, avant de se rétracter. Ceci aurait poussé plusieurs d'entre eux à faire de ce point une condition sine qua non pour accepter le projet de réforme, chose qui est complètement exclue aujourd'hui par le gouvernement. «L'Etat ne peut pas donner de l'argent en contrepartie des agréments. C'est une question purement commerciale entre les détenteurs d'agréments et ceux qui les exploitent et l'Etat ne peut y intervenir financièrement», insiste le ministre. Il reste juste à savoir si ce dernier, ainsi que les autres membres du gouvernement impliqués dans la réforme, accepteront de faire des concessions au niveau de la période de transition accordée à ces transporteurs pour conclure justement ces accords et devenir ainsi éligibles au nouveau système des autorisations d'exploitation qui sera introduit par le contrat programme. Initialement, le gouvernement proposait une année à compter du 1er janvier 2015. Dans ses propositions, la Fédération du transport affiliée à la CGEM sollicitait 5 ans à partir d'avril 2015, une période qui se réduit aujourd'hui à quatre ans vu que près d'un semestre s'est déjà écoulé depuis que la proposition a été faite. C'est là un joker entre les mains des pouvoirs publics puisqu'en adhérant à la proposition des professionnels, ils parviendront à faire adhérer plus de transporteurs à la réforme proposée. L'utiliseront-ils ? Rien n'est sûr. Ce qui l'est en revanche, c'est qu'«il faudra se mettre d'accord sur le système alternatif aux agréments pour débloquer la situation», reconnaît le ministre délégué chargé du transport. En attendant, le ministre annonce que certaines dispositions prévues dans le cadre de la réforme et qui n'ont pas de lien avec le système des agréments devront être mises en place pendant les quatre mois restant de 2015. Il s'agit par exemple de l'obligation du port de la ceinture de sécurité dans les autocars qui deviendra bientôt une obligation.