Maroc-Pérou : Un accord signé portant sur des enjeux politiques et sociaux    Le CG examine la formation aux métiers du transport à Nouaceur    31e commémoration du génocide contre les Tutsi : Un hommage à la mémoire et un appel à l'unité et à la paix    Le Maroc, pionnier de la parité en diplomatie    Traitement des déchets à Kénitra : Un appel d'offres controversé pousse le PJD à interpeller Laftit    Sahara: L'agence espagnole de la météorologie publie la carte complète du Maroc    Bruxelles lorgne le Maroc pour le retour des migrants en situation irrégulière    Sahara : La diplomatie russe reçoit les ambassadeurs marocain et algérien    Le Mexique n'exclut pas d'imposer des droits de douane de rétorsion contre les Etats-Unis    GITEX AFRICA 2025 : le VILLAGE APEBI, vitrine de l'innovation numérique marocaine    Bourse de Casablanca : ouverture en territoire positif    Global money week : l'ACAPS initie les jeunes à la prévoyance sociale    Levée de fonds : PayTic obtient 4 M$ pour transformer la gestion des paiements    Zellige, tanneries, métiers... La région de Fès-Meknès met le paquet sur l'artisanat    Sécurité aérienne: Abdessamad Kayouh s'entretient à Marrakech avec le président du Conseil de l'OACI    JYSK, concurrent d'Ikea, ouvrira le jeudi 10 avril à Casablanca    Etats-Unis-Maroc : Nasser Bourita reçu à Washington par Marco Rubio    Mozambique. Les drones au service de la gestion des catastrophes    L'Algérie accusée de vouloir annexer le nord du Mali    Etats-Unis : Nasser Bourita sera reçu par Marco Rubio à Washington    L'Algérie réplique au rappel des ambassadeurs du Mali, Niger et Burkina    Rallye Aicha des Gazelles : Dacia Maroc mise sur ses talents féminins et sur son nouveau Duster    LdC : Le Real Madrid de Diaz face à Arsenal, duel entre le Bayern et l'Inter    "Un grand frère et un grand joueur" : Bilal El Khannouss dithyrambique sur Ziyech    Wydad-Raja : La date et l'heure du derby casablancais dévoilées    Marathon des Sables 2025 : Mohamed El Morabity frappe fort lors de la 3è étape    DGAPR : Fin de l'introduction des paniers de provisions après des cas de trafic    Le temps qu'il fera ce mardi 8 avril 2025    Les températures attendues ce mardi 8 avril 2025    Algerian army completes airbase 70 km from Morocco    Espagne : Des ravisseurs exigent une rançon à la famille d'un migrant marocain enlevé    Morocco FM Nasser Bourita to meet with US counterpart Marco Rubio in Washington    Parution : Abdelhak Najib signe des «Réflexions sur le cinéma marocain»    Escapades printanières : Le Maroc, destination incontournable des Français    Industrie du cinéma : 667.000 $ pour 29 festivals    Siel : 775 exposants pour la 30e édition    Tanger : le Festival du printemps local revient en force    L'Algérie a fini la construction d'une base aérienne près du Maroc    Festival du livre de Paris : Les rencontres incontournables avec les auteurs marocains    Coupe du Monde des Clubs 2025 : Yassine Bounou exprime sa fierté de représenter Al Hilal face au Real Madrid    Cinéma : "Louise Violet", une institutrice dans la France rurale du XIXe siècle    Le Mali réplique fermement en fermant son espace aérien à l'Algérie en protestation contre son soutien au terrorisme    L'Algérie perd la tête et continue de souffrir du "syndrome de la diarrhée chronique des communiqués"    Le régime de Tebboune vit dans l'isolement... L'Algérie ferme son espace aérien au Mali    Maâti Monjib interdit de quitter le territoire : une mesure strictement judiciaire liée à une enquête pour blanchiment de capitaux    Plus de 100.000 titres à découvrir au SIEL 2025    CAN U17: le Maroc croise l'Afrique du sud en quart de finale    Soins prénatals : Lancement d'une campagne nationale de communication    







Merci d'avoir signalé!
Cette image sera automatiquement bloquée après qu'elle soit signalée par plusieurs personnes.



La poésie comme héritage
Publié dans La Vie éco le 04 - 06 - 2015

la poésie, au-delà de ce qu'elle a toujours représenté, au-delà de sa beauté et du plaisir de lire qu'elle procure, a d'abord une valeur hautement civilisatrice qui nous manque tant par ces temps troubles et obscurs
L'éducation est conservatrice par essence, selon Hannah Arendt, car elle fait entrer une jeune génération dans un monde plus vieux qu'elle. Tout ce qu'on apprend relève du passé, toute connaissance, tout savoir, a été connu et su par les hommes de temps révolus. Comment dès lors, apprendre à vivre le monde d'aujourd'hui auprès de gens morts il y a longtemps ? Tel est certainement la question et aussi le paradoxe de tout héritage laissé sans avoir désigné les héritiers. Dans la préface de son ouvrage, La crise de la culture, Hannah Arendt cite d'emblée cet aphorisme de René Char: «Notre héritage n'a été précédé d'aucun testament».
En moins de dix mots le poète a résumé le propos sans donner la moindre explication savante, ni encore moins formulé de propositions concrètes. Ainsi sont les poètes lorsqu'en une formule lapidaire ils illuminent et éclairent d'une étincelle fulgurante toute la pensée souvent aride du philosophe. Telle est aussi la gloire des poètes. Mais qui les entend chanter ou déplorer les choses de la vie ? Qui les perçoit entre le déferlement des discours, le flot discontinu des informations et le flux et reflux incessant des idées derrière lesquelles se construisent des idéologies tonitruantes qui mènent les foules. Le poète est un cœur solitaire et un chasseur solidaire des mots et des choses de la vie. Il est le songeur des songes, comme disait Saint-John Perse, qui «écoute monter en lui l'autorité du songe». C'est dans l'art des mots que le réel se met à signifier ; et si parfois tout le monde regarde ce qu'il regarde, comme dirait Chateaubriand, «personne ne voit ce que je vois».
On sait que ni les philosophes, Platon en tête, ni les religions et leurs Prophètes n'appréciaient les poètes, quand ils ne les combattaient pas. Seuls les princes et les puissants cherchaient leurs éloges et appréciaient leurs panégyriques. Ils les voulaient hagiographes laudateurs tressant des lauriers en de longs poèmes épiques onctueusement dithyrambiques. Nous avons dans le patrimoine poétique arabe des pages d'anthologie dans ce registre où le sublime, même dans le panégyrique, frise le sublime. Exaltée, belliqueuse, parodique ou courtoise, cette poésie, avant et après l'avènement de l'Islam, a démontré la puissance de son autorité et la grandeur de son imaginaire. En des temps plus récents, des poètes ont pris en charge des questions sociales et mis leurs mots et leurs métaphores au service de la cause du peuple.
Poètes engagés, forcément à gauche, ces poètes partout à travers le monde ont pris part à des combats d'idées et cru au pouvoir des mots face à la puissance des gouvernants. Opposants autoproclamés contre des puissants faussement acclamés, ils ont ferraillé avec des mots pour seules armes et cru parler à la place d'un peuple dépourvu de mots, sans rime, sans parole et sans espoir. Mais le poète, ce colibri solidaire, demeure malgré tout un cœur solitaire. Alors, faut-il en conclure en se demandant comme Paul Verlaine : «O qui dira les torts de la rime ? Quel enfant sourd ou quel nègre fou/ Nous a forgé ce bijou d'un sou/ Qui sonne creux et faux sous la lime ?» Et Verlaine de mettre fin à son poème avec ce constat mal compris et source d'une formule qui a alimenté un vaste malentendu : «Et tout le reste est littérature». Ce malentendu a été entretenu par des béotiens pour qui l'essentiel est ce qu'ils disent ou pensent et que le reste n'est que littérature et autant en emporte le vent… Un autre grand poète, Victor Hugo, engagé dans tant de causes et qui le paya au prix de l'exil et de moult persécutions, a écrit (désabusé à cause de ses problèmes politiques avec l'avènement de la République en 1848) : «J'ai fait ce que j'ai pu ; j'ai servi, j'ai veillé,/Et j'ai vu bien souvent qu'on riait de ma peine./Je mes suis étonné d'être un objet de haine,/Ayant beaucoup souffert et beaucoup travaillé». (Extrait de : Veni, vidi, vixi : je suis venu, j'ai vu, j'ai vécu).
Ainsi donc, parti au départ de cette chronique d'un aphorisme du poète de René Char cité au début du livre bien pensé de Hannah Arendt sur la «crise de la culture», nous voilà rassurés qu'un esprit aussi rationaliste que le philosophe, ait recours à la poésie dès l'incipit de son ouvrage. Mais de là à répéter, comme le chantait Jean Ferrat, que les poètes ont toujours raison… Non, la raison n'a rien à voir avec la poésie. Cependant, lorsque la pensée se montre impuissante à dire ou à voir les choses, la poésie le voit et le dit. «Tout ce qui reste, la poésie le fonde», disait le philosophe et poète allemand Hölderlin. Elle «est dans ce regard, écrit Pierre Reverdy, qui assure la souveraineté de l'homme sur les choses de la création». Enfin, la poésie, au-delà de ce qu'elle a toujours représenté, au-delà de sa beauté et du plaisir de lire qu'elle procure, a d'abord une valeur hautement civilisatrice qui nous manque tant par ces temps troubles et obscurs.


Cliquez ici pour lire l'article depuis sa source.