Les 13 et 14 avril, le public rbati a fait la connaissance de «Rigoletto», un opéra de Verdi produit par l'Orchestre Philharmonique du Maroc. Si vous n'avez encore jamais vu un opéra, il vous sera bon de savoir que l'Orchestre Philharmonique du Maroc produit chaque année son propre opéra… et pas des moindres. En partenariat avec des compagnies internationales et des maestros venus d'ailleurs, l'OPM adapte, pour le public marocain, les plus beaux classiques du genre. Cette année, les choristes du Teatro di Milano sont venus jouer Rigoletto, opéra de l'illustre Verdi, inspiré d'un drame de Victor Hugo. Du rire aux larmes Ce qu'il faut savoir sur l'opéra en question, c'est qu'il fut censuré et interdit en son temps. Mettant à nu les dérives d'un système, ce fut l'une de ces créations subversives qui ont attisé l'indignation du peuple envers la classe gouvernante. Et bien qu'elle semble aujourd'hui désuète par rapport aux valeurs actuelles, la replacer dans son contexte permet d'en saisir la portée philosophique et politique. Pour faire un dessin, c'est l'histoire d'un bouffon dans la cour du duc, bossu et laid et dont le devoir est de rire de tout, tout le temps. Tâche à laquelle il s'attelle avec malice et perfidie. Tout le monde y passe et ses ennemis sont ceux-là mêmes qui rient de ses farces. Le jour où l'orgie du Duc est interrompue par un père à qui on a enlevé une jeune vierge, le bouffon se précipite sur le malheureux pour sourdre son fiel. Ne pouvant lutter contre leur pouvoir, le pauvre père maudit le Duc, sa cour et son bouffon. Et c'est une descente aux enfers pour ce Rigoletto qui n'en revient pas d'être maudit par un homme bon et démuni. Lui qui n'a le droit qu'au rire, s'adonne aux larmes les plus chaudes, cède à la terreur noire de voir s'exaucer la malédiction. Et pour cause. Rigoletto a un secret bien gardé des yeux de tous : sa fille Gilda qui ne restera pas longtemps à l'abri de la convoitise du duc et de sa cour. Pendant tout l'opéra, vous êtes ballottés entre rires et angoisses, jusqu'à la chute macabre où Gilda se sacrifie pour mourir à la place de son Duc. Meurtre commandité par son père… Dramatique et long, mais excellemment bien joué. L'opéra depuis 2000 Si l'opéra reste un art largement méconnu du public marocain, la salle archi comble du théâtre Mohammed V de Rabat gardera longtemps l'écho de l'ovation faite à la troupe italienne venue se produire aux côtés de musiciens, chanteurs et danseurs marocains. Le chœur du Teatro di Milano et les Voix du Maroc se sont unis à merveille dans une mise en scène de Jean-Marc Biskup. L'Orchestre Philharmonique du Maroc a suivi la baguette du chef Benoît Girault… sans le moindre bémol ! Bien au delà, la prestation de l'OPM n'avait absolument rien à envier aux grandes représentations du genre dans le monde. C'est que l'OPM n'en est pas à ses premiers opéras. Il faut savoir que depuis l'an 2000, l'Orchestre philharmonique s'attache à produire annuellement un opéra. Ainsi, il a produit plusieurs grands opéras, en collaboration avec la compagnie nationale française «Opéra éclaté». À savoir Rigoletto en 2005, l'Enlèvement au Sérail en 2006, Carmen en 2007, Le Barbier de Séville en 2008, Les Noces de Figaro en 2009 et La Flûte enchantée en 2010. À partir de 2011, l'Orchestre Philharmonique du Maroc a produit ses propres opéras tels que Tosca en 2011, La Bohème en 2012, La Traviata en 2013 et Don Giovanni en 2014. De ce fait, l'OPM participe sans doute à cultiver le goût pour cet art majestueux qui non seulement donne une deuxième vie à la musique classique et aux grands textes, mais perpétue la tradition du théâtre chanté par des voix de grande qualité. Cette action prend tout son sens dans le cadre de son engagement pédagogique au sein des écoles. En effet, avant chaque opéra, l'OPM forme des enfants dans des écoles dans le but de leur donner les clés d'écoute d'une œuvre lyrique. Une activité qui séduit de plus en plus d'enfants et de jeunes chaque année.