Le patronat a soumis une nouvelle liste d'amendements au gouvernement. Il veut faire adopter un taux de pénalité uniforme pour le public et le privé compris entre 6 et 7%. Selon le nouveau texte, la pénalité de retard n'est passible d'impôt qu'une fois encaissée et le délai court à partir de la première fin de mois après date de facture. Un an après son entrée en vigueur, la loi sur les délais de paiement reste lettre morte. Selon la majorité des opérateurs, le texte actuel, «adopté dans la précipitation», pèche toujours par l'inapplicabilité de plusieurs de ses dispositions et l'impertinence de certaines d'un point de vue économique. Pour rectifier le tir et ainsi accéder aux demandes des entreprises, la Confédération générale des entreprises du Maroc (CGEM) vient de remettre une énième liste d'amendements au ministre délégué auprès du ministre de l'économie et des finances, chargé du budget. «Nous avons veillé dans le cadre de la plateforme gouvernement-commission CGEM à changer, clarifier et compléter les dispositions qui font toujours que cette loi structurante pour le tissu économique n'est pas encore prise au sérieux. Concrètement, nous avons soumis au gouvernement une liste qui récapitule les amendements majeurs», déclare Salaheddine Kadmiri, vice-président de la confédération. En premier lieu, il y a l'imposition de la pénalité une fois comptabilisée dans les livres de l'entreprise créditrice. Dans la mouture actuelle, la pénalité de retard, qui doit être observée obligatoirement, est passible d'impôt dès son enregistrement, ce qui représente une double peine pour l'entreprise pâtissant déjà de l'incidence du retard de paiement. «Logiquement, nous avons demandé à ce que l'imposition soit levée jusqu'à encaissement du produit de la pénalité», précise M. Kadmiri. Cet amendement a eu l'accord officieux de plusieurs parties dont Mohamed Boussaid, ministre de l'économie et des finances, et la Direction générale des impôts (DGI), selon des sources proches du dossier. La CGEM et l'Exécutif d'accord sur l'ensemble des amendements En deuxième lieu, figure le point houleux du taux retenu pour les pénalités de retard. A cet égard, il convient de rappeler que la CGEM a introduit une demande auprès du Secrétariat général du gouvernement pour délimiter clairement le périmètre des établissements concernés par la loi avant de décider de ne présenter aucun des amendements. Et pour cause, «le SGG nous a affirmé que la loi 32-10 s'applique aux établissements publics au même titre que les privés», explique M. Kadmiri. Dans la version actuelle, les taux de pénalité sont de 10% pour les privés et établissements publics et de 3% pour les ministères. «Nous nous sommes mis d'accord avec le gouvernement pour revoir le taux des établissements publics, qui représentent le gros de la commande publique vu que les ministères leur délèguent généralement les marchés. Ainsi, nous avons convergé vers une fourchette de 6 à 7%, de manière à ce que l'applicabilité de la loi ne soit pas compromise et en même temps pour que les taux restent persuasifs et au-dessus des taux du crédit bancaire», explique le vice-président de la CGEM. Cela dit, le patronat insiste sur la nécessité d'uniformiser le taux de pénalité ainsi que sur l'importance pour les établissements étatiques d'honorer leurs factures à temps au même titre que les opérateurs privés. Le troisième point porte sur la date à partir de laquelle le délai de paiement légal commence à courir. La proposition du patronat est de retenir la première fin du mois après la facturation pour avoir un référentiel pratique aux délais de paiement dans les livres de l'entreprise, notamment pour celles qui livrent quotidiennement. Le texte actuel stipule que le délai commence à courir à partir de la date de facturation effective. La CGEM et le gouvernement se sont mis d'accord sur l'ensemble de ces amendements. «Nous avons eu un très bon retour sur l'ensemble des dispositions qui nous paraissaient impertinentes», se félicite M. Kadmiri. Le gouvernement promet des mesures pour chaque cas (loi, décrets, circulaires) dès avril. Par ailleurs, les membres du patronat ont tenu à sensibiliser aux artifices qui peuvent être employés par les entreprises pour contourner la loi en décalant au maximum les dates justifiant les livraisons. Par exemple, pour les marchandises et prestations subordonnées à un PV de réception, vu qu'il y a des opérateurs qui vont user de subterfuges pour décaler au maximum les dates de réception, il a été prévu un délai au-delà duquel les intérêts commencent à tomber. «Ces points vont faire en sorte que l'esprit de la loi ne se perde pas à cause de pratiques malsaines», résume M. Kadmiri.