L'enchantement constaté suite à l'adoption de la loi sur les délais de paiement n'a pas duré longtemps. La Confédération générale des entreprises du Maroc (CGEM), qui avait annoncé avoir obtenu gain de cause auprès du gouvernement en réduisant les délais de paiement avec un taux de pénalité dissuasif, revient aujourd'hui avec un ensemble de reproches et de critiques à ladite loi qui, paraît-il, pose plus de problèmes qu'elle n'en résout. La commission PME de la CGEM a tenu, mardi 22 janvier, une rencontre intramuros en partenariat avec les commissions fiscalité et juridique et l'Ordre des experts-comptables pour apporter des clarifications à ce sujet au niveau des secteurs privé et public. Attendue depuis plusieurs mois, l'adoption du projet de loi 32-10 sur les délais de paiement complétant la loi 15-95 relative au code du commerce a largement été applaudie et a donné naissance à des espoirs pour un assainissement effectif du climat des affaires. Or, l'on est surpris aujourd'hui que cette loi «salvatrice» de l'asphyxie dans laquelle baignent les PME est largement critiquée par le milieu des affaires. Il s'agirait, pour le président de la Fédération de la chimie et de la parachimie, d'un texte «qui rend obligatoire la perception de pénalités en cas de retard de paiement. Non seulement on n'est pas payés par nos clients dans les délais établis mais nous sommes dans la contrainte de verser ces pénalités à l'Etat». Ce qui inquiète clairement l'ensemble des opérateurs demeure le fait que l'Etat semble ne pas être concerné par cette loi. Se voulant rassurant, Salah-Eddine Kadmiri, vice-président général de la CGEM, insiste: «Cette loi a été conçue pour satisfaire la majorité des PME. Bien évidemment, l'administration publique ne doit pas y échapper. Les gros donneurs d'ordre comme l'ONCF, l'ONEP ou autres se doivent de jouer le jeu». Il est à noter dans ce sens qu'une cellule directement attachée au chef de gouvernement a été créée par la CGEM. Cette cellule se charge de dénoncer toute administration publique dépassant les délais de paiement et Benkirane promet de lui mettre pression. Serait-ce la plus dissuasive des approches? A ce sujet, certains opérateurs restent sceptiques. La loi en question stipule que le délai de paiement est désormais de 60 jours lorsqu'il n'y a pas d'accord contractuel et peut aller jusqu'à 90 jours par consentement contractuel. Si pour quelques secteurs ce délai est jugé très serré, d'autres, comme celui des transports, le trouvent au contraire important. Dans ce sens, les différents représentants des PME ont relevé le fait qu'il existe un réel besoin que cette loi prenne en considération les spécificités sectorielles dans toute régulation. La liste des craintes semble sans fin et instaure une perplexité quant à l'efficacité de cette loi. Un mémorandum contenant toutes les doléances évoquées sera adressé par la CGEM au chef de gouvernement. Entre-temps, les clients mauvais payeurs continuent à mettre les entreprises entre le marteau et l'enclume. Il n'est pas sans mentionner que cette loi est censée redonner confiance aux investisseurs étrangers en leur prouvant que l'économie marocaine est soumise à un cadre juridique solide. Or, la fragilité du tissu économique portée par ces PME constitue une vraie bombe à retardement. L'unique solution serait que l'Etat au même titre que les clients passe à la caisse.