M.G. est un paisible commerçant, honnête à sa manière, bon époux, il a même deux femmes, père de famille nombreuse (forcément) et très pieux. La mosquée du quartier n'est pas loin de son domicile, il la fréquente assidûment; il a fait le pèlerinage à La Mecque, offert la Omra à ses épouses… Tout ceci ne l'empêchant nullement d'entretenir, discrètement, une troisième jeune et jolie femme qu'il loge dans un coquet appartement à proximité de son commerce. Vous avez quelques dettes, et les débiteurs se font pressants ? Vous voulez éviter une expulsion, une saisie conservatoire ? Pas de panique, certaines techniques ont vu le jour ces derniers mois, et connaissent un succès foudroyant. M.G. est un paisible commerçant, honnête à sa manière (frauder le fisc par exemple, n'est pas trop grave, l'Etat est riche), bon époux (il a même deux femmes), père de famille nombreuse (forcément) et très pieux. La mosquée du quartier n'est pas loin de son domicile, il la fréquente assidûment; il a fait le pèlerinage à La Mecque, offert la Omra à ses épouses… Tout ceci ne l'empêchant nullement d'entretenir (discrètement) une troisième (jeune et jolie) femme qu'il loge dans un coquet appartement à proximité de son commerce. Il lui a offert une voiture, et la convie souvent à l'accompagner lors de ses déplacements à l'étranger, où il se rend parfois pour commander ses marchandises. Tout va donc pour le mieux, mais un tel train de vie revient assez cher… et malheureusement les affaires périclitent. En ces temps de crise mondiale, son chiffre d'affaires est en chute libre, les revenus diminuent donc, alors que les charges fixes, elles, non seulement ne baissent pas, mais amorcent même un léger «trend haussier», pour parler comme les traders ! Les banques se font pressantes pour récupérer leurs créances, les différents fournisseurs et autres réclament le paiement des factures en souffrance, les avis s'accumulent. Bref, le temps est à l'orage pour l'honorable M.G. Tout ceci finit entre les mains de juristes, les requêtes sont déposées, M.G. est assigné en justice et se retrouve devant le tribunal. Ici, personne ne songe à réconforter M.G. ou à faire preuve d'indulgence (nos fidèles lecteurs comprendront), la machine judiciaire fonctionne à fond, aucune circonstance atténuante n'est envisagée ni accordée, et notre commerçant se retrouve condamné à payer une coquette somme de l'ordre de 300 000 DH, en principal, pénalités et indemnités diverses, à ses débiteurs, qui sont principalement des banques, l'une d'elles détenant à elle seule une créance de près de 200 000 DH. M.G. n'a pas cette somme, une ordonnance de saisie-conservatoire sur les biens meubles (véhicules, mobilier d'ameublement, appareils électroménagers, voire œuvres d'art, tapis ou bijoux) est alors émise, et l'huissier chargé de l'exécuter se présente au domicile du commerçant. Très "pieux" (il arbore même une belle et longue barbe noire) et s'habille même à l'afghane, mais aussi tout aussi retors, il élabore un stratagème dès qu'il a appris la visite de l'huissier. En effet, il prétexte un voyage d'affaires urgent en Belgique, et s'envole avec son amie pour quelques jours…pour l'Espagne. L'huissier arrive donc, sonne, et se voit ouvrir la porte par deux dames, la première intégralement voilée, la seconde déguisée en ce que l'on nomme «tortue Ninja» avec gants et burqa noirs, qui lui expliquent poliment que le maître de céans étant absent, lui, homme, ne saurait pénétrer dans cette demeure de femmes, et que non, elles ne savent pas quand leur époux (et maître) allait rentrer, parti qu'il était pour motif professionnel. Voilà l'huissier bien embêté, car il a un dossier exécutoire … à exécuter, lui, le juriste qui lui a confié cette mission attend des résultats, et la banque son argent, qui découlera de la vente des objets saisis ! Et là, on lui oppose (légalement) une fin de non-recevoir inattendue et inédite. Mais, n'est-ce pas que force doit rester à la loi, qui du reste a prévu ce cas de figure ? Le législateur marocain, dans sa sagesse, a instauré une procédure dite de «arifa», dans l'article 4 du Dahir de 24 avril 1954, portant prohibition du chanvre à kif, disposant qu'en «cas de perquisition (ou saisie) dans une maison où se trouvent des femmes musulmanes, les agents doivent se faire précéder par la arifa, puis par une femme de confiance, afin que les convenances soient respectées». Précisons que cette loi avait été adoptée pour lutter à une époque où le Protectorat français, encore en place, entendait lutter contre les trafiquants de kif, qui, souvent entreposaient leurs récoltes dans leurs domiciles, sous la garde de leurs épouses. A suivre.
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