L'ego peut être un moteur de performance et d'évolution de carrière. Poussé à l'extrême, il peut mener aussi à l'échec. En dehors des chefs d'entreprises, les autres catégories socioprofessionnelles (fonctionnaires, salariés, professions libérales) ont, elles aussi, besoin de l'ego fort pour se démarquer et progresser dans la carrière. Aujourd'hui, il n'est pas à la mode de parler d'individualisme au sein d'une entreprise. En fait, il est dans l'air du temps de mettre en avant sa capacité à travailler en groupe (traduction : à ne pas faire de vagues) et l'adhésion volontaire aux teambuildings et autres initiatives de cohésion d'équipes proposés par l'entreprise. Seulement, celle-ci adopte parfois une position presque schizophrénique. D'un côté, elle abreuve ses employés et cadres des exemples et des histoires des individus d'exception : les vrais génies dans leurs domaines, les meneurs d'hommes, des «battants», etc. D'un autre côté, la même entreprise fait tout pour rendre les gens conformistes, faciles à manager, correspondant aux mêmes critères de personnalité. Où est alors la place et quel est le rôle de l'ego pour celui (ou celle) qui veut faire carrière ? L'ego en quelques mots L'ego est une représentation que nous avons de nous-mêmes, une certaine conscience de nos propres capacités et de notre place au sein d'un groupe donné : la famille, l'entreprise et la société dans son ensemble. Cette idée à propos de nous-mêmes se forge à la rencontre des autres personnes, dans un processus permanent de comparaison. Nous cherchons à nous positionner dès l'enfance. Ensuite, elle subit la rectification des règles sociales et socioprofessionnelles, elles-mêmes en constante évolution. L'ego bien dimensionné permet à la personne d'avoir la confiance en soi nécessaire pour relever les défis, affronter les opinions des autres, convaincre et aller jusqu'au bout dans ses actions. Le bon ego ne doit être ni trop faible, ni trop débordant. Bien entendu, l'ego d'une même personne évolue tout au long de sa vie, et ceci en fonction de nombreux paramètres. Tout d'abord, avec le temps et l'âge, lorsqu'elle acquiert de l'expérience (positive ou négative). Ensuite, selon le contexte/situation dans lequel elle se trouve à un moment donné. Et enfin, en fonction des responsabilités endossées. Un chef d'entreprise a besoin d'un ego fort pour démarrer son activité Pour illustrer l'importance de l'ego dans sa bonne dimension, je citerai deux exemples réels : celui d'un chef d'entreprise et celui d'un expert. Le premier, grâce à son ego, a pu relever les défis ; le second, à cause de son ego, a subi un échec spectaculaire. Qu'il soit un jeune débutant sa vie professionnelle ou qu'il soit expérimenté et ayant de nombreuses années d'expérience en tant que salarié (qui est une situation tout à fait différente, même si le poste occupé est de haute responsabilité), un chef d'entreprise a besoin d'un ego fort pour démarrer son activité, conquérir le marché et affronter la gestion administrative. Ce qui est particulier à l'évaluation de son ego, c'est que cela se fait dans des situations concrètes : face à un banquier réticent, face aux associés douteux, face à un client hésitant, face à un fonctionnaire au pouvoir discrétionnaire, l'ego de notre entrepreneur doit être suffisamment fort pour impacter ses interlocuteurs, avoir de l'ascendant sur son environnement et permettre à l'entreprise d'atteindre ses objectifs. L'ego fort permet aussi de tenir bon lorsque les choses ne se développent pas comme prévu et qu'il faut quand même garder le cap. Grâce à son ego, le chef d'entreprise fera face aux adversités (pour ne pas dire adversaires) et continuera de défendre son idée ou son produit, en donnant en même temps l'exemple à suivre à ses collaborateurs. Bien entendu, en dehors des chefs d'entreprises, les autres catégories socioprofessionnelles (fonctionnaires, salariés, professions libérales) ont, elles aussi, besoin de l'ego fort pour se démarquer et progresser dans la carrière. A compétences et talents égaux, et sans fausser le jeu par les soutiens subjectifs, les personnes promues aux postes les plus hauts dans la hiérarchie auront nécessairement un ego bien prononcé. Si ce n'est pas le cas, elles auront du mal à asseoir leur autorité et à faire suivre leurs directives. Du coup, cela portera atteinte à leurs résultats et freinera leur progression future. D'autre part, un ego surpuissant peut être la cause des échecs ou tout simplement d'un relationnel houleux d'une personne. L'exemple concret que je vais mentionner m'a été fourni il y a quelques mois. Un éminent spécialiste dans son domaine (praticien de longue date, auteur de livres à succès) a cédé à l'appel de la célébrité et a produit et diffusé sur internet une série d'enregistrements éducatifs complètement ratés : en contradiction évidente avec les règles d'usage, contenant un grand nombre de contre-vérités et d'erreurs techniques. Si cet homme avait un minimum d'esprit critique et honnête envers soi-même, s'il avait ne serait-ce qu'un seul ami ou conseiller sincère, il ne se serait pas ridiculisé de la sorte. Ici, son ego est devenu un vrai piège et l'a finalement mené dans une impasse. L'ego ne doit pas servir à écraser les plus faibles ou à faire du mal L'ego bien développé est l'attribut par excellence des métiers créatifs, des visionnaires, des gens qui contribuent au progrès malgré les résistances. Sans cet ego, ils seraient broyés par les conformistes et les résistances internes au changement. En dehors de ces catégories particulières, le bon ego est absolument nécessaire à toute personne aspirant au leadership, et très utile également dans la vie privée ! Si un jour vous entendez : «Mais quel ego sur-dimensionné !», réfléchissez-y. Le plus probablement, vous avez suffisamment bousculé la personne pour qu'elle se sente obligée de remarquer votre opinion et –peut-être– revoir la sienne. C'est plutôt bon signe pour votre efficacité personnelle, à une seule condition près : ne pas perdre de vue les droits fondamentaux des autres personnes, tout en poursuivant votre propre but. Car l'ego ne doit pas servir à écraser les plus faibles ou à faire du mal autour de vous. Restez courtois, cultivez vos connaissances en toute humilité. Après tout, on pardonne plus facilement les coups de sang lorsqu'ils sont relayés par la compétence indiscutable et une personnalité charmante.