La galerie African Arty présente, à partir du 12 décembre à Casablanca, la grande rétrospective de l'artiste multidisciplinaire Abderrahmane Rahoule : « 60 ans de création – l'Ecole de Casablanca entre héritage et transmission ». Suivez La Vie éco sur Telegram Drôle de personnage ce Rahoule, qui, à 78 ans, conserve une présence magnétique et une aura énigmatique. Traits tendus comme l'arc prêt à libérer sa flèche, sourire sibyllin et regard brûlant derrière des lunettes indiscrètes, il s'impose comme une figure à la fois mythique et insaisissable. Une flamme artistique inextinguible qui embrase par son œuvre et glace par son silence. Cet homme de feu et de glace, tour à tour secret et disert, n'a cessé d'habiter la scène artistique marocaine et internationale depuis son irruption fracassante dans les prolifiques seventies. Explorateur averti des genres plastiques, Rahoule a sculpté son art comme on sculpte la vie, en mêlant la peinture, la sculpture et la céramique dans une alchimie aussi explosive que poétique. Avec une rigueur rare, il a parcouru ces territoires artistiques, les fusionnant parfois dans des œuvres qui transcendent les catégories. Pourtant, c'est à la sculpture qu'il a réservé sa plus grande dévotion, se faisant le fervent prêcheur de cet art qu'il considère comme une discipline majeure, mais souvent négligée sous les latitudes marocaines. Son parcours témoigne d'un engagement indéfectible envers son art et son héritage. Né dans le quartier populaire de Derb Sultan à Casablanca, Rahoule fait ses premières armes aux Beaux-Arts de Casablanca avant d'élargir ses horizons à Paris, aux Pays-Bas et en Tchécoslovaquie. Là, il perfectionne ses techniques, développant un langage plastique qui dialogue subtilement avec l'architecture de sa ville natale. Les formes anthropomorphes enchevêtrées qui jalonnent son œuvre témoignent de cette symbiose entre l'humain et l'urbain, dans une quête permanente de nouveaux langages. L'artiste n'a pas seulement façonné des œuvres, il a aussi façonné des générations. Enseignant puis directeur des Beaux-Arts de Casablanca à partir de 2003, Rahoule a transmis sa vision et son exigence, marquant profondément la scène artistique marocaine. Membre du groupe de l'Ecole de Casablanca, il a été un acteur clé de l'émergence de l'art contemporain marocain, toujours en quête d'un dialogue fécond entre modernité et tradition. Une œuvre sans titre d'Abderrahmane Rahoule, réalisée en 1978. Techniques mixtes sur toile, 90×90 cm. La galerie African Arty célèbre cet héritage à partir du 12 décembre, en organisant une rétrospective magistrale consacrée à Rahoule. Cet événement, qui mettra en lumière soixante ans de créations d'un des piliers de l'art moderne et contemporain marocain, est une invitation à redécouvrir un univers où chaque œuvre semble nimbée de cet inexplicable et invisible rayonnement qu'on appelle la grâce. Peintures, sculptures, céramiques : tout ici respire une vitalité intemporelle. Le visiteur sera happé par des formes carrées, circulaires ou cubiques, où se mêlent des tons ocre, vert et bleu évoquant des réminiscences d'Afrique et d'ailleurs. Les sculptures, ces corps entremêlés, vibrants de vie, exercent une attraction irrésistible. Et comme le dit si bien Rahoule à travers son œuvre : son art ne se commente pas, il s'éprouve. Toute glose serait superflue face à cette esthétique qui, à elle seule, tient lieu de discours. Rahoule, cet ogre insatiable de l'imaginaire, a puisé dans les racines marocaines, les traditions africaines et arabo-musulmanes pour façonner un art vivifiant et inoxydable.