Homme d'affaires, parlementaire, élu local… et lobbyiste à ses heures perdues. Il est sur le point d'accomplir son troisième mandat de député et compte rempiler en 2012. En 2007, la liste qu'il a conduite a recueilli le deuxième nombre de voix au Maroc, derrière celle de Fouad Ali El Himma. Abdessamad Kayouh est certainement l'homme politique le plus populaire au Maroc. En terme de nombre de votes, s'entend. En 2002, alors qu'il briguait son deuxième mandat de député parlementaire, sa liste a recueilli pas moins de 40 000 voix. Un record. Il faut dire qu'il figurait sur la même liste derrière son père, Ali Kayouh, une figure de proue dans la région de Oulad Taïma, chef-lieu des Houara dans la province de Taroudant. En 2007, le jeune Abdessamad qui conduit la liste de l'Istiqlal dans sa circonscription réalise le deuxième record de votes. Ce sont exactement 39400 électeurs qui ont voté pour lui. Ce qui place sa liste en deuxième position, juste derrière celle d'un certain… Fouad Ali El Himma, élu à Rhamna. La liste de Kayouh obtient deux sièges. «Nous avons raté un troisième siège de seulement 700 voix. Et sans l'intervention de l'Administration, le score aurait été plus important», laisse-t-il entendre, accusant, à demi-mots, les autorités de le priver de plus de 10 000 voix. «Il fallait le dire, et c'est fait. Ces voix ont tout simplement été annulées pour des raisons sur lesquelles je m'exprimerai un jour. Mais aujourd'hui, ce n'est pas le moment», précise-t-il. La famille Kayouh est incontournable dans la région de Taroudant et Abdessamad Kayouh qui en est, actuellement, à son troisième mandat de député, tire largement profit de cette popularité. Tout comme son nouveau parti, l'Istiqlal. Le clan a donné à l'Istiqlal 5 sièges pour la première Chambre et six pour la Chambre des conseillers. Pourtant, c'est sous l'étiquette PND (devenu, dernièrement PDN après l'échec de son intégration par le PAM) que le jeune Abdessamad a fait ses premiers pas en politique. Pour toute explication de ce choix, il affirme : «Je n'étais pas particulièrement convaincu par les idées de ce parti. J'y étais pour des raisons tactiques. Mon père y était, c'est donc logiquement que je me suis retrouvé. Je me suis d'ailleurs retrouvé dans la politique par accident». Pour les Kayouh, la politique est, en effet, une affaire de famille. C'est donc tout naturellement que le jeune Abdessamad, né le 11 avril 1966 à Oulad Taïma et alors à peine âgé de 31 ans, se retrouve de plain-pied dans l'arène politique. Un parcours somme toute logique pour le fils de l'un des plus anciens députés qu'ait connu le Maroc, qui en est actuellement à son sixième mandat et a passé plus de quatre décennies dans l'hémicycle. La politique, une affaire de famille Et ce n'est pas seulement en politique que le jeune Abdessamad a pris exemple sur son père. A peine diplômé d'une école de commerce et de gestion à Casablanca, en 1988, il s'empresse de rejoindre l'affaire familiale. Les Kayouh sont de grands propriétaires terriens, des producteurs agricoles (agrumes, raisin de table, céréales et maraîchers) mais également des commerçants. Abdessamad, membre d'une fratrie de six enfants, quatre frères et deux sœurs, répond très tôt à l'appel du travail de la terre. Il aura même été, confie-t-il, derrière l'introduction, pour la première fois au Maroc, du système d'irrigation par bras pivotants. Technique qui l'a séduit après un stage de formation qu'il a effectué en Afrique de Sud dans le milieu des années 1990. Car, depuis son retour dans sa terre natale en 1988, après plusieurs années d'études effectuées entre Agadir pour le secondaire et Casablanca pour le supérieur, il s'est investi corps et âme dans le travail de la terre. Ce qui lui réussit plutôt bien. La politique lui réussit tout aussi bien. Preuve en est qu'il lui aura fallu moins de dix ans pour siéger dans l'un des plus importants organes de l'Istiqlal qu'est le comité exécutif. Pourtant, reconnaît-il, avant ce spectaculaire ralliement de l'Istiqlal par le clan Kayouh, en 2003, il n'avait pas particulièrement d'affinité avec ce parti. Son père, par contre, si, puisqu'il a déjà fait partie de la Jeunesse istiqlalienne et de l'organisation du scoutisme affiliée au même parti. Et pour ce retour au bercail en 2003, la direction du parti, à sa tête Abbas El Fassi, a fait le déplacement à Oulad Taïma pour fêter ce retour. Fer de lance pour l'Istiqlal Car, outre les Kayouh, père et fils, ce sont pas moins de 28 parlementaires et présidents de communes qui ont rallié l'Istiqlal. Le parti a organisé pour l'occasion un congrès régional pour permettre aux nouveaux-venus d'occuper les rangs qui leur échoient dans ses instances régionales, et par la suite, centrales. En 2009, soit six années plus tard, Abdessamad Kayouh devient donc le premier soussi à être élu membre du comité exécutif. Entre-temps, le parti se renforce dans cette région et gagne du poids grâce aux Kayouh. «Nous nous sommes pleinement investis dans le développement de l'Istiqlal dans la région», explique-t-il. «C'est grâce à nos cinq sièges obtenus lors des dernières élections que le parti a pu s'assurer la première place», avance-t-il. De même que l'Istiqlal s'est considérablement renforcé dans toute la région de Taroudant. «Le nombre de ses conseillers communaux est passé de 115 à la veille des communales de 2009 à 780 actuellement», explique-t-il. Ce qui explique la facilité avec laquelle Abdessamad Kayouh a décroché son siège de président du Conseil provincial de Taroudant, un poste qu'il garde depuis 2003. De même que celui de vice-président de la région qu'il occupe également pour un deuxième mandat. Et comme il ne peut cumuler les deux mandats, il se contente d'un poste de vice-président de la municipalité de Oulad Taïma. Bref, Abdessamad Kayouh est un homme très occupé. Entre ses activités associatives, ses responsabilités politiques, ses charges d'homme d'affaires et nombreuses actions de lobbying pour sa région, il trouve à peine du temps libre à consacrer à ses deux enfants. Sa mission est aujourd'hui de perpétuer la tradition familiale, que ce soit en affaires ou en politique. Il lorgne déjà les législatives de 2012. A 45 ans, il est déjà au sommet de sa carrière politique et son pari sera non pas de gagner les prochaines élections, mais de maintenir, voire améliorer, son score en nombre de voix.