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Nos parlementaires sont-ils trop payés ?
Publié dans La Vie éco le 28 - 06 - 2010

Ils perçoivent un salaire mensuel net de 30 000 DH et l'opinion publique trouve cela exorbitant au regard de leur absentéisme.
Cotisation au parti, financement d'un bureau dans la circonscription, aides sociales, ils ont des charges non négligeables et sont souvent sollicités par les citoyens.
Pour qui veut réellement faire son travail d'élu, la rémunération, souvent, ne suffit pas.
Quand on évoque avec eux le sujet de leur rémunération, nos parlementaires se montrent plutôt discrets, voire gênés. Le sujet est tellement sensible que les décrets fixant les indemnités des élus, tout comme celles des membres du gouvernement, ont toujours été passés sous silence. Ils sont d'ailleurs parmi les rares textes de loi à ne pas figurer dans le Bulletin officiel. C'est dire que les pouvoirs publics ont toujours tenu à garder confidentielles ces rémunérations qui sont souvent très contestées par l'opinion publique. De l'avis de la plupart des citoyens, les indemnités versées aux membres du Parlement sont exorbitantes eu égard à leur supposé manque de travail et d'assiduité.
Nous sommes cependant en droit de nous demander si nos parlementaires qui, faut-il le rappeler, ont la lourde charge de légiférer et de contrôler l'action du pouvoir exécutif, ont réellement des salaires trop élevés. Maintes fois, la presse, spécialement arabophone, a fait ses choux gras de la question, évoquant un salaire de 36 000 DH. Il faut cependant savoir que cette somme que perçoivent les parlementaires (représentants de la première Chambre et conseillers de la deuxième) ne correspond pas à l'indemnité mensuelle nette. De ce montant, sont déduites diverses retenues relatives aux cotisations sociales, de retraite et d'assurance maladie dont le montant total s'élève à
6 000 DH. Le net perçu par les parlementaires n'est en fait que de 30 000 DH par mois.
Une bonne retraite et quelques avantages
Il faut aussi savoir que nos élus se déplacent, à l'intérieur comme à l'extérieur du Royaume, aux frais du contribuable. Ainsi, à l'intérieur, ils jouissent d'une gratuité de transport ferroviaire en première classe, un privilège que leur confère un arrêté du ministre du transport visé par le ministre des finances.
Quand ils sont en mission à l'étranger, les parlementaires perçoivent, à l'instar des ministres, une indemnité quotidienne de 2 500 DH. Souvent, les déplacements sont effectués sur invitation de partenaires étrangers, et ils sont complètement pris en charge. Et là, les parlementaires empochent la totalité de l'indemnité de déplacement car ni l'administration du parlement ni le ministère des finances ne se montrent très regardants sur ce détail. «C'est une pratique très courante partout dans les administrations marocaines», confie un cadre de la Fonction publique.
Et quand les parlementaires ne sont pas invités, ils peuvent payer leurs billets d'avion avec une réduction de 50% auprès des guichets de la RAM. Mais la convention signée avec le transporteur national s'applique aux billets à plein tarif. «Même avec les 50% de réduction, le prix reste plus élevé que les tarifs promotionnels proposés par les compagnies aériennes et il est pratiquement rare qu'on y recourt», précise un élu.
Et encore, il y a parlementaire et parlementaire. Ceux élus au poste de président de commission permanente (six dans chaque Chambre) ou à celui de membre du bureau du conseil (8 vice-présidents, 2 questeurs et 3 assesseurs), ainsi que les chefs des groupes parlementaires perçoivent, en plus de leur 30 000 DH nets, une indemnité forfaitaire de 7000 DH par mois. Elle englobe tous les frais relatifs à l'utilisation de voiture personnelle, à l'achat de journaux et aux déplacements à l'intérieur du pays. C'est en 1998, sous la présidence de Jalal Saïd, que cette indemnité a été instituée. L'ancien président UC de la Chambre des représentants voulait ainsi mettre fin à l'exploitation abusive du parc auto de cette institution. Douze ans plus tard, certains membres du bureau (notamment des vice-présidents) et certains présidents de commissions n'hésitent pas à ré-exploiter les voitures de fonction ainsi qu'une dotation en journaux tout en continuant à bénéficier des 7 000 DH. Visiblement, cette indemnité forfaitaire est considérée par ces responsables parlementaires comme un acquis. Et il est désormais difficile de changer une pratique ancrée dans les pratiques conventionnelles de ces institutions. Quant aux présidents des deux Chambres, leurs salaires sont supérieurs à ceux du Premier ministre (Voir encadré).
Des parlementaires remplissent leur mission avec abnégation
Mais cela veut-il dire pour autant que nos parlementaires sont trop payés ? En la matière, il ne faudrait pas généraliser. Certes, il y a des parlementaires qui usent de cette fonction pour décrocher d'autres avantages matériels et moraux et pour faire fructifier leurs affaires. Certains d'entre eux perçoivent ces indemnités sans s'acquitter de leurs missions. D'autres, à force de s'absenter, ignorent tout de l'action parlementaire et des enjeux qui se font et défont dans l'hémicycle. A contrario, certains, en plus d'une assiduité normale (faire son travail de parlementaire ne signifie pas y être chaque jour ouvré), puisent parfois dans leurs propres fonds pour assumer une fonction qui ne se limite pas à l'enceinte du Parlement. Etre élu, c'est aussi une image, un statut social.
Pour certains représentants et conseillers actifs, les indemnités perçues dans le cadre de cette fonction génèrent des dépenses autres que celle consistant en frais de transport ou d'hôtel pour assister aux séances. A commencer par les frais relatifs au bureau ouvert généralement dans la circonscription de l'élu pour rester en contact avec ses électeurs. «Je loue un appartement à 2 000 DH par mois et je débourse autant pour un salarié à temps partiel qui assure la permanence et le contact avec les habitants de la circonscription», témoigne un représentant USFP de la région de Doukkala. Comme lui, plusieurs parlementaires tiennent à avoir un relais dans la circonscription. Et cela a un coût pour le parlementaire. Ces charges varient en fonction de la circonscription de l'élu et du niveau de vie de la ville où il se trouve. Le PJD en a même fait une obligation pour ses représentants à l'exception de celles issues de la liste nationale. Quant à l'UC, «70% de [ses] parlementaires ont un bureau dans leur circonscription», indique Mohamed Abied, secrétaire général du parti.
Parlementaire ou élu local : le grand amalgame
L'implantation locale devient même une nécessité d'autant plus que «les gens confondent souvent la mission du parlementaire avec celle du conseiller municipal», observe Khalid Benaboud, responsable des relations publiques au PJD. En effet, au lieu de se consacrer à leur fonction principale qui est de légiférer et de contrôler le travail du pouvoir exécutif, le représentant et le conseiller sont fréquemment appelés par les citoyens à accomplir des services d'ordre local et de proximité. «Dans un pays où la bureaucratie est toujours assez présente, on nous sollicite souvent pour intervenir auprès des services de l'Etat ou des collectivités locales afin de faciliter l'accomplissement de procédures administratives aussi banales que la carte nationale, le passeport ou l'autorisation de construire…», confie un conseiller du RNI. Et c'est généralement l'assistant du parlementaire qui se charge de cette besogne et, souvent, paie timbres et autres frais qui en découlent. Car, qu'ils le veuillent ou non, les parlementaires acquièrent automatiquement le statut de notable de leur circonscription (et parfois au-delà) et deviennent très sollicités par tous et pour n'importe quelle affaire. Dans différentes circonstances, ils seront mis à contribution. «Il ne se passe pas un mois sans qu'il n'y ait au moins un décès dans la circonscription, et il est inimaginable de ne pas soutenir la famille endeuillée pour les frais relatifs aux funérailles», souligne un représentant.
On fait appel à la générosité des parlementaires également dans les situations difficiles. «Comme il est répandu chez les gens, parfois de manière fausse, que le parlementaire est une personne aisée, il devient impératif d'assister les citoyens modestes lorsqu'ils sont en situation précaire notamment dans les cas de maladie qui nécessitent un traitement coûteux», estime Najib Ouazzani, représentant du parti Al Ahd.
On paie aussi pour son engagement partisan
En plus de ces charges fréquentes, le parlementaire doit s'acquitter, toujours dans sa circonscription, de dépenses non moins régulières pour l'animation et le fonctionnement d'associations de différents types, qu'ils président parfois : sportives, éducatives, à caractère social (aide aux démunis, aux malades…). «Pour les tournois sportifs qui sont organisés régulièrement, je dois me débrouiller pour fournir les équipements nécessaires tels les ballons, les jeux de maillot, les coupes et pour assurer la logistique de l'organisation», signale un représentant MP.
Ces activités sont exercées en dehors des deux jours que durent les travaux ordinaires du Parlement. La plupart des représentants que nous avons interrogés ont évalué les dépenses relatives à ce type «d'activités locales» entre 10 000 et 20 000 DH pour ceux qui s'y investissent davantage.
Et ce n'est pas tout. Les parlementaires sont aussi appelés à mettre la main à la poche pour d'autres motifs. L'engagement politique vis-à-vis du parti a également un prix pour ces représentants du peuple. La plupart verse une indemnité au parti. Tous les élus du PJD à la Chambre des représentants transfèrent 4000 DH chaque mois au parti. «L'opération se fait automatiquement par prélèvement bancaire», précise un représentant de cette formation politique. Les militants du parti de la lampe s'y engagent même avant les élections. Idem pour l'USFP dont les parlementaires (des deux Chambres) consacrent 2500 DH de leurs indemnités au parti. «Sauf pour ceux qui assurent le fonctionnement des sections locales», souligne un représentant socialiste.
En raison de leurs moyens financiers limités, plusieurs formations politiques comme le PPS, l'UC, le PI, le RNI et autres, ont imposé cette règle de conduite à leurs parlementaires pour les soutenir dans la gestion de leurs structures. «La plupart de nos représentants et conseillers s'acquittent des charges des sections locales en matière de location des bureaux, de rémunération de leurs personnels…», témoignent plusieurs responsables partisans. Les parlementaires sont sollicités parfois même pour de grands chantiers engagés par le parti. C'est le cas actuellement de l'Istiqlal dont les élus et ministres ont été sollicités pour le projet de construction du nouveau siège du parti à Rabat.
Le parlementaire moins rémunéré qu'un secrétaire général !
A cette liste de dépenses plus ou moins variable selon les représentants s'ajoutent celle habituelle dans le cadre de la fonction. Les parlementaires sont appelés à assister aux séances des questions orales, les mardis pour les conseillers, les mercredis pour les représentants, sans parler des réunions de groupes ou de commissions. Pour certains qui viennent de loin, les charges augmentent. «Nos représentants et conseillers qui viennent d'Oujda ou des régions du Sud doivent prévoir un séjour à Rabat d'au moins quatre jours et cela se traduit par des dépenses d'une moyenne de 6 000DH pour une semaine rien que pour les frais d'hébergement, d'alimentation et de transport», explique un cadre du PI. Il en est de même pour les parlementaires qui, consciencieux, tiennent à assister régulièrement aux séances du Parlement. Autant dire que l'indemnité perçue par les représentants ne paraît pas démesurée, loin s'en faut, face à de telles dépenses. D'autant que certains parlementaires traînent encore des dettes conséquentes liées à leur campagne électorale. «Je continue à rembourser les dettes que j'ai contractées pour l'organisation de ma campagne en septembre 2007», confie Najib Ouazzani. Fort heureusement, la législation marocaine permet aux parlementaires de continuer à exercer leur ancienne fonction s'ils sont dans le privé, ce qui permet à beaucoup d'entre eux de s'en sortir. En revanche, l'interdiction du cumul des salaires dans la Fonction publique oblige les fonctionnaires d'entre eux à se contenter de l'indemnité la plus élevée.
De manière globale, les 30000 DH de salaire octroyés aux parlementaires, depuis 1998, n'ont pas connu la même évolution que celle connue par les rémunérations, aussi bien dans la Fonction publique que dans le secteur privé. «Les salaires des parlementaires paraissaient importants dans les années 70 lorsque ces derniers étaient classés parmi les cadres les mieux rémunérés puisqu'ils touchaient plus que les secrétaires généraux et les directeurs centraux, mais aujourd'hui lorsqu'on les compare avec les salaires des cadres des secteurs public et privé on s'aperçoit qu'ils sont ridicules», souligne Driss Lachgar. Le ministre chargé des relations avec le Parlement tient cependant à préciser que le sentiment répandu chez l'opinion publique selon lequel le parlementaire est trop payé, trouve une certaine légitimité dans l'amplification du phénomène de l'absentéisme au Parlement. «Il est inacceptable que des projets de loi ayant été bien travaillés par les représentants et conseillers, et ayant largement mobilisé la société marocaine, soient votés par une dizaine de parlementaires», regrette le ministre. C'est justement cette image que renvoient nos représentants et conseillers de leur fonction qui a amplifié ce sentiment chez l'opinion publique. Mais cela ne doit pas non plus occulter l'importance de doter le parlementaire de tous les moyens afin de bien réussir sa mission. Car, en France par exemple, le phénomène de l'absentéisme suscite une vive polémique mais sans que cela ne mette en cause la qualité du travail des parlementaires. Et pour cause, à l'Hexagone on ne lésine pas sur les moyens pour les conditions adéquates de l'exercice de sa fonction (voir encadré). Chaque parlementaire (représentant ou sénateur) dispose, outre des indemnités conséquentes, de moyens financiers pour payer des personnes qui l'assistent dans sa fonction.
Ici, le parlementaire manque de moyens les plus rudimentaires : ni bureau, ni personnel, ni photocopieuse… Avec ses 30 000 DH et en plus de sa longue liste de charges fixes, il doit se débrouiller avec les moyens du bord pour contrôler le travail du pouvoir exécutif. Dure tâche pour quelqu'un qui veut tenir tête à un membre du gouvernement qui dispose d'un cabinet en plus de cadres et d'une administration. Les rapports de force sont largement déséquilibrés. «Le handicap de notre Parlement vient de ses moyens matériels et intellectuels, et une simple comparaison du budget de cette institution avec celui d'institutions publiques, voire avec des collectivités locales, montre que toute discussion autour des indemnités des parlementaires et du budget du Parlement n'est que pure surenchère», conclut M. Lachgar qui connaît les deux facettes de ce rapport de force, lui qui a exercé plusieurs mandats de parlementaire.


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