Le déficit du compte courant s'est aggravé, mais légèrement (2,4%), en raison d'un recul des importations beaucoup plus important que celui des exportations. Les transferts des MRE en baisse de 5% et les investissements et prêts privés étrangers en chute de 26,4%. On s'y attendait un peu puisque c'est par là que la crise s'est incrustée et c'est là où ses manifestations apparaissent plus clairement qu'ailleurs : les comptes extérieurs pour l'année 2009, finalisés depuis quelques jours par l'Office des changes, ne sont, globalement, pas bons. Pour la deuxième année consécutive, la balance des paiements est en déficit. Il faut toutefois relever que ce déficit d'à peine 1,6 milliard de DH est largement inférieur à celui de l'exercice 2008 qui s'était achevé avec un solde négatif de 11,5 milliards de DH. Avec cette baisse de 86% du déficit, on peut parler d'amélioration du solde global, à ceci près que cette amélioration ne provient pas de l'activité économique résidant en l'exportation de biens et services, notamment, mais principalement des opérations financières du secteur public, autrement dit de l'augmentation des emprunts au titre de la dette extérieure publique. Sans doute, est-ce pour cette raison que l'indicateur le plus important, le plus suivi, si l'on peut dire, demeure le compte des transactions courantes indicateur de performance économique à l'export. Celui-ci a enregistré un déficit de 36,8 milliards de DH, soit quasiment le même niveau qu'en 2008 (-35,9 milliards de DH). Il faut rappeler qu'en 2007, le déficit du compte des transactions courantes avait été de 571 millions de DH. Donc, aggravation d'une année à l'autre. Une rubrique transport structurellement déficitaire Lorsqu'on observe les différentes balances qui composent et alimentent le compte courant, on s'aperçoit finalement que la quasi-stabilité du déficit de ce dernier, au titre de 2009, résulte essentiellement, pour ne pas dire exclusivement, de l'allègement du déficit -structurel- des transactions sur marchandises : -133,3 milliards de DH contre -151 milliards de DH en 2008, soit un allègement du déficit de 11,7%. Mais à quoi est dû cet allègement ? Tout simplement à la contraction des importations de marchandises (-61,4 milliards de DH), en liaison évidemment avec le tassement de l'activité économique. Les exportations n'y sont donc pour rien, puisqu'elles ont baissé de 28,1% par rapport à 2008 (-43,8 milliards de DH). La balance des services (transport, voyage, communication, assurance, etc.) continue, elle, d'être excédentaire, mais c'est un excédent en recul par rapport à 2008 et 2007 : +45,43 milliards de DH en 2009, contre +51,5 milliards de DH l'exercice précédent et +55,2 milliards de DH en 2007. Ce recul, qui commence en 2008, intervient après cinq années d'améliorations successives. Ceci pour souligner combien l'impact de la crise a été sévère sur les activités de services. Il en est ainsi notamment des recettes de voyages qui se sont repliées de 4,9% (-2,7 milliards de DH) à 52,8 milliards contre 55,55 milliards en 2008 et 58,7 milliards en 2007. Passons sur le poste «transports», certes deuxième composante des échanges de services, après les voyages, de par l'importance des recettes et des dépenses qui y sont enregistrées annuellement, mais un poste dans le rouge depuis une dizaine d'années au minimum, en raison de l'importance du déficit du transport maritime qui «cannibalise» les excédents réalisés dans le transport aérien ! Signalons, en revanche, pour en finir avec la balance des services et les raisons du recul de son excédent, l'importante augmentation en 2009 des dépenses effectuées au titre des services reçus par les administrations publiques : + 44,7% (ou +3,7 milliards de DH), soit près de 12 milliards de DH contre 3,6 milliards de DH de recettes. D'où un déficit dont le niveau (-8,4 milliards de DH) n'a pratiquement jamais été atteint. On peut en dire autant sinon plus de la rubrique des revenus : son déficit s'est aggravé de 80,6% à -7,35 milliards de DH contre -4,07 milliards en 2008. En cause, l'augmentation de 50% des transferts au titre des dividendes : 9,1 milliards de DH, contre 6,07 milliards en 2008 et 3,3 milliards en 2007. On est certes loin des niveaux de déficit de cette rubrique, enregistrés dans les années 90 (- 11,4 milliards de DH en 1996 par exemple), mais depuis 2008, la courbe du déficit se remet à monter… Il faut rappeler ici que cette rubrique est structurellement déficitaire ; pour une raison simple, c'est que le stock des engagements du Maroc vis-à-vis de l'extérieur est infiniment plus important que celui de ses avoirs. En 2008, les avoirs du Maroc représentaient 48,2% de ses engagements. La position financière extérieure globale du Maroc est donc déficitaire, mais ce n'est pas une nouveauté. Le solde du compte de capital et d'opérations financières en hausse Autre poste qui a influé sur le niveau de déficit du compte courant et, in fine, sur le solde global de la balance des paiements, celui des transferts courants. Le solde de ce poste est certes structurellement excédentaire, c'est même l'une des sources principales de la balance des paiements, mais avec la crise économique, les envois des Marocains résidents à l'étranger (MRE) ont baissé : -5,4% à 50,2 milliards. En proportion, ce sont les transferts publics qui ont beaucoup chuté (- 62,4%) à + 3,6 milliards de DH contre + 9,6 milliards en 2008. Ce sont donc ces évolutions (déficit d'un côté et baisse des excédents de l'autre) qui ont provoqué une légère hausse du déficit du compte courant. Pourtant, le solde global, lui, s'est considérablement amélioré par rapport à 2008, comme indiqué plus haut : le déficit de la balance des paiements est en effet revenu de – 11,5 milliards à «seulement» -1,6 milliard de DH. Ce qui a permis ce résultat ? L'importante hausse (+ 38,3%) de l'excédent du compte de capital et d'opérations financières : +38,2 milliards de DH, contre +27,6 milliards en 2008. C'est cela qui a absorbé l'énorme déficit du compte courant. Un bémol, toutefois : ce résultat, pour l'essentiel, provient des opérations financières du secteur public et, à un degré moindre, de celles du secteur privé. Pour les opérations financières du secteur public, l'excédent provient, pour dire les choses simplement, d'une hausse des emprunts publics extérieurs (Etat et organismes publics), d'un côté, et de la baisse des remboursements au titre du principal, de l'autre côté. Les tirages ont en effet augmenté de 24% (+ 5,4 milliards de DH) et les remboursements ont baissé de 31% (-4,1 milliards). Quant aux opérations financières du secteur privé (crédits commerciaux, investissements directs et de portefeuille, etc.), elles ont réalisé un excédent en légère hausse (+ 5,6% à 19,3 milliards de DH). Ce qui attire davantage l'attention à ce niveau c'est le repli des recettes au titre des investissements et prêts privés étrangers, qui se sont établis à 26,6 milliards de DH, contre 35,3 milliards en 2008 et 41,4 milliards en 2007 – ces résultats étant dits «préliminaires», on ne connaît pas encore la part des investissements directs et celles des investissements de portefeuille et autres prêts privés ! On notera, enfin, que la rubrique monnaie fiduciaire et dépôts a dégagé un solde excédentaire en hausse de… 354% : +5,98 milliards de DH, contre 1,32 milliard en 2008. Pour simplifier, il faut savoir que cette rubrique recense les avoirs détenus par les non-résidents auprès des banques marocaines. Tout compte fait, la situation des comptes extérieurs demeure certes fragile mais l'on aurait pu s'attendre à…pire. Surtout que les exportations, sur lesquelles il faudrait sans douter miser pour rééquilibrer ces comptes et non pas sur la diminution des exportations comme certains le suggèrent, ne s'améliorent pas. L'absorption de l'énorme déficit de la balance des paiements, enregistré en 2008, peut néanmoins constituer un motif de relatif optimisme.