Le marché fait de plus en plus d'adeptes auprès d'une clientèle à l'affût de bonnes affaires et de jeunes entrepreneurs passionnés et engagés. Zoom sur un business tendance et écolo. Quartier Bernoussi, Casablanca. Pas de mall ni de magasins de luxe dans les environs, mais un «Souk namoudaji». Autour d'une montagne de vêtements posés sur le sol, une foule de badauds s'est agglutinée. Hommes, femmes, jeunes et moins jeunes fouillent dans cet amas de chemises, foulards, pantalons, pulls et chaussures, dans l'espoir d'y trouver une pièce intéressante. Cette friperie, communément appelée Jouteya ou L'bale, enregistre tous les jours une grande affluence, spécialement les week-ends, et draine une clientèle de toutes les classes sociales qui y trouve des grandes marques du prêt-à-porter à des prix défiant toute concurrence, variant entre 3et 300 DH. Bref, il y en a pour toutes les bourses. Salima est une habituée des lieux, et elle vient de faire une bonne affaire : «J'ai acheté cette veste à 70 DH, lance cette jeune étudiante, ravie de son nouvel achat. Je viens souvent faire mes emplettes ici, car je peux m'habiller à petits prix tout en étant au top de la tendance». Comme elle, de plus en plus de jeunes ont jeté leur dévolu sur le marché des vêtements de seconde main, qui rencontre beaucoup de succès sur les réseaux sociaux. De grandes marques à petits prix Abdelhamid, un revendeur de vêtements d'occasion pour hommes et enfants, expose un gros arrivage de vestes, de pantalons et de manteaux. «Même si les gens disposent de moyens pour se procurer du neuf dans les boutiques, ils préfèrent faire un tour à la friperie. Ils peuvent dénicher des pièces de marques connues beaucoup moins chères qu'en magasin ou dans les grandes enseignes», assure ce quadragénaire, qui affirme pouvoir gagner «jusqu' à 600 DH dans les bons jours». D'où viennent ces fripes ? «Des millions de tonnes de vêtements sont jetés en Occident, puis collectés et vendus à des personnes ou à des sociétés à des prix dérisoires, avant d'être importés au Maroc», nous confie Hassan, un commerçant de friperie qui compte plus de 10 ans dans ce domaine. «Le prix de la balle (lots d'habits empaquetés, ndlr) change selon sa qualité et son poids, qui oscille entre 60 et 100 kg. Côté prix, cela va de 25 à 150 DH pour le premier choix, tout dépend de la qualité du lot», avance-t-il. La balle contient des vêtements usagés et neufs. Elle peut parfois contenir des articles en mauvais état, non commercialisables. Le gros des livraisons vient principalement de Fnidek, Nador et Tétouan. «Il n'est pas nécessaire de faire le déplacement dans le Nord pour ramener la marchandise, il y a des grossistes qui nous approvisionnent, comme à Derb Milan à Casablanca ou Souk Louizia à Mohammédia», poursuit notre homme. Une «Jouteya» 2.0 Grâce aux réseaux sociaux, notre perception des fripes a changé. La seconde main se banalise de plus en plus et est même devenue tendance. Sur Facebook et surtout Instagram, il existe de nombreuses pages et comptes dédiés. Pendant le confinement, Rania Hizraoui a eu l'idée de lancer une plateforme dédiée aux vêtements de seconde main. C'est ainsi qu'en 2021, elle a lancé sa page Instagram, permettant aux chineurs de dénicher et d'acheter des articles de friperie ou de proposer leurs propres articles à la vente. Et l'engouement est au rendez-vous. Côté offre, il y en a pour tous les goûts. «Nous avons une large gamme de produits, des vêtements, des chaussures, des accessoires, des produits cosmétiques, des sacs... Il y a du neuf, de seconde main. Les prix oscillent entre 1 et 50.000 DH», nous confie la fondatrice de la plateforme. Au-delà de la vente et l'achat, Rania ambitionne à travers cette plateforme de rassembler une grande communauté partageant les mêmes valeurs, notamment écologiques. «Il faut savoir que le fast-fashion est considéré comme l'une des industries les plus polluantes au monde. Nous sommes conscients de ses effets néfastes et nous voulons limiter la pollution textile et favoriser l'économie circulaire».