Les tarifs actuels ont été fixés en 2006 et devaient être revus après trois ans. Les médecins jugent qu'ils sont largement inférieurs aux coûts des actes médicaux. Ils veulent des quotas de consultations à des tarifs supérieurs. C'est mercredi 5 janvier qu'ont démarré les discussions relatives à la tarification nationale de référence (TNR). Conduites par l'Agence nationale de l'assurance maladie obligatoire (ANAM), ces négociations doivent aboutir à une révision des tarifs des actes médicaux arrêtés en 2006, lors du lancement de l'assurance maladie obligatoire, d'une part, et du renouvellement des conventions signées en 2006 avec les médecins du secteur libéral, d'autre part. Organismes gestionnaires (CNSS et CNOPS) et praticiens soulignent la nécessité et l'urgence de la renégociation de la TNR étant donné que les conventions signées en 2006 et 2007 avec les prestataires de soins ont expiré durant l'été 2009. Depuis, il y a eu, selon la CNSS, une reconduction des tarifs fixés en 2006, alors que l'ANAM aurait dû lancer les négociations depuis plusieurs mois. Cette dernière n'a fait, selon une source proche du dossier, qu'appliquer la loi 65-00 qui stipule que la TNR peut faire l'objet d'une révision durant les trois premières années d'application de la couverture médicale généralisée. Ce que critiquent les médecins du secteur libéral qui estiment qu'«il y a eu une mauvaise interprétation car il s'agit de réviser au cours des trois premières années et non pas tous les trois ans comme le laissent entendre les responsables de l'ANAM !» Du côté des organismes gestionnaires, on estime qu'il fallait avoir suffisamment de recul par rapport au démarrage du nouveau régime afin de pouvoir l'évaluer et procéder à la renégociation des tarifs. D'ailleurs, outre la discussion sur la tarification, la réunion du 5 janvier doit permettre aux deux caisses de faire le bilan des trois ans d'application de l'AMO. Un bilan très attendu par les prestataires de soins dont la plupart affirment ne pas avoir encore ressenti l'impact de ce système de couverture. Ils soulignent que ces trois années d'application ont été marquées par la problématique des tarifs qui ont poussé plusieurs médecins à ne pas adhérer au régime. Toutefois, ils n'ont pas procédé au déconventionnement car, disent-ils, «le pays a besoin de l'AMO pour permettre l'accès aux soins à un large pan de la population marocaine». Les contestataires les plus virulents sont les oto-rhino-laryngologistes (ORL), les ophtalmologistes et les gynécologues. Plusieurs d'entre eux ont même cessé de soigner des patients couverts par l'AMO, en attendant la révision des tarifs applicables à la cataracte, la césarienne et l'amygdalectomie. Les médecins privés réclament la pratique du secteur 2 Par ailleurs, les médecins dénoncent le tarif de la réanimation qui est fixé à 1500 DH par jour alors qu'en réalité son coût minimum est de l'ordre de 4 500 DH, disent-ils. Ces tarifs ainsi que ceux des consultations des généralistes et des spécialistes fixées respectivement à 80 et 150 DH. Des tarifs qui sont d'ailleurs peu respectés. Les médecins spécialistes, pour leur part, ont deux autres revendications relatives aux conditions de conventionnement : la mise en place du secteur 2 et la séparation des honoraires. Concernant la pratique du «secteur 2» adopté dans d'autres pays, elle permettra un dépassement de la tarification nationale. Autrement dit, un médecin du secteur 2 qui est conventionné AMO pourra facturer ses prestations un peu plus cher que les tarifs retenus après en avoir avisé l'ordre national des médecins et l'ANAM. Et pour barrer la route aux pratiques anarchiques, le dépassement se fera dans le cadre d'un pourcentage discuté avec l'ANAM. «Cette pratique du secteur 2 permettra de sauvegarder la liberté de choix du médecin et la prise en charge du patient à hauteur de la TNR. Le surplus sera payé par le patient qui sera bien sûr avisé dès le départ», explique-t-on au Collège national syndical des médecins spécialistes du secteur privé (CNSMSSP). Ce Collège réclame, dans un second temps, la séparation des honoraires des cliniques et des praticiens. «En cas de prise en charge, l'organisme gestionnaire établit le chèque au nom de la clinique qui, le plus souvent, tarde à verser les honoraires au médecin. Pour éviter les retards et pour une meilleure gestion, nous estimons que la séparation des honoraires doit être retenue dans les conventions», suggère un médecin. De son côté, la Cnss a aussi émis des propositions relatives aux conditions de conventionnement. «Nous considérons que les tarifs ne sont pas les seuls points à discuter. Nous voulons également mettre l'accent sur l'importance de la prescription des génériques et la sensibilisation des patients à l'AMO. De plus, les médecins conventionnés doivent à notre sens expliquer aux patients couverts par l'AMO les démarches à suivre pour les dossiers», commente un responsable de la CNSS qui ne manque pas de souligner que les négociations risquent d'être longues.