Près de 790 millions de paquets de cigarettes ont été vendus en 2022. Il est attendu que la consommation baisse et, qu'à terme, le prix minimum d'un paquet atteigne 30 DH. Ecouter cet article https://www.lavieeco.com/wp-content/uploads/speaker/post-282572.mp3?cb=1673687912.mp3 Le secteur du tabac a bouclé sa première année de réforme fiscale. Sur une période de 5 ans, l'Etat a prévu une augmentation régulière de la TIC (Taxe intérieure de la consommation) sur tous les produits de tabac, jusqu'en 2026. L'objectif, rappelons-le, est de préserver les intérêts du Trésor, réduire l'écart substantiel des prix entre les cigarettes low-cost et premium, assurer une concurrence loyale entre les opérateurs et aussi préserver la santé des citoyens. «Le secteur du tabac a fait l'objet de plusieurs réformes fiscales, depuis le début des années 2000 et elles avaient toutes pour vocation d'augmenter la fiscalité sur le tabac. Mais c'est la première fois que l'Etat taxe tous les produits, quelle que soit leur gamme», explique le responsable d'une compagnie de tabac. Dès son entrée en vigueur en 2022, tous les opérateurs n'ont pas unanimement joué le jeu. Par souci de préservation des parts de marché, ils n'ont pas répercuté la hausse de la TIC sur le prix de vente de leurs marques. Seule la Société Marocaine des Tabacs (SMT) l'avait fait. En revanche, au 1er janvier de cette année, presque tous ont augmenté les prix à la vente de 1 à 2 DH. Un paquet de Marlboro coûte désormais 39 DH contre 38, Marquise 25 au lieu de 24DH... Mais là encore, certaines marques, moins plébiscitées par les consommateurs, comme Viceroy ou LD, ont préféré subir le coup de la hausse de la TIC sur leurs marges, plutôt que de risquer de perdre des clients par une répercussion sur le prix de vente. A les entendre parler, les opérateurs contactés ne semblent pas mécontents de ce changement total de calcul de la taxation des produits de tabac. Pour eux, «cette révolution devra permettre au moins de réguler le marché, de le stabiliser, de maintenir la part de marché des opérateurs et d'asseoir une concurrence saine». Pour cette année, l'Etat devra collecter quelque 12,5 milliards de dirhams de TIC sur les tabacs manufacturés, au lieu des 11,8 milliards qui auront été engrangés en 2022, soit une hausse prévue de 6%. Déjà, à fin novembre, les recettes au titre de cette taxe se sont améliorées de 7,7% à 11,3 milliards de dirhams. Le secteur demeure le 5e pourvoyeur de taxes fiscales et se positionne en 2e place après celui des carburants, en terme de TIC. Deuxième pourvoyeur de tic Une source d'une compagnie de tabac prévoit une baisse de la consommation des cigarettes consécutivement à ces hausses régulières des prix. En fait, les produits premium étaient les plus concernés par les augmentations. Ce qui créait un phénomène d'éviction vers les marques de gamme inférieure qui, elles, ne subissaient pas de changement majeur dans leur taxation. Ce n'est plus le cas depuis 2022. «La taxation devra aller crescendo jusqu'à ce que le paquet de cigarettes de la marque la moins chère atteigne un niveau de 30 DH et le plus cher à 45 DH», nous explique-t-elle. Toujours selon lui : «Le prix d'un produit de tabac devra intégrer aussi bien les droits et taxes, les coûts de fabrication et de production ainsi que les marges du fabricant. Ce qui revient à dire que le prix d'un paquet ne peut pas descendre à moins de 30 DH ou 28 DH». 15,8 milliards de cigarettes vendues Même si la consommation devrait légèrement baisser, les recettes fiscales de l'Etat devraient continuer à se développer. En tout cas, la consommation nationale reste assez stable et tourne autour de 15,8 milliards de cigarettes, sachant que les chiffres du mois de décembre ne sont toujours pas arrêtés définitivement. En nombre, les tabagistes ont vendu pour près de 790 paquets de cigarettes en 2022. Dans toute cette équation, il est une donne qu'il faut surveiller de près: l'informel. Le revers de la médaille de cette réforme fiscale est la compétitivité du marché parallèle qui devrait se raffermir. Une cigarette à 2 DH se vendra dorénavant à 2,5 DH, ou encore 25 DH au lieu de 20 DH, si l'on raisonne par paquet de cigarettes. «Le commerce illicite continuera d'exister. Mais il n'y a pas de quoi s'en faire, puisque sa part dans la taille globale du marché reste maîtrisée et donc très minime, à même pas 3%, alors que la moyenne mondiale tourne autour de 10%». Cela, grâce aux nombreuses opérations de saisies réalisées par les Douanes. En 2021, par exemple, ce sont 790 paquets qui ont été interceptés par l'Administration. Et c'est justement là où réside tout l'enjeu de cette nouvelle fiscalité. Autrement dit, discipliner les opérateurs pour qu'au final l'écart soit réduit entre les gammes, mais aussi déployer tous les moyens nécessaires pour juguler la contrebande, au moins à son niveau actuel. 24 dirhams sur 30 vont à la TIC Les compagnies de tabac devraient-elles suivre la réforme du fisc et répercuter entièrement la hausse de la TIC sur leurs produits ? Pas forcément, nous affirment nos sources. Tout est question de part de marché. «Si dans une gamme, la société dispose d'un poids élevé, elle pourrait facilement reproduire la hausse, sans que sa part de marché ne soit plombée, puisqu'elle considère qu'elle a déjà fidélisé ses consommateurs», explique un opérateur. Dans le cas contraire, elle devrait garder ses prix inchangés, dans le cas où elle accapare une part minime dans l'une de ses marques, jusqu'à ce qu'elle estime que le produit en question ait attiré un nombre satisfaisant de clients. Les fabricants devraient continuer à se livrer à ce jeu concurrentiel, chacun en fonction de sa politique et de sa position sur le marché. Pour schématiser l'effet de la hausse de la fiscalité sur le tabac, le prix minimum de 30 DH que devra atteindre en 2026 le paquet de cigarettes sera amputé de plus ou moins 24 DH au titre de la taxe intérieure de la consommation. Le paquet de Casa Sport, la gamme la plus historique et la plus populaire, qui coûte 25 DH actuellement, aurait-il le même public d'ici à 2026, si le prix monte à 30DH ?