Des études actuarielles démontrent qu'une extension progressive est possible sans mettre en danger l'équilibre du régime. En deux ans de fonctionnement, la caisse a collecté chaque année 2,6 milliards de DH de cotisation et n'en a déboursé que 300 MDH environ. Le conseil d'administration de la Caisse nationale de la sécurité sociale (CNSS) réuni le 17 février a laissé en suspens l'un des principaux points inscrits à l'ordre du jour, l'extension de l'Assurance maladie obligatoire (Amo) aux soins ambulatoires. Mais l'idée ne sera pas pour autant abandonnée puisqu'elle sera de nouveau étudiée lors de la prochaine réunion du conseil programmée pour le 11 mars. Le report a été décidé pour permettre au patronat, qui a émis des réserves, selon la CNSS, sur l'extension de la couverture médicale, d'examiner le projet lors du conseil de la Confédération générale des entreprises du Maroc (CGEM) qui doit se tenir le 5 mars 2009. A la CGEM, on se dit d'accord sur le principe de l'amélioration de la couverture. Cependant, la confédération patronale reste sceptique sur les conclusions des études actuarielles qui établissent que l'extension aux soins ambulatoires n'induira ni déficit du régime ni besoin de financement supplémentaire. Autre remarque, elle estime qu'il faut prendre du recul par rapport à l'évaluation effectuée par la CNSS car, «si très peu de personnes bénéficient aujourd'hui de l'Amo, c'est parce que beaucoup de Marocains ignorent encore l'existence de cette couverture», souligne Abdelmajid Tazlaoui, président de la commission sociale du patronat. La CGEM demande donc une plus longue période d'observation du régime avant son extension aux soins ambulatoires. Laquelle extension devait pourtant être faite une année après le démarrage de ce système de couverture, en vertu de la Charte d'Agadir signée en 2005 par les partenaires sociaux. 75 000 personnes seulement ont profité de la couverture depuis 2005 De l'avis de certaines sources proches du dossier, le report est effectivement justifié car il faut que le système soit rodé et que l'on puisse en faire une évaluation précise. La CNSS a réalisé un état des lieux qui laisse apparaître que la population couverte n'est pas très consommatrice des prestations qui constituent actuellement le panier des soins de l'Amo. Rappelons que cette couverture de base couvre les soins liés à l'hospitalisation et aux traitements relatifs aux pathologies lourdes et coûteuses, aux soins liés à la maternité ainsi qu'au suivi de l'enfant âgé de moins de douze ans. D'après l'étude réalisée par la CNSS, le taux de sinistralité de l'Amo demeure faible, soit 4% par rapport à ce qui est enregistré au niveau des compagnies d'assurances qui affichent 40%. La faiblesse du taux s'explique par le fait que la population bénéficiant actuellement de l'assurance maladie obligatoire est très jeune (une moyenne d'âge de 36 ans) et peu exposée aux gros risques figurant dans le panier des soins. Elle est davantage concernée par les soins ambulatoires. Résultat, sur les trois premières années d'application, seulement 75 000 assurés ont profité de la couverture sur les 2 600 000 personnes qui y ont droit. Les prestations qui leur ont été servies représentent seulement 10 % d'un montant global de 2,6 milliards de DH ponctionnés annuellement. Ce qui a permis à la CNSS de dégager un excédent de 1,7 milliard de DH par an. Trois scénarios étudiés pour la période 2009-2013 Partant de ce constat, l'organisme gestionnaire de l'Amo pour les assurés du secteur privé a réalisé des études pour évaluer, sur une période allant de 2009-2013, l'impact financier d'une éventuelle extension de la couverture médicale de base. L'objectif est de procéder à une extension progressive du régime de base sans toutefois entraîner une augmentation de la cotisation. Trois scénarios ont été retenus. Le premier (A) concerne l'impact de l'extension sans basculement des affiliés des compagnies d'assurance. Le deuxième (B) scénario, lui, tient compte du basculement de cette population actuellement assurée auprès des assureurs privés. Et dans le troisième schéma, appelé scénario B ajusté, on suppose que les assurés qui basculeront vers le régime Amo auront les mêmes besoins en soins que ceux constatés auprès des compagnies d'assurance. Pour chaque scénario, quatre formules différentes ont été élaborées avec différentes variantes selon que l'extension du panier de soins est faite à tous les soins ambulatoires sans exclusive ou en excluant certaines catégories comme l'optique, les soins dentaires ou les deux à la fois. Le compte d'exploitation prévisionnel pour chaque scénario est établi sur la base de différentes hypothèses (voir encadré). Les résultats obtenus permettent de dégager deux constats principaux. Une extension du panier des soins de l'AMO à tous les soins ambulatoire sans aucune exception engendrera un déficit de financement annuel qui peut aller de 765 MDH à 1,4 milliard de DH selon les cas. En revanche, une extension à tous les soins, excepté le dentaire et l'optique, permettra au régime de garder un excédent variant entre 267 et 736 MDH. Solution ? Il faudra attendre le 11 mars pour savoir si les partenaires sociaux arrivent à un accord sur le délai et la formule de l'extension.