Contrairement à leurs engagements, certaines banques ont réajusté à la hausse le taux appliqué aux crédits. Elles se refinancent à des conditions de plus en plus élevées. Les conditions semblent être réunies pour une baisse du taux directeur et/ou du taux de la réserve monétaire. C'est au tout début de 2009 que Bank Al Maghrib (BAM) publiera les nouveaux taux moyens pondérés des bons du Trésor (émission primaire) qui serviront de référence aux taux d'intérêt variables. Le court terme est indexé sur les taux dont l'échéance va jusqu'à 24 mois, le moyen terme sur les échéances à 5 ans et le long terme sur les 10 et 15 ans. A ces TMP, les banques doivent ajouter une marge minimale de 150 points de base, ce qui donne un taux plancher pour chaque maturité. Pour les moyen et long terme, maturités qui intéressent le plus les emprunteurs, en particulier ceux qui ont souscrit un crédit immobilier, les derniers taux plancher publiés début juillet étaient de 4,64% (TMP de 3,14% + 1,50%) HT et 5,07 % (TMP 3,57% + 1,50%) HT. S'il faut s'attendre à une légère hausse sur le moyen terme, le long terme restera inchangé. Très à l'aise grâce à des rentrées fiscales record, le Trésor a rejeté toutes les offres portant sur les bons à 10 ans. Cette attitude est surtout motivée par la volonté de ne pas pousser les taux à la hausse sur un marché déjà sous pression à cause du manque de liquidités. S'ajoutent à cela les incertitudes liées au changement du mode de calcul des taux de référence annoncé par BAM pour début 2009 – on invoque un système d'indexation sur les TMP du marché monétaire sur une période donnée, qui devrait mieux refléter la réalité du marché. Des hausses assumées, d'autres en catimini En attendant, des banques ou établissements de crédit immobilier ont déjà fait payer à leurs clients, dont le crédit est à taux variable, la hausse constatée au courant du troisième trimestre. Certains l'ont fait avec transparence en envoyant un courrier explicatif à leurs clients. D'autres, moins magnanimes, ont laissé les leurs constater la hausse sur leur relevé de compte. Deux éléments sont à retenir dans cette attitude. La première est qu'en principe le taux d'intérêt variable ne peut être révisé, à la hausse ou à la baisse, qu'à la date anniversaire du crédit. Cette règle n'a pas été respectée dans tous les cas. La seconde est que les banques s'étaient engagées, lors d'une réunion tenue le 29 septembre et sous la pression de BAM, de ne pas répercuter la hausse du taux directeur, passé de 3,25 à 3,50% en septembre, sur les clients. Elles avaient décidé de respecter une période d'observation de 3 mois (voir La Vie éco du 3 octobre), c'est-à-dire jusqu'en janvier 2009, avant de prendre la décision qui sied. Ce timing ne doit rien au hasard : les nouveaux taux de référence seront connus début janvier. Evidemment, cette situation ne concerne que les clients dont le crédit était en cours au moment de la prise de cette décision. La majorité des institutions contactées disent s'en tenir à leurs engagements. En revanche, on sait que pour les nouveaux dossiers, chacun peut pratiquer les taux qu'il veut, dans la limite légale (le taux effectif global qui sert de plafond est à 14,17%). D'ailleurs, pour l'immobilier, on constate que plus personne ne communique sur la limite inférieure pour le long terme (5,07% HT). Selon un banquier, «ce taux est bel et bien offert, mais ne bénéficie qu'au client disposant d'un revenu relativement élevé». Il était en effet juste utilisé comme une offre destinée à se positionner sur un segment de marché (celui de l'immobilier), alors en plein boom. Des dépôts à terme rémunérés à 5% Aujourd'hui, la situation est assez inédite. Evidemment, le statu quo imposé indirectement par le Trésor sur les taux longs est un moindre mal pour le client, sachant que des sorties sur le marché obligataire tirent les taux à la hausse, tant que l'insuffisance de liquidités persiste. En revanche, les banques, quand bien même elles sont loin d'être en mal de rentabilité, se résignent difficilement «à ne rien faire», souligne un cadre dont les propos manifestent un certain agacement. Leur problème, depuis le milieu de la deuxième moitié de l'année, c'est de trouver du cash.Leurs besoins moyens quotidiens sont très significatifs et, face à un marché interbancaire asséché, Bank Al Maghrib pare au plus pressé en satisfaisant pratiquement toutes les demandes de refinancement. Ses interventions, en moyenne des fins de semaine, par le biais des avances à 7 jours sur appel d'offres, se sont établies à 11, 8 milliards de DH en octobre, soit 3 milliards de plus que lors du mois précédent. Evidemment, cet argent est payé plus cher, c'est-à-dire à concurrence de l'augmentation du taux directeur (0,25%). L'impact sur le loyer de l'argent est sans équivoque, même si de hauts cadres des finances soulignent, peut-être par dépit, que le volume du refinancement sur le marché interbancaire est très faible. L'autre aspect est que les banques sont obligées de payer très cher les ressources. Les entreprises très liquides et autres gros revenus se voient proposer des taux allant de 4,5 à 5% ces derniers jours, sur les dépôts à terme. Dans un tel contexte, le marché s'inscrit fatalement dans une logique de hausse des taux. A défaut de pouvoir collecter davantage de ressources, la solution pourrait résider dans la baisse du taux directeur, sachant que les conditions qui ont été à l'origine de sa hausse ont changé. A l'époque, l'objectif de Bank Al Maghrib était de contenir l'inflation pour préserver le pouvoir d'achat. Aujourd'hui, la tendance générale des prix est à la stabilisation, quand ce n'est pas à la baisse. L'institut d'émission prévoit même que le taux d'inflation sera de 3,90% en 2008 avant de redescendre à 3,60% en 2009. Sur un autre plan, le réajustement du taux de la réserve monétaire obligatoire (15% des ressources) pourrait favoriser une détente. En octobre, cette réserve était de 56 milliards de DH.