La superficie plantée par les nouvelles variétés dépassera les 7 800 hectares en 2022. La région d'Al Hoceima reste épargnée de l'attaque de la cochenille sauvage. Le prix de la figue de barbarie va jusqu'à 20 DH l'unité. La cochenille qui a attaqué le cactus a été dévastatrice dans bon nombre de régions. Alors que le figuier de barbarie était considéré comme une culture secondaire, servant, entre autres, à la clôture des exploitations agricoles, il a été rehaussé au rang des filières les plus importantes au Maroc, lors de la déclinaison de la stratégie du Plan Maroc Vert. D'ailleurs, les prévisions des superficies plantées de cactus projetées par ce PMV pour 2020 ont été rapidement atteintes en 2014. Et pour cause, un engouement des agriculteurs vers cette culture, qui a été accompagnée par le développement de plusieurs unités de conditionnement et de transformation de la figue de barbarie pour valoriser davantage les produits et sous-produits du cactus. Pour l'heure, plus d'une douzaine d'unités de valorisation de cactus existent, se spécialisant aussi bien dans l'huile, que les produits cosmétiques, les confitures, les aliments de bétail, les compostes..., ainsi qu'une unité d'emballage des fruits de cactus. Au moment où la filière a pris de l'ampleur, la maladie est apparue et s'est propagée rapidement vers d'autres bassins de production, anéantissant complètement le cactus dans certaines zones réputées pour cette culture. Seule une région reste épargnée de la cochenille sauvage de cactus. Il s'agit d'Al Hoceima. «Ce n'est pas une question de résistance du génotype de cactus "Dellahia''. Mais, tout simplement, les conditions et les facteurs ne sont pas encore réunis pour que cet insecte arrive à la zone», explique Mohamed Sbaghi, directeur de recherche et chef du Département de la protection des plantes, à l'INRA (Institut national de la recherche agronomique). La dissémination de cette cochenille étant difficile, le ministère de l'agriculture a mis en place un plan national d'urgence de lutte contre la cochenille du cactus en 2016. En parallèle aux actions de traitements chimiques, d'arrachage et d'enfouissement des plants de cactus totalement infestés, le ministère a envisagé un programme de recherche ciblé qui a été confié à l'INRA. L'institut a concentré ses efforts de recherche sur trois axes de lutte principaux, à savoir la lutte biologique, le recours aux biopesticides et la sélection de matériel végétal de cactus résistant à la cochenille et ce, avec l'appui des différentes structures centrales et régionales du ministère (Directions centrales, DRAs, ONSSA, DPA, ORMVAs, ONCA...). «Ces axes de recherche ont abouti à des résultats encourageants. Toutefois, ceux qui sont les plus concluants résident dans les acquis en matière de sélection de variétés de cactus résistantes ou tolérantes à Dactylopiusopuntiae», explique M.Sbaghi. En effet, huit variétés de cactus résistantes à la cochenille ont été identifiées à partir de la collection nationale de cactus de l'INRA. Il s'agit des variétés Marjana, Belara, Karama, Ghalia, Angad, Cherratia, Akria et Melk Zhar, qui toutes ayant subi les tests de vérification de la stabilité de leur résistance, ont été inscrites par l'ONSSA au catalogue officiel des espèces et variétés végétales au Maroc. Ainsi, un parc à bois de matériel végétal de cactus de départ a été installé, en 2017, à la station expérimentale de l'ORMVAD avec des plants des huit variétés de cactus résistantes à la cochenille. «Entre 2018 et 2022, il y a eu multiplication et production des plantules de cactus en sachet à partir de ce parc ; chose qui a permis l'installation de plusieurs plateformes sur le territoire national avec un nombre total de plants de cactus d'environ 150 000 plants de ces variétés», ajoute notre source. Rappelons que dans la nouvelle stratégie agricole Génération Green, il est question de reconstituer le cactus détruit par la cochenille dans les principaux bassins de production de la figue de barbarie avec la plantation de 120 000 hectares à l'horizon 2030. Pour accompagner cet objectif, l'INRA compte développer environ 1 630 000 plantules de cactus en sachet et collecter 481800 cladodes entières des différentes plateformes, soit 2 112 000 plants. Ainsi, entre 2021 et 2022, la superficie plantée culminera à 7 800 hectares. Le programme de plantation augmentera progressivement pour atteindre 15 000 ha en 2023, 20000 ha en 2024 et environ 23 000 ha pour chaque année de 2025 à 2028. Il faut dire que toutes les régions sont demandeuses en cactus, puisqu'elles ont été totalement ravagées. Mais, comme la matière première "matériel végétal des variétés de cactus résistantes à la cochenille'' est limitée en nombre de plants, le programme du ministère s'est adressé dans un premier temps et dans le cadre de l'agriculture solidaire, aux régions de Guelmim-Oued Noun, Marrakech-Safi, Souss-Massa et de Casablanca-Settat, en livrant et plantant gratuitement des plants de cactus directement chez les agriculteurs. «Au fur et à mesure, tout le cactus sensible détruit par la cochenille sera reconstitué par les variétés résistantes. En effet, entre 2021 et 2028, bien avant la fin de la stratégie Génération Green, l'offre de l'INRA en plantules et cladodes de cactus sera d'environ 37 600 000 et la superficie plantée par le ministère de l'agriculture portera sur 136 000 hectares», souligne M.Sbaghi, en dépassement des objectifs cibles. Ces nouvelles plantations offrent un taux de rendement pour le moins généreux. Selon M.Sbaghi, «nous ne pouvons pas arrêter avec précision le taux de rendement à l'hectare, mais les données observées au niveau des plateformes sont prometteuses. En matière fourragère, les rendements peuvent osciller entre 30 et 60 tonnes/ha, alors qu'en matière de fruit, une production moyenne variant entre 15 et 40 tonnes/ha est constatée selon les variétés et l'itinéraire technique poursuivis. La densité de plantation à la base de cette estimation est de 1 110 plants/ha». Les conditions dans lesquelles évolue le cactus depuis quelques année, a conduit à une raréfaction de son fruit sur le marché et donc à une explosion des prix. En fonction des régions, la figue de barbarie est commercialisée à un prix oscillant entre 10 DH et 15 DH et va jusqu'à 20 DH/ unité. Il va sans dire qu'une fois les régions seront desservies en plants et que le volume de production augmentera, les prix devront revenir à leur niveau normatif. Un travail de longue haleine sur lequel s'attellent l'INRA, le ministère de l'agriculture et les autres parties concernées.