La reconversion vers d'autres variétés de segmentation et d'autres produits, ainsi que la hausse des coûts de production de la tomate ronde et les perturbations climatiques sont à l'origine de la baisse de l'offre. La flambée des prix suscitée par la spéculation et la multiplicité des intermédiaires et non par l'export. La commercialisation de la tomate continue à alimenter les discussions des ménages mais aussi des professionnels de la filière. Les dernières hausses des prix au détail du produit qui a suscité la montée au créneau du consommateur, est justement une occasion pour la profession pour expliquer les facteurs de la réduction de l'offre et les conditions de sa commercialisation. Pour eux, la situation actuelle a des causes profondes et multiples. Si la flambée des prix ces dernières semaines sur le marché local est dite engendrée par la spéculation sur le produit par les intermédiaires, la réduction de l'offre de la tomate ronde sur la place n'est pour les producteurs pas seulement due à ce facteur. De l'avis des agriculteurs, la perturbation de la logistique en général enregistrée ces dernières années, la pénurie des intrants et la hausse démesurée de leur prix, sans oublier l'impact des perturbations climatiques et du manque des engrais pour entretenir la plante, ont engendré la réduction de la production aujourd'hui ressentie. «La reconversion en progrès constamment ces dernières années vers d'autres produits telles que la framboise ou les myrtilles ou encore le développement de la tomate de segmentation telle que la tomate cerise au détriment de la tomate ronde, sont aussi des vecteurs de cette situation. Cette tendance pèsera de plus en plus sur la disponibilité de la tomate ronde au niveau du marché local», ajoute un producteur de la filière. Selon la profession, les superficies de culture de tomates rondes ont régressé de 70% en cinq ans. Le manque de rentabilité est un des facteurs à l'origine de cette situation. «L'augmentation des coûts de production sur les 5 dernières années, conjuguée à l'imposition à la TVA qui se chiffre à 40000 DH/ ha, alors que le producteur exportateur ne la récupère pas, sont autant d'éléments qui ont engendré la baisse des investissements dans la culture de cette variété de tomate. Un hectare de tomate ronde revient aujourd'hui à environ 500 000 DH. Avant il était de l'ordre de 300000DH», soutient un exportateur. Face à cette envolée des coûts de production, le retour sur investissement du producteur est dit limité sur le marché local. Sur les cinq derniers mois le prix net producteur au kg est de 4 à 5 DH environ, alors que le coût de production au kg est de 3 DH pour une unité de production structurée. «Chaque année depuis juillet/août à janvier nous vendons la tomate à perte sur le marché local, en moyenne à 1,50 DH le kg, soit le prix de la caisse de 30 kg entre 45 à 50 DH», avance un professionnel. Au cours de ce moi de mars, le prix de la caisse de tomates de 30 kg était au marché de gros d'Inezgane à 195,71 DH, soit 6,5 DH le kg, alors que le prix au détail était entre 11 à 13 DH le Kg. Résultat de cet état des lieux, le producteur s'est tourné vers des variétés plus rémunératrices à l'export qui de l'avis des exportateurs subventionne depuis toujours le marché local et constitue une soupape pour le producteur. Mais sur les marchés extérieurs, les professionnels disent être confrontés à d'autres aléas. La perte du marché russe en est une. «Ce marché est passé de 120 000 tonnes à zéro après une régression de quatre ans. L'équivalent de volume n'a pourtant pas été reversé sur le marché local. Et pour cause, plusieurs agriculteurs ont fermé leur unité de production, car ils étaient spécialisés dans la production vers la Russie», déplore un membre de l'Apefel (Association des producteurs et exportateurs de fruits et légumes). En Europe, le calendrier européen s'est déplacé vers la période de prédilection de la tomate marocaine avec un impact négatif sur la demande de l'origine Maroc. Comment rétablir des cours normaux sur le marché local et doper la production de la tomate ronde, variété la plus demandée par les ménages. De l'avis d'un expert, l'augmentation de la production de la tomate ronde passe par des mesures d'incitation. «La diminution des coûts de production repose notamment sur l'appui à l'amélioration de la qualité des serres», souligne-t-il. Selon lui, il convient toutefois de promouvoir le changement des habitudes de consommation alimentaire locales vers d'autres variétés de tomates. Pour les producteurs, il y a lieu aussi d'autoriser la commercialisation directe du produit pour toutes les stations de conditionnement et non seulement pour les agrégateurs. A l'export, le développement de la filière passe par la récupération de la TVA par tous les producteurs exportateurs et la reconquête du marché russe, ainsi que potentiellement d'autres marchés. Pour les producteurs, le marché à l'export est important, car il apporte un équilibre pour faire face aux pertes sur le marché local. Pour eux, tous les marchés à l'export sont importants, y compris le marché africain. Ils soulignent dans ce cadre que la régulation du marché local par la réduction des exportations des tomates vers les pays d'Afrique n'est pas acceptable. «Pour le développement de ce marché nous avons fait des efforts de structuration et nous tenons à continuer dans ce sens», soutiennent les représentants de l'Apefel. Ils assurent que le marché de l'export ne pourrait pas être à l'origine de la hausse des prix sur le marché local. Le volume des exportations de la tomate n'a pas dépassé 11 000 tonnes depuis le début de l'année, contre 44 000 tonnes au cours de la même période l'année précédente marquée par une stabilité des cours au détail sur le marché national.