La région de Fès-Meknès a cette particularité de regorger de sources et de thermes dont les bienfaits et les vertus des eaux dépassent les frontières nationales. C'est une station thermale dont les eaux chaudes et riches en soufre guérissent ou remédient aux complications respiratoires et aux dermatoses : «Moulay Yaacoub». Nul ne sait en fait qui est ce saint «Moulay Yaacoub» et les documents historiques se rapportant à son origine ou à sa vie, sont rares sinon inexistants. Pourtant, depuis bien des années, les gens viennent de toute part pour profiter des bienfaits de ses eaux. La station est encore plus célèbre par une chanson de Houcine Slaoui qui loue justement les vertus du saint et de ses eaux «Ô Moulay Yaâcoub, guérit-moi de ces boutons, pauvre étranger que je suis...»... Au fil des années, la station thermale a connu bien des changements et moult aménagements afin de répondre à une demande croissante et à une affluence de plus en plus importante et est devenue un bassin dans lequel plongeait tout le monde sans crainte de contagion, de «galleux» ou de «teigneux»... Bien sûr, la croyance et la tradition disaient que l'immunité venait du simple fait de crier avant de sauter la fameuse «formule magique» : «Froid et Chaud ô Moulay Yaâcoub» (Bared ou skhoune a Moulay Yaâcoub). C'est aujourd'hui une station aux normes internationales avec même une clinique, un hôtel de luxe et des espaces dédiés aux différentes maladies, en plus d'espaces de villégiatures, parce que, jusqu'à tout récemment, et au printemps surtout, les familles de Fès, de Meknès et de Taza ou même d'Oujda venaient y passer leurs vacances et les artisans de la médina y organisaient des excursions dites traditionnellement «N'zaha». Lointaines origines mais... Pour beaucoup, la visite à Moulay Yaâcoub est une sorte de voyage de purification. Un pèlerinage à caractère spirituel dont le but de vénérer le saint et d'avoir sa bénédiction et son aide durant l'année. Ensuite, la baignade dans ses eaux est l'aboutissement, puisqu'on croit se laver de tous les péchés. Une aussi profonde croyance ancrée dans les esprits éloigne toutefois la thèse selon laquelle l'origine de Moulay Yaâcoub remonterait au temps de Juba II. Ce puissant roi amazigh qui, au début de l'ère chrétienne, voulait se faire rival de la civilisation romaine en en adoptant certaines coutumes, notamment en se dotant de thermes qu'il fit ériger non loin de Volubilis. Un site qui, selon les historiens, prit le nom de «Aqua Ioubae», (l'eau de Juba», nom qui a été transformé plus tard, par les Arabes, arrivés sur les lieux en «Yaâcoub»... Pour sa part, l'historien Lotfi Bouchentouf qui s'est basé lui sur des ouvrages tels que «El Manqib» et «Kitab At-tachaouf» d'Ibn Zyati, rapporte trois histoires distinctes dont les deux premières font état d'un soufi devenu «Majdoub» qui, sous les Almohades, (seconde moitié du XIIe siècle), s'est distingué en entreprenant la démarche classique d'un érudit en devenant ermite et qui répondait au nom de «Yaâcoub» et s'est installé à quelques kilomètres de Fès, sur un site qui semblait lui offrir les conditions du bien-être, soit l'actuel Moulay Yaâcoub. Avec le temps, les visiteurs devenaient des pèlerins et venaient en masse solliciter la bénédiction du saint vénéré... Une autre version rapporte plutôt l'appellation, voire l'origine à Moulay Yaâcoub, fils du sultan Almohade Yaâcoub El Mansour, qui n'était pas Majdoub mais plutôt très porté sur la philosophie soufie. Il décida alors de délaisser tous ses privilèges. Ainsi vêtu de haillons, symbole soufi de renoncement aux biens matériels et de dévouement à la spiritualité, Moulay Yaâcoub se rendit dans la région de Sidi Harazem pour parfaire son initiation avant de revenir sur les lieux dont la singularité et l'attractivité ont contribué à augmenter sa popularité. Puis l'historien en arrive à une version dont l'écho se fait surtout dans les contes populaires, vu qu'elle est entachée de beaucoup de faits surnaturels. Celle-ci met en vedette un «génie» (jenn) du nom de Sidi Blal qui fait partie des «jnoun» serviteurs «Msakher», et qui aurait commis une grave erreur (dont la nature n'est citée nulle part, même pas dans les contes) et en guise de réparation, il est condamné à répondre aux ordres d'un saint. Sidi Blal doit rendre des comptes à Moulay Abdelkader Jilani (ou Jilali comme prononcé au Maroc) qui était considéré, à l'apogée de Baghdad, comme le seigneur des saints. Moulay Abdelkader ordonna alors à Sidi Blal de se rendre aux fins fonds du monde arabo-musulman pour payer sa faute et charge un certain Yaâcoub de le surveiller. Sidi Blal régule la température de l'eau sur ordre de Moulay Yaâcoub, d'où la fameuse formule citée ci-haut «Bared ou skhoune a Moulay Yaâcoub» par laquelle les pèlerins, encore aujourd'hui, implorent l'indulgence et la «Baraka» du saint des lieux... Moulay Yaâcoub d'hier et d'aujourd'hui Comme déjà souligné, la station thermale de Moulay Yaâcoub est actuellement une station ultra moderne et est équipée selon les derniers cris de la technologie médicale. Bien qu'exploitée depuis la nuit des temps, cette station n'allait connaître sa renaissance que dans les années 60. En effet, en mars 1962, feu S.M. Hassan II allait procéder à l'inauguration de cette station moderne fondée par le docteur François Cléret qui s'était intéressé par les bienfaits reconnus des eaux sur les maladies de la peau et qui découvrit, ensuite, après analyse de ces eaux qu'elles soulageaient également les infections respiratoires. Ces découvertes ont amorcé le lancement du réaménagement total et de la modernisation du site qui vit naître au début deux pavillons : un pour le traitement des maladies respiratoires et l'autre pour les dermatoses, en plus d'hôtels pour héberger les visiteurs du Maroc et d'ailleurs... Et depuis, Moulay Yaâcoub n'a cessé de s'agrandir et de se moderniser pour devenir aujourd'hui une station thermale de renommée mondiale bien réelle et au-delà de toute légende entourant encore à ce jour sa naissance. Quid du voisinage ? Le développement de toute la province de Moulay Yaâcoub va de pair avec la montée en flèche de la modernisation de la station thermale qui en fait sa célébrité. Selon la Division de l'action sociale (DAS) de la province de Moulay Yaâcoub, ce ne sont pas moins de 231 projets d'un investissement global estimé à plus de 91,194 MDH, qui ont été programmés entre 2019 et 2021 au niveau de cette province dans le cadre de l'Initiative nationale pour le développement humain (INDH). Ces projets, qui s'inscrivent dans le cadre de la troisième phase de l'INDH, ont été financés intégralement par le fonds de l'INDH. Ces opérations se répartissent entre les programmes de rattrapage des déficits au niveau des infrastructures et des services de base dans les territoires sous-équipés (27 projets/28,9 MDH), l'accompagnement des personnes en situation de précarité (39 projets/10,8 MDH), l'amélioration du revenu et de l'inclusion économique des jeunes (26 projets /10,66 MDH) et le développement humain des générations montantes (139 projets/40,7 MDH). Parmi ces projets programmés, 152 ont été totalement achevés et 79 autres sont en cours de réalisation.