Les collaborateurs ne peuvent pas adhérer à ce qu'ils ignorent, il faut leur donner les outils d'appréciation par le dialogue. Mais communiquer est une œuvre de longue haleine qui exige un travail sur soi. S'il est une idée qui m'a fortement marqué dans la série des séminaires de Jean-Marie Peretti auxquels j'ai eu le plaisir d'assister, c'est bien la suivante : «Gérer les ressources humaines, c'est communiquer, communiquer et communiquer». Communiquer sur les enjeux, sur les objectifs, sur les difficultés présentes ou à venir, communiquer sur ce qu'on attend des collaborateurs. Il est toujours ahurissant d'entendre des «responsables» se plaindre (alors qu'ils ne font rien pour) que leurs équipes n'adhèrent pas à leurs objectifs, aux objectifs de l'entreprise, ne s'engagent pas…. Comment voulez-vous que des collaborateurs adhèrent à ce qu'ils ignorent, à ce que le management ne s'est jamais donné la peine de leur communiquer, de leur expliquer ? Communiquer, c'est également accepter de partager le pouvoir, celui de l'information. «Qui détient l'information détient le pouvoir», disaient les «ringardos». De quel pouvoir parlent-ils ? Si c'est celui qui a fait que l'on soit collectivement médiocre, c'est désormais mission accomplie. Il ne sert à rien d'en rajouter. Il n'y a pas de recette magique pour transformer des participants à une formation, quelle qu'en soit la durée, en des super «comunicator». Tous les séminaires et les ouvrages du monde n'y pourront rien. Certes, les techniques existent (elles n'ont rien de compliqué en soi), elles peuvent être efficaces, à condition d'être capable de se remettre en question, de s'imposer la rigueur de les appliquer, et c'est là toute la difficulté. Communiquer, bien communiquer est une œuvre de longue haleine, un véritable travail sur soi, surtout qu'on traîne, comme un boulet, tant de passifs culturels. Allez exiger de ceux pour qui fixer des yeux le père, le prof, le flic… a toujours relevé de l'affront, voire du sacrilège, de se muer subitement en des as de la com. Nous connaissons tous la fameuse phrase pour l'avoir tellement subie: «Oukatchouffe fia mazal !» (Et tu oses encore me regarder droit dans les yeux). Baissons les yeux alors, courbons l'échine pour ne pas subir les foudres de nos aînés… Et voilà que l'entreprise nous demande de faire preuve d'intelligence émotionnelle, l'intelligence du comportement comme ils disent. Et voilà que le QI (quotient intellectuel) est en train de céder le pas au QE (quotient émotionnel). Bon courage ! «Nous avons deux oreilles et une bouche pour écouter deux fois plus qu'on ne parle». Une énième lapalissade certes mais essayez donc de vous imposer la rigueur de l'écoute. C'est tout un programme ! L'écoute est fondamentale pour bien communiquer. Ecouter, c'est préciser pour bien comprendre. C'est également confirmer pour être sûr d'avoir compris ce que veut dire l'interlocuteur. Ecouter pour rompre avec cette fâcheuse habitude qui consiste à se saisir d'une bribe de phrase pour enchaîner et bâtir des scénarios qui n'ont, finalement, rien à voir avec ce que voulait dire l'interlocuteur. Des «je vous ai compris» à tout va. Bien écouter, c'est se débarrasser des préjugés qui donnent l'illusion de comprendre l'autre avant même qu'il ne se prononce. «Je sais ce que tu veux dire». A peine vous avez commencé à poser une question que vous avez les réponses. Nous sommes sûr d'avoir bien écouté quand notre interlocuteur nous dit : «Effectivement, c'est bien ce que je veux dire». C'est aussi simple que cela. Un énième dilemme culturel : se forcer à construire alors que l'on est si prompt à détruire, alors que nous excellons dans «l'art» de «casser». Il n'est pas question de faire dans l'angélisme. Critiquer, faire des reproches, pourquoi pas ? Mais dans quel objectif en fait ? Il ne s'agit pas de critiquer pour le plaisir de le faire. L'objectif est que l'autre change de comportement, de méthodes de travail, qu'il adhère à une idée, à une suggestion… qu'il accepte nos remarques sans perdre son engagement sans provoquer la rupture ni la démotivation. Et si on parlait de l'échec ? En entreprise d'aucuns prônent le droit à l'erreur (nous parlons d'une erreur et non de la même erreur répétée n fois et encore moins de fautes et surtout pas de fautes professionnelles graves car celles-ci sont passibles de licenciement). L'échec est l'occasion d'apprendre. Le tout est de savoir le transformer en opportunité d'amélioration, tirer les leçons et prendre les résolutions et plans d'action qui permettent de le dépasser. Souvenir, souvenirs… Rappelez-vous de ces élèves qui se sont entendus dire qu'ils étaient des «nuls» car ils avaient eu une ou deux mauvaises notes (parmi une quinzaine de bonnes notes !). Ces bons pères de famille qui ne se sont jamais donné la peine de comprendre pourquoi leur progéniture pouvait être «mauvaise» dans une discipline ni comment faire pour l'accompagner de manière à ce qu'elle s'améliore. A force de s'entendre dire qu'on est mauvais, on finit réellement par le devenir. Mais bien réellement…Mission accomplie, messieurs. Cette même progéniture reproduit le même schéma en entreprise, avec ses collaborateurs. Bravo la relève ! Un conseil ! Ne jamais commencer par le négatif, c'est le meilleur moyen pour braquer votre interlocuteur qui rejettera ce que l'on souhaiterait qu'il améliore… A moins que l'on ne fasse dans le genre «Terminator», amateur de gros dégâts et c'est là une autre histoire… Il s'agit en fait de construire sur les points forts pour spécifier par la suite les points à améliorer. Il est tout aussi déconseillé de généraliser. «Votre rapport est mauvais». Vous êtes sûr que TOUT le rapport est mauvais ? Ou s'agit-il seulement de quelques aspects à améliorer. «On ne peut pas tenir une réunion avec lui à 8 h du matin, il n'est pas matinal…». Pas matinal lui ? Vraiment pas ? Auriez-vous oublié les journées qui débutaient à 6 h du matin et qui duraient 12 voire 14 heures. Mieux vaut donc préciser ce qui ne vous convient pas dans le travail ou dans le comportement d'un collaborateur, d'un collègue…, Mieux vaut également préciser les points à améliorer car il est difficile d'améliorer un travail sans savoir précisément les aspects satisfaisants et ceux qui ne le sont pas. Autrement dit, apprendre à féliciter. Cela fait plaisir de s'entendre dire qu'on est bon, qu'on a fait de l'excellent travail, qu'on a réalisé une performance… à condition que ça soit mérité bien sûr. Certains managers s'obstinent à faire une fixation sur la rémunération en tant qu'unique facteur de motivation et se privent de certains facteurs de motivation qui coûtent … 0 DH. Autant on n'hésite pas à pointer du doigt les réalisations ratées, autant on est réticent à reconnaître ce qui se fait de bien. Un écrit félicitant un salarié, une reconnaissance, publique de préférence… ne peuvent qu'encourager un collaborateur à faire mieux, toujours mieux. A quoi bon s'en priver ? Bonne lutte contre nous-mêmes !